Les africains ne sont pas protégés par des dispositions légales en matière de lutte contre le tabagisme


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Zone non fumeur
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Alors que l’Afrique connait une augmentation du tabagisme supérieure à celle des autres régions en développement, environ 90 pourcent des africains n’ont toujours pas une véritable protection contre le tabagisme passif. C’est le constat d’un nouveau rapport publié aujourd’hui au cours d’une conférence régionale sur le cancer.

Cependant, ce rapport, Global Voices: Rebutting the Tobacco Industry, Winning Smokefree Air, (voix mondiale : réfuter la propagande de l’industrie du tabac, lutter pour un air sans fumée) indique que l’espoir est possible. Plusieurs pays africains luttent contre les efforts agressifs de l’industrie du tabac pour mettre fin aux interventions de santé publique visant à mettre en place des dispositions légales en matière de lutte contre le tabagisme, qui offriront une protection à plus de 100 millions de personnes supplémentaires par rapport au niveau de 2007. Le rapport a été publié par le Partenariat mondial pour un monde sans fumée, Global Smokefree Partnership, qui comporte de nombreux partenaires.

« Pour la première fois dans l’histoire, nous avons des instruments qui permettent de prévenir une pandémie, » explique le Dr. Otis W. Brawley, médecin en chef de la Société américaine du cancer. « Des données récentes montrent que, si les tendances actuelles se maintiennent, plus de la moitié de la région Afrique doublera sa consommation de tabac au cours des douze prochaines années. Assurer des endroits publics sans fumée constitue un exemple d’une intervention à faible coût et extrêmement efficace, qui doit être mise en œuvre aujourd’hui pour protéger la santé. »

Au cours de l’année passée, le Kenya et le Niger ont mis en œuvre des politiques nationales de lutte contre le tabagisme. De son côté, l’Afrique du Sud, où des dispositions légales en matière de lutte contre le tabagisme existent depuis mars 2007, continue à jouer un rôle important dans la région, en démontrant que des lois en matière de lutte contre le tabagisme peuvent être mises en application en Afrique. Au cours d’une première pour la région, Maurice a récemment passé une loi qui n’est pas loin de satisfaire aux normes Convention-cadre pour la lutte anti-tabac, et constitue une des mesures de lutte contre le tabagisme les plus vigoureuses au monde.

Néanmoins, souligne le rapport, des obstacles à leur mise en œuvre subsistent dans de nombreux pays, dont la République démocratique du Congo, le Ghana et l’Ouganda, notamment au niveau de l’identification de ressources pour la mise en application, et l’opposition de l’industrie du tabac aux lois en matière de lutte contre le tabagisme. À Abuja, au Nigeria, 55 pourcent des élèves dans les écoles ne savaient pas que le tabagisme passif était dangereux pour la santé, et à peine 1 pourcent de la population de Nigeria est protégée par des dispositions légales vigoureuses en matière de lutte contre le tabagisme.

Le rapport met en lumière les tactiques de l’industrie du tabac pour freiner la mise en place d’un dispositif légal de lutte contre le tabagisme, et pour convaincre les gouvernements africains de l’importance économique du tabac et du fait qu’augmenter les taxes sur les cigarettes et mettre en place des lois sur l’interdiction de fumer débouchera sur des pertes de recette et d’emploi. Au Kenya, par exemple, l’industrie du tabac a engagé une action en justice contre le passage au Parlement d’une loi stricte en matière de lutte contre le tabagisme. Et en Zambie, la compagnie British American Tobacco a contribué à vider de leur contenu des propositions de loi anti-tabagisme.

