23e session des Journées théâtrales de Sharjah


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La 23e session des journées théâtrales de Sharjah (E.A.U), touche à son épilogue. Ce moment fort du théâtre emirati a prouvé tout au long de ses vingt-trois ans qu’il valait plus par l’orgueil et la fierté de répondre à une passion de son prince que par le besoin et la vocation de ses auteurs et de ses fans.

(De notre correspondante Faouzia Mezzi)

Mais il semble que les hommes de théâtre commencent à apprécier ce jeu et y puisent une satisfaction intellectuelle et culturelle dont l’avant-goût a parcouru les sessions à travers le volet réflexif des journées, c’est-à-dire le colloque, les séances de débat accompagnant les représentations et les rencontres avec les artistes invités des pays arabes. Dans le pays des superlatifs architecturaux et urbanistiques, le choix des grandeurs semble gagner la chose culturelle et le théâtre en particulier. De magnifiques salles de théâtre sont à envier par les artistes d’autres pays arabes comme les Tunisiens, les Marocains, les Algériens ou encore les Libanais ou les Syriens qui ont franchi des pas fermes dans l’expérience théâtrale. De même que pour les locaux de l’Institut de théâtre qui restent, hélas, non exploités.

Le festival qui demeure national de par l’identité des spectacles n’en acquiert pas moins une dimension internationale, dans la mesure ou il est visité par de nombreux hommes de théâtre arabes vivant dans leurs pays respectifs, mais aussi par d’autres qui vivent dans des pays européens tels que le poète et grand critique de théâtre syrien Adel Karachouli qui vit depuis une vingtaine d’années en Allemagne et qui a « converti » son épouse à la traduction des textes théâtraux à la langue germanique.

Ce melting-pot artistique n’a pas manqué son effet sur le mouvement du 4e art aux Emirats qui, au moyen d’une action communicative très développée et moderne, confinent à une sorte d’ébullition de questions théâtrales sur le rôle du théâtre, dans le monde arabe, aujourd’hui, sur la multitude de ses expressions consécutivement à la spécificité de chaque pays, sur l’expérience émiratie et sur le nouveau théâtre que générerait le Printemps arabe.

Mais la question qui parait tarauder les participants à cette session est celle des éventuelles menaces encourues par le théâtre arabe, dans une conjoncture mouvante, du fait de la montée de la violence politique et extrémiste.

D’aucuns pensent que le risque serait minime, étant donné qu’il s’agit d’une phase transitoire dans les pays du Printemps arabe et qu’aussitôt la transition accomplie, se réguleront les choses, d’autres, pessimistes, en sont arrivés à livrer la question, lancinante, de savoir si la place publique manifesterait contre la fermeture, éventuelle, des espaces de théâtre et de la culture en général ? Question qui s’est affinée lors des débats consacrés à la femme dans le théâtre arabe, en tant que créatrice (comédienne, auteure ou metteur-en-scène) et en tant que sujet.

La femme arabe a fait son entrée dans l’expérience théâtrale tardivement, en raison des tabous et des interdits sociaux. C’est un fait. Comment se fait-il qu’elle se soit attardée dans le seul jeu et qu’elle n’ait pas développé des projets signés au féminin ? Il y a eu certes des exceptions, mais il ne faudrait sans doute pas perdre de vue que ce qui intéressait les femmes dans cette expérience, et si l’on peut dire, leur priorité, c’est de travailler intensément sur le « perçu » de leur corps, par le regard social, jadis réducteur avec le déni qu’il englobe. Entre-temps, et comme partout dans les autres secteurs de la vie active, la paternité de tout projet, de toute initiative reste le combat latent des élites féminines. Pour autant que le théâtre est un acte humaniste, social et culturel, et qu’il implique le genre, l’urgence est loin d’en être une, uniquement pour les femmes.

Les spectacles donnés au cours de cette session ont fait courir tout Sharjah et il fallait regagner les salles avant l’heur pour trouver une place, notamment lorsqu’il s’agissait des pièces en compétition.
Les propositions esthétiques ont fait couler beaucoup d’encre et les débats relèvent des difficultés d’accès au dialectal émirati, qui plus est, la plupart des pièces se conçoivent plus autour du dialogue, au dépens d’une écriture scénique porteuse d’un message visuel suggestif.

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