
Le football africain est en deuil. Le 16 mai 2025, le Cameroun a perdu l’un de ses plus illustres ambassadeurs du ballon rond : Emmanuel Jérôme Kundé s’est éteint à l’âge de 68 ans. Né le 15 juillet 1956 à Ndom, ce défenseur élégant au physique imposant (1,86 m) incarnait l’âme de la génération dorée qui a fait rayonner le football camerounais sur la scène internationale.
Le roc de Ndom, pilier du Canon
Le parcours d’Emmanuel Kundé débute dans les clubs formateurs du Mbankomo Club puis à Tempête de Nanga-Eboko, avant de connaître la consécration avec le mythique Canon Yaoundé qu’il rejoint en 1977. Sous les couleurs du club de la capitale, il empile les titres nationaux et hisse son équipe jusqu’en finale de la Coupe des Vainqueurs de Coupe africaine en 1984. Sur le terrain, son intelligence tactique, son sens inné du placement, sa relance précise et sa puissance physique font de lui un « libéro » d’exception, moderne avant l’heure.
Le capitaine éternel des Lions Indomptables
Avec le maillot vert-rouge-jaune sur les épaules, celui que l’on surnommait affectueusement « La Tour de contrôle » accumule plus de 120 sélections (127 selon les registres officiels de la FECAFOOT) et inscrit 17 buts cruciaux – principalement sur penalty, sa spécialité. Son leadership tranquille guide les Lions Indomptables vers deux sacres continentaux lors des Coupes d’Afrique des Nations de 1984 à Abidjan et de 1988 où son tir au but victorieux contre le Nigeria entre dans la légende.
Mais c’est sans doute son penalty parfaitement exécuté face au gardien anglais Peter Shilton lors de la défaite en quart de finale de la Coupe du monde 1990 qui restera gravé dans les mémoires. Ce jour-là, il propulse le Cameroun dans une dimension inédite en faisant trembler les anglais. Le Cameroun fut la première nation africaine à atteindre ce stade de la compétition mondiale.
Un bref passage en Europe avant le retour aux sources
Entre 1987 et 1989, Kundé découvre le championnat français, d’abord sous les couleurs du Stade Lavallois puis du Stade de Reims, disputant 32 matchs et marquant 3 buts en Division 1. Mais fidèle à ses racines, c’est au Cameroun qu’il choisit de terminer sa carrière de joueur, successivement à Prévoyance Yaoundé puis Olympic Mvolyé, où son leadership permet encore de soulever une Coupe du Cameroun en 1992. Ce choix illustre parfaitement son attachement viscéral à sa terre natale, privilégiant l’amour du pays aux sirènes des grands championnats européens.
Après avoir raccroché les crampons, Emmanuel Kundé se reconvertit naturellement dans le coaching. Diplômé d’entraîneur, il transmet son savoir et ses valeurs aux bancs du Canon Yaoundé, de l’US Bitam au Gabon et du PWD Bamenda. Au sein des différents staffs de la sélection nationale, sa voix posée et ses conseils avisés font autorité. Sa philosophie de jeu, empreinte de simplicité, de rigueur et d’esprit collectif, reflète parfaitement l’homme qu’il était sur et en dehors du terrain.
« Un homme discret et affectueux » unanimement salué
Les hommages affluent du monde entier, mais celui du président de la FECAFOOT, Samuel Eto’o, résume parfaitement l’essence de l’homme : « Il était le mur contre lequel les adversaires se brisaient, mais aussi un homme discret et affectueux. Sa disparition est une perte immense pour notre football. »
Au-delà des trophées et des statistiques, Emmanuel Kundé laisse l’image d’un leader exemplaire, capable de transformer les moments de pression intense en instants de sérénité collective. Son professionnalisme et son humilité rappellent qu’il est possible d’atteindre les sommets sans jamais perdre ses valeurs.