Arrestations et disparitions : série noire pour les journalistes gambiens


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Drapeau de la Gambie
Drapeau de la Gambie

Sam Obi et Abdul Gafari, respectivement directeur et journaliste au quotidien Daily Express (privé), ont passé quatre jours dans les locaux des services secrets gambiens, la National Intelligence Agency (NIA). Reporters sans Frontières est par ailleurs sans nouvelles d’Ebrima Manneh, journaliste au Daily Observer (pro-gouvernemental), et de Sulaymane Makato, éphémère rédacteur en chef du Daily Express et ancien rédacteur assistant du bi-hebdomadaire The Indepedent (privé) empêché de paraître depuis le 28 mars 2006.

« Le régime policier de Yahya Jammeh multiplie sans retenue les intimidations, les interpellations et les détentions. A l’approche des élections prévues en septembre, l’étau se resserre autour des rares représentants de la presse indépendante. Nous condamnons ces méthodes, déjà maintes fois dénoncées, et appelons la communauté internationale à rappeler au gouvernement d’un pays qui abrite le siège de la Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qu’il devrait faire des efforts pour s’en montrer digne », a déclaré Reporters sans frontières.

Interpellés dans la nuit du 14 au 15 juillet, Sam Obi et Adbou Gafari, deux ressortissants nigérians, ont été détenus dans les locaux de la NIA, puis relâchés sous caution le 18 juillet dans la soirée. M. Obi affirme qu’il n’a pas été torturé et qu’aucune poursuite judiciaire n’a été lancée contre eux. Ils étaient néanmoins convoqués à la NIA, le 19 juillet, munis d’un document officiel attestant du dépôt légal de leur journal.

Sam Obi, également correspondant pour le service anglophone de Radio France Internationale (RFI) en Gambie, avait fait paraître le 1er juillet 2006, le jour de l’ouverture du sommet de l’Union Africaine (UA), à Banjul, le premier numéro du Daily Express.

Selon Madi Ceesay, président du Syndicat des journalistes gambiens (Gambian Press Union), le journal aurait déplu aux autorités gambiennes pour avoir publié le communiqué d’une coalition d’organisations de la société civile protestant contre l’interdiction d’un forum sur la liberté d’expression, prévu les 25 et 26 juin, avant le sommet de l’UA. Les sources officielles, de leur côté, prétextent la publication d’un article au sujet de la venue à Banjul du président du Ghana John Kufuor, et qui attiserait la discorde au sein de la communauté ghanéenne de Gambie.

Le 5 juillet, le Daily Observer avait publié une lettre accusant le Daily Express de “ternir l’image de ce pays” (“tarnish the image of this country”), ce qui avait provoqué la démission du rédacteur en chef du journal incriminé, Sulaymane Makato. Ce dernier affirme avoir reçu le 13 juillet trois SMS anonymes l’avertissant des intentions de la NIA à son égard, et dont en voici deux : “Bonjour M. le rédacteur en chef, vos amis du Daily Express sont à la NIA, faites attention aux appels ou aux invitations étranges même de vos collègues car ils sont après vous pour vous arrêter” (à 18h24) et “Dernier avertissement, fuyez avant qu’il soit trop tard” (à 18h40). M. Makalo est en fuite depuis le 14 juillet. La NIA affirme ne pas le détenir.

On est également sans nouvelles du journaliste Ebrima Manneh depuis le 7 juillet. Selon sa famille, il est en fuite afin d’échapper à une interpellation par la NIA. Plusieurs organismes ont accusé la NIA de le détenir, ce que nie la ministre de l’Information, Neneh Mcdoll-Gaye. Le frère du journaliste, Lamin, a déclaré “Je suis allé à la NIA, à la police et à son journal, personne ne sait où il est”.

Malick Mboob, journaliste au Daily Observer, est en détention depuis le 26 mai. Lamin Fatty de The Independent, libéré sous caution le 12 juin, risque six mois de prison ferme pour “diffusion de fausses nouvelles”. Après plusieurs reports, la date de son procès a été fixée au 27 juillet.

Par Reporters sans frontières

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