Burkina : cacher les enfants pour les « sauver » de la vaccination


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Dans l’extrême Ouest du Burkina Faso, les « Sunnites » et les « Pieds-Nus », deux communautés rurales islamiques, s’opposent farouchement à la vaccination de leurs enfants et défraient la chronique dans les médias du pays. Les autorités sont obligées d’employer la force pour accomplir leurs missions de santé publique.

Par Bagassi KOURA

Les forces de sécurité burkinabès ont été obligées d’assiéger, le 19 décembre dernier, les villages voisins de Médine et de Dar El Assane, dans la province de Kénédougou (500 km à l’Ouest de Ouagadougou), afin de procéder à la vaccination des enfants. Une opération à laquelle s’opposent farouchement ces populations. C’est la deuxième fois en un mois que ce genre d’événement se produit dans ces deux localités rurales, respectivement habitées par les « Pieds-Nus » (traduction littérale) et les « Sunnites » (appelés génériquement comme tel car tous les musulmans du village sont sunnites).

Vaccinés de force

Les deux villages ont été encerclés par la police, qui a procédé à une fouille minutieuse, concession par concession, afin de faire sortir les enfants dont certains ont été retrouvés camouflés sous des lits dans des chambres, d’autres dans des greniers… Cette intervention a permis finalement de vacciner, contre le gré des parents, 80 enfants chez les Sunnites. « Mais le plus surprenant encore était de voir des hommes et des femmes pleurer parce que leurs enfants étaient vaccinés contre certaines maladies », rapporte l’Agence d’Information du Burkina.

Pour leur part, les « Pieds-Nus », visiblement effrayés par la forte présence des forces de l’ordre, ont changé d’avis à la dernière minute et laissé vacciner leurs enfants, sans résistance. Mais ils n’en démordent pas. « Ils ont souligné que c’était par obligation, puisqu’ils ne pouvaient pas faire autrement », explique le correspondant local du quotidien d’Etat Sidwaya du 30 décembre.

Le Blanc ennemi des « Pieds-Nus »

Ces deux communautés, très conservatrices et dont le taux d’analphabétisme atteint presque les 100%, s’opposent toutes à la vaccination de leurs progénitures pour des raisons diverses. A en croire les « Pieds-Nus », les Blancs seraient leurs pires ennemis. Ainsi refusent-ils donc tout ce qui vient de l’Occident. Quant aux « Sunnites », ils reconnaissent certes que la vaccination n’est pas interdite par le Coran (le livre saint de l’Islam), mais soutiennent que c’est une opération qui va à l’encontre de la volonté divine.

Le 22 novembre dernier déjà, ils s’étaient opposés à la vaccination de leurs enfants lors de la 5ème journée de vaccination contre la rougeole et la poliomyélite. A Médine, chez les « Pieds-Nus », l’opération s’était alors bien déroulée. En revanche, les villageois s’y étaient opposés à Dar El Assane, obligeant les agents de santé et les policiers à utiliser la force pour contraindre les femmes à faire vacciner leurs enfants. Mais « certaines d’entre elles ont réussi à franchir le fleuve qui sépare ledit village du Mali avec leurs enfants », rapporte Sidwaya dans sa parution du 23 décembre. Trois responsables communautaires ont depuis été interpellés par la police. Le Haut-commisssaire de la province du Kénédougou, qui s’est personnellement rendu sur place, a lancé un dernier avertissement aux populations des deux communautés, les invitant à mener tranquillement leurs activités religieuses sans nuire à la vie et à la santé des enfants.

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