Aide libyenne à Gaza : l’épopée confuse de l’Amalthéa


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L’Amalthéa, le navire d’aide libyen affrété par la Fondation Kadhafi, a commencé, jeudi, à décharger sa cargaison dans le port égyptien d’Al-Arich. Il devait initialement se rendre à Gaza afin de forcer le blocus israélien, mais a mis au dernier moment le cap sur l’Egypte. Retour sur l’épopée houleuse de l’Amalthéa.

Amalthéa fait machine arrière. Le navire d’aide libyen affrété par la Fondation Kadhafi a commencé, jeudi, à décharger sa cargaison dans le port d’Al-Arich, en Egypte. Après un périple de cinq jours, le cargo a finalement renoncé à briser le blocus israélien sur la bande de Gaza, et accosté au port du voisin égyptien mercredi soir. Les intenses efforts diplomatiques déployés par Israël semblent avoir été payants. Autorités israéliennes et militants libyens se sont livrés, durant tout ce périple, une vraie guerre psychologique (à coups de déclarations contradictoires, d’accusations et de démentis mutuels) qui a entretenu jusqu’au bout le doute sur la destination finale du cargo. Le film des événements.

Samedi 10 juillet. Le navire sous pavillon moldave Amalthéa appareille du port de Lavrio, à 60 km à l’est d’Athènes. A son bord, 21 personnes : 12 membres d’équipage, huit militants pro-palestiniens et un journaliste. Le cargo est chargé de deux tonnes d’aide humanitaire sous forme de nourriture et de médicaments, selon la Fondation Kadhafi, qui a affrété le navire et dont le président n’est autre que Seif Al-Islam Kadhafi, fils du Guide libyen Mouammar Kadhafi. Objectif affiché : faire route vers Gaza. Israël, dont l’image est écornée par l’attaque meurtrière de la flottille « Free Gaza » le 31 mai dernier, déploie d’intenses efforts diplomatiques pour dissuader le cargo de se rendre à Gaza sans recourir à la force. Les autorités grecques et moldaves disent avoir reçu des garanties libyennes selon lesquelles le cargo se rendra au port d’Al-Arich, en Egypte. «Les documents de bord (…) indiquent comme destination le port égyptien d’Al-Arich », rassure en fin d’après-midi l’agent maritime de l’Amalthéa. Ce n’est, semble-t-il, pas l’avis des militants à bord du cargo. Plus tard dans la soirée, le directeur exécutif de la Fondation Kadhafi, Youssef Sawan, soutient depuis Athènes que « le navire se dirige vers Gaza comme prévu»…

Ultimatum

Dimanche 11 juillet. « Nous nous dirigeons vers Gaza. Nous n’allons pas changer de direction », martèle Machallah Zwei, un représentant de la Fondation Kadhafi à bord de l’Amalthéa, joint par l’AFP. Un porte-parole de l’armée israélienne affirmait un peu plus tôt que « la marine de guerre était sur le qui-vive ». A la mi-journée, le navire se trouve non loin de l’île grecque de Crète, à une distance de deux jours de la bande de Gaza. Les autorités d’Israël veulent profiter de ce temps pour négocier, éviter un autre fiasco. « Nous conseillons aux organisateurs de cette expédition de se laisser escorter par les bateaux de la marine de guerre au port (israélien) d’Ashdod ou de se rendre directement au port (égyptien) d’Al-Arich », indique le ministre israélien Yossi Peled, du parti Likoud.

Mardi 13 juillet. La Fondation Kadhafi maintient la pression. Youssef Sawan reste inflexible dans ses propos. « Le navire se dirige toujours vers Gaza et ne changera pas de direction », déclare, dans la soirée, le directeur de l’exécutif de l’organisation à l’AFP, affirmant avoir reçu de nouvelles mises en garde de l’armée israélienne. Au même moment, un officiel israélien indique que le capitaine de l’Amalthéa avait consenti à changer de cap et faire route vers Al-Arich. Un responsable égyptien confirme, soutenant avoir reçu une demande d’autorisation du navire pour y accoster. De son côté, la Fondation Kadhafi continue de nier et pointe du doigt les autorités israéliennes qui auraient lancé un ultimatum pour que le navire change de direction avant mardi minuit. «Sinon, elles menacent d’intercepter le bateau avec leur marine de guerre », s’inquiète Machallah Zwei, joint à bord du navire par téléphone satellite. Relayé par la chaîne qatarie Al Djazira, la déclaration du représentant de la Fondation Kadhafi fait grand bruit. Un porte-parole de l’armée israélienne s’empresse de rejeter l’existence d’un tel ultimatum. Le spectre de l’abordage meurtrier contre la flottille « Free Gaza » plane…

Mercredi 14 juillet. Escorté par huit Zodiacs israéliens, l’Amalthéa renonce à Gaza et met le cap sur Al-Arich. Le cargo libyen accoste au port égyptien dans la soirée. La Fondation Kadhafi crie pourtant victoire. « L’objectif de l’Amalthéa est atteint sans que le sang coule », déclare Youssouf Sawan. « Partant de son souci de préserver la sécurité de toutes les personnes à bord du bateau, la Fondation a décidé de mettre le cap sur Al-Arich pour y décharger sa cargaison », justifie-t-il.

Le Croissant-Rouge égyptien a commencé, jeudi, à décharger les 2 000 tonnes de nourriture et de médicaments. L’aide devrait ensuite être transférée à Gaza par le terminal de Rafah (ou celui d’Al-Oja), après avoir été examinée par les forces de sécurité égyptiennes. Déçus, les militants pro-palestiniens qui ont effectué la traversée à bord de l’Amalthéa (six Libyens, un Algérien, un Marocain et un Nigérian) ont annoncé leur refus d’accompagner l’acheminement de l’aide à Gaza par voie terrestre. Leur but était de parvenir au territoire palestinien par la mer.

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