Cependant, de nombreux constats au cours des dernières années montrent qu’en réalité ces pertes fiscales ne se matérialisent pas. Selon le rapport, la loi en matière de lutte contre le tabagisme de Maurice n’aura aucun impact sur les recettes touristiques, qui comptent pour près d’un quart du PIB. En Afrique du Sud, les recettes de la TVA montrent que les lois de lutte contre le tabagisme n’ont pas eu d’impact significatif sur les recettes des restaurants, et pourraient même avoir un effet positif. L’augmentation des taxes sud-africaines a été suivie d’une augmentation des recettes. Et dans les pays où les recettes fiscales sont maigres, l’augmentation des taxes peut avoir des effets bénéfiques pour les services sociaux, l’éducation et les soins de santé.

En plus d’un dispositif légal de lutte contre le tabagisme, des interventions économiques, comme une taxation élevée des cigarettes, peuvent fortement contribuer à diminuer de façon efficace et efficiente la consommation en Afrique. Doubler le prix des cigarettes en augmentant les taxes peut faire abaisser la consommation de 60 pourcent. Ceci est vrai dans beaucoup de pays africains. En Afrique du Sud, par exemple, la consommation de tabac a chuté d’un tiers depuis 1993, avec la mise en application de fortes augmentations des taxes sur les cigarettes.

On estime qu’en 2010, le tabagisme coutera la vie à 6 millions de personnes dans le monde, dont 72 pourcent habitent dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Si les tendances actuelles se poursuivent, il tuera 7 millions de personnes par an en 2020 et plus de 8 millions par an en 2030.

Environ 1 milliard de personnes vivant dans 45 pays dans le monde bénéficient aujourd’hui d’une protection légale contre les dangers pour la santé du tabagisme passif sur le lieu du travail ou dans les endroits publics. Malgré les progrès rapides, plus de 85 pourcent de la population mondiale, dont celles de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, reste toujours sans une véritable protection contre le tabagisme passif.

Le rapport du Partenariat mondial pour un monde sans fumée a été lancé au cours d’un Sommet médiatique organisé par la Société américaine du cancer, qui précédait la conférence Le Cancer en Afrique de l’OAREC qui commence le 12 novembre à Dar es Salaam en Tanzanie.

La société américaine du cancer allie une passion sans faille avec près d’un siècle d’expérience pour sauver des vies et mettre fin aux souffrances causées par le cancer. En tant qu’organisation de base mondiale avec plus de 3 millions de volontaires et des programmes dans plus de 20 pays, nous luttons dans toutes les communautés du monde pour chaque anniversaire menacé par un cancer. Nous sauvons des vies en aidant les gens à prévenir le cancer ou à le détecter à temps ; en les aidant à retrouver leur santé, en étant présents et en offrant des diagnostics d’après cancer ; en trouvant des remèdes au moyen d’investissements dans des découvertes qui peuvent s’avérer des percées en matière de lutte anti-cancer ; en résistant et en obtenant le soutien de parlementaires à des lois qui contribuent à faire gagner la bataille du cancer ; et en obtenant le soutien des peuples du monde à cette lutte. En tant que leader mondial dans les investissements en matière de recherche contre le cancer, nous transformons en action nos connaissances sur le cancer.

Le Partenariat mondial pour un monde sans fumée est une initiative aux multiples partenaires, fondée pour encourager dans le monde entier des politiques efficaces en faveur d’un monde sans fumée. Ce partenariat est organisé sous les auspices de la Société américaine du cancer, et de l’Alliance pour la Convention-cadre pour la lutte anti-tabac. Les membres de son groupe de pilotage sont les suivants : Action on Smoking and Health – DC, Action on Smoking and Health, Londres, Americans for Nonsmokers’ Rights, Campaign for Tobacco-Free Kids, Cancer Research UK, HealthBridge Inde, International Union Against Cancer, International Union Against Tuberculosis and Lung Disease, Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, Promoting Action for Smoke-free Environments (APALTA), Roswell Park Cancer Institute, Smokefree Partnership Europe, Southeast Asia Tobacco Control Alliance, World Heart Federation, et World Lung Foundation. Parmi d’autres partenaires, se trouve aussi Johnson & Johnson and Pfizer.

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