Algérie : Un métro nommé danger


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Le second pays africain à se doter du métro, après l’Egypte, sera l’Algérie. Pourtant, à quelques jours de sa mise en circulation, prévue le 31 octobre, les ingénieurs allemands de Siemens s’opposent à sa mise en exploitation commerciale. Ils estiment que les normes de sécurité risquent de ne pas être assurées dans les temps.

Après presque 30 ans de travaux, le métro d’Alger est enfin sur rails ! L’inauguration de la ligne 1 se fera en présence du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, le 31 octobre 2011. Ce projet, dont les travaux ont débuté en 1982, doit répondre à l’explosion démographique en Algérie afin de combler le manque de transport collectif. Mais sa mise en circulation est encore trop précoce selon les ingénieurs allemands de Siemens chargés, avec d’autres entreprises étrangères de la mise en place de la sécurité. Ils affirment que la mise en route du métro représenterait un risque élevé au vu de l’inachèvement des normes nécessaires de sécurité, rapporte le quotidien algérien El Watan. Ils demandent à ce qu’un délai supplémentaire soit accordé pour sécuriser l’ensemble de la nouvelle ligne de métro.

Sa mise en marche, jugée « précipitée », inquiète un membre de la direction du métro d’Alger qui révèle au quotidien El Watan que « les ajustements électriques et de signalisation ainsi que d’autres procédures de sécurité ne sont pas tout à fait opérationnels ». « Même si les essais sont concluants pour l’instant, les assureurs étrangers ne peuvent pas accepter la mise en marche grand public par souci de sécurité. En cas de problème, les pertes seront importantes », affirme ce responsable. Même si les essais ont été jugés concluants lors de sa « marche à blanc » lancé le 8 septembre, cette question non négligeable n’est pas encore résolue. Le ministre des Transports, Amar Tou, aurait mis en garde les responsables du métro d’Alger pour éviter le moindre « hic » le jour J. « Je ne veux rien comprendre, le métro marchera le 31 octobre. Vous n’avez pas le droit à l’erreur. Le président sera présent », avertit Amar Tou.

Et qu’en est-il du volet protection et sécurité pour lesquels des professionnels ont mis en garde ?

Peu importe le non respect des normes de sécurité, le ministre souhaite que tout soit prêt à temps, « quitte à mettre en danger la vie des usagers ». Déjà, il essuyait bon nombre de critiques en mai à propos de sa mise en exploitation sans le respect des normes de sécurité. En fait, si le ministre des Transports émet de telles pressions à l’égard des responsables du métro, c’est avant tout pour éviter le moindre incident lors de l’inauguration. En mai, une panne électrique a gâché celle du tramway.

« Les tests du système de commande central et de suivi des trains sont toujours à l’examen, le personnel en charge de l’exploitation technique demeure en formation et la Protection civile n’a pas encore délivré son certificat de conformité», atteste la source d’El Watan. Quoiqu’il en soit, les officiels algériens sont déterminés à faire rouler coûte que coûte ce métro dès début novembre. Voici plus d’une semaine que les travaux de réhabilitation des bouches de métro s’accélèrent. Les algérois assistent à la mise en place des plaques où figurent le nom des futures stations.

Un projet vieux de trente ans…

Imaginé dans les années 1970, la réalisation du métro d’Alger a été un parcours semé d’embuches. La « décennie noire », la chute du baril du pétrole en 1985, l’inexpérience en la matière des entreprises nationales et la crise financière et politique ont été des freins considérables à la concrétisation du projet. Depuis le début des travaux, en 1982, seuls quatre stations ont été réalisées pendant les 15 premières années. De plus, les sous-sols algérois se sont révélés difficile à creuser. Mais en 2003, le retour des équilibres économiques a été un moment propice pour injecter des moyens financiers adéquats à l’accomplissement d’un tel projet. Les travaux de la ligne 1 deviennent alors plus structurés et davantage opérationnels. Et en 2007, l’exploitant français de la première ligne du métro d’Alger, RATP El Djazaïr, a obtenu le marché pour un montant de 130 millions d’euros. Après 30 ans de travaux, c’est une ligne de 10 stations et longue de 9 km, qui fera la navette entre Tafourah – Grande poste et Haïf el Badr. Elle fera par ailleurs l’objet d’une extension, deux autres lignes, la 2 et la 3, sont prévues. Selon le directeur général adjoint de l’entreprise du métro d’Alger, M. Zendaoui, le ticket de métro coûtera entre 25 et 30 dinars (0,25€ et 0,30€), indique le site Internet du Métro d’Alger

Tout est prêt, ou presque, pour accueillir M. Bouteflika à la station de la Grande Poste le 31 octobre pour l’inauguration. Mais, tant que les normes de sécurité ne seront pas à jour, il y a de quoi s’inquiéter pour les voyageurs. En tout cas, celle du président algérien sera bel et bien assurée ce jour-là lorsqu’il prendra son bain de foule…

Mise en marche à blanc du Métro d’Alger