Burkina Faso : manifestations pour commémorer l’assassinat de Zongo


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Plusieurs centaines de manifestants sont descendus dans la rue mercredi à Ouagadougou pour dénoncer le non-lieu de la justice dans l’affaire de l’assassinat, il y a huit ans, du journaliste burkinabé Norbert Zongo. Les journaux burkinabé sont parus avec une page contenant la mention: « Non à l’enterrement du dossier Norbert Zongo ».

A l’appel du Collectif des organisations démocratiques de masses et de partis politiques (CODMPP), les manifestants, qui portaient des banderoles et foulards noirs ou simplement vêtus de chemises ou de pantalons noirs se sont rendus au cimetière de Gounghin (est de la capitale) sur la tombe de Norbert Zongo et de ses trois compagnons assassinés.

Les manifestants ont ensuite organisé une marche suivie d’un long meeting sur la Place de la Nation, le plus grand espace public de la capitale, brandissant des banderoles sur lesquelles on pouvait lire: « Non au non-lieu – Oui à la réouverture du dossier Norbert Zongo », « Vérité et justice pour Norbert Zongo et ses trois compagnons, châtiment pour les auteurs et les commanditaires ».

Scandant des propos hostiles au pouvoir du président Blaise Compaoré, la foule a écouté une dizaine de personnes qui se sont succédées à la tribune pour exiger la réouverture du dossier suite au non-lieu accordé à Marcel Kafando par la justice burkinabé le 19 juillet 2006 et confirmé en appel le 19 août. Les orateurs ont tour à tour dénoncé « une justice aux ordres », redoutant que le dossier Norbert Zongo soit enterré à jamais.

Lutter contre l’impunité des crimes économiques et de sang

Dans son allocution, le vice-président du Collectif, Tollé Sagnon, a appelé ses concitoyens à se mobiliser pour participer à des marches-meetings qui seront organisées en fin janvier 2007 à travers tout le pays pour exiger la réouverture du dossier. Il a invité les manifestants à un combat citoyen pour défendre leurs droits et libertés et lutter contre l’impunité des crimes économiques et de sang, ainsi que la vie chère.

Journaliste et directeur de publication de l’hebdomadaire « L’Indépendant », Norbert Zongo avait été retrouvé mort calciné dans sa voiture avec trois de ses compagnons, le 13 décembre 1998, sur la route de Sapouy (à 100 km au sud de Ouagadougou). Une commission d’enquête indépendante créée par le pouvoir suite aux pressions de la rue avait conclu que le journaliste a été tué dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. Il enquêtait notamment sur la mort de David Ouédraogo, le chauffeur du petit frère du chef de l’Etat, François Compaoré.

La commission d’enquête avait identifié six suspects « sérieux », tous membres de la garde rapprochée du chef de l’Etat Blaise Compaoré, mais seul l’adjudant Marcel Kafando avait été inculpé en 2002 avant de bénéficier d’un non-lieu judiciaire.Plusieurs organisations de défense des droits humains, mais aussi les Etats-Unis, le Danemark et l’Union européenne, s’étaient dit indignés de cette décision et ont appelé les autorités burkinabé à tout mettre en oeuvre pour permettre à la justice de faire la lumière sur la mort du journaliste.

Les journaux burkinabé disent non à l’enterrement du dossier Zongo

Les journaux burkinabé, parus mercredi, ont présenté une page ne contenant que cette unique mention: « Non à l’enterrement du dossier Norbert Zongo », pour rendre hommage au journaliste. L’action a été initiée par l’Association des journalistes du Burkina (AJB) qui a demandé, dans un communiqué adressé aux organes de presse du pays, d’observer une minute de silence en sa mémoire.

Pendant toute la semaine et le reste du mois de décembre, les hebdomadaires, les bihebdomadaires, ainsi que les mensuels inscriront cette page « blanche » les jours de leur parution. Cette minute de silence souhaitée par l’AJB, qui diffère en fonction du type de médias, devait être marquée à partir de 16h 00 (heure locale et GMT) par une interruption des émissions et programmes pendant une minute au niveau des radios.

Dans la matinée de ce 13 décembre, la quasi-totalité des établissements d’enseignement public et l’université de Ouagadougou étaient désertés, à part le personnel de l’administration. Des services publics tels le Centre hospitalier national Yalgado Ouédraogo, les Impôts, les Finances, les Télécommunications, ainsi que le transport urbain (taxis et bus) ont été perturbés. En revanche le commerce, marqué par l’ouverture des étals au niveau de Rood Woko (le plus grand marché de Ouagadougou) et certaines écoles privées ne semblent pas avoir été touché par le mouvement de protestation.

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