Politiques français à Brazzaville : pour l’argent de Sassou Nguesso?


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Le patron de l’UMP, Jean-François Copé, s’est attiré les foudres de la gauche, après sa participation rémunérée au Forum économique à Brazzaville, à l’initiative du magazine Forbes Afrique. Il aurait reçu 30 000 euros. Pourtant, il est loin d’être le seul à s’être rendu dans la capitale congolaise. Quelques dizaines de jours avant, des personnalités comme Rachida Dati et Michel Rocard se sont aussi assis à la table de Denis Sassou Nguesso, en toute discrétion bien sûr.

Jean-François Copé épinglé. 30 000 euros. C’est le montant qu’aurait reçu le Secrétaire général de l’UMP en échange de sa participation au Forum économique Forbes Afrique à Brazzaville, dénonce le Parti socialiste. Le Secrétaire général du PS, Harlem Désir, ne s’est pas privé pour accuser son homologue à l’UMP de faire de la politique « business » et un mélange des genres. « Un chef de parti de notre pays n’a pas à être payé pour des prestations au service d’intérêts privés à l’étranger. Cette politique-business du président de l’UMP en Afrique est profondément choquante, elle est contraire à tous les principes d’éthique et de transparence», a dénoncé Harlem Désir dans un communiqué, rétorquant que « ce mélange des genres doit cesser.» Pour lui, « des responsables politiques en fonction » ne doivent pas s’adonner à ce genre de pratiques. Selon lui, « il est contraire à l’éthique de monnayer son image, et peut-être son influence, de dirigeant politique français, en échange de sommes d’argent sur lesquelles n’existe aucune forme de transparence ».

Michel Rocard à Brazaville

Le chef de file des députés PS, Bruno Le Roux, en a remis une couche. « Quand on est député, quand on est président d’un parti politique, que l’on aille à l’étranger faire des conférences, faire l’aller-retour pour partir avec un chèque de je ne sais exactement combien, c’est un mélange des genres », a-t-il déclaré sur RTL. « La conférence de Brazzaville, quand on l’apprenait dans les livres d’histoire, c’était la conférence de 1944, c’était la fin du code de l’indigénat, c’était le Général De Gaulle », a rappelé Bruno Le Roux. Selon l’élu de Seine Saint-Denis, « le Général de Gaulle, quand il allait à Brazzaville, il avait des idées, M. Copé il a un tarif. Le Général De Gaulle, quand il allait à Brazzaville, il avait une vision, M. Copé il a un chèque en repartant.» L’entourage de Jean-François Copé a confirmé que le Secrétaire général de l’UMP était bien à Brazzaville mais, assurant qu’il n’a reçu que des frais de défraiement, sans pour autant donner le montant exact de cette somme.

Le cas de Jean-François Copé est loin d’être isolé. Des dirigeants politiques participent régulièrement à des conférences rémunérée. A l’instar des anciens chefs d’État ou de gouvernement, tels que Bill Clinton, Tony Blair, Nicolas Sarkozy ou encore le socialiste Michel Rocard. Ce dernier d’ailleurs était en visite à Brazzaville le 25 juillet dernier, pour officiellement visiter le fameux musée d’objets d’arts Galerie, en compagnie de Jean-Paul Pigasse.

Accueil royal de Rachida Dati par Sassou Nguesso

En toute discrétion, l’ex-Garde des sceaux, Rachida Dati, s’est, elle aussi, rendue à Brazzaville le 17 juillet dernier, à l’occasion du Festival de musique FESPAM. Elle a été reçue par le Président Denis Sassou Nguesso, avec qui elle a également dîné. Que recherchait-elle auprès de ce dernier? Elle qui avait pourtant déclaré sur TF1 « que certains pays africains étaient gérés par des potentats, des dictateurs qui sentent le souffre. Peu fréquentables ». Officiellement, l’ex-ministre de la Justice y est allée « pour évoquer les questions liées à l’éducation, au développement durable et aux droits des femmes, avec le Président Sassou N’Guesso », indique un communiqué sur son blog. A la sortie de son tête-à-tête avec le chef d’Etat congolais, elle a déclaré : « Avec le président de la République, nous avons discuté du système éducatif du Congo. Le Président a lancé une initiative qui est assez unique en Afrique, celle des lycées d’excellence avec le lycée de M’Bounda à Dolisie, dans le département du Niari. Il s’agit, donc, de repérer les meilleurs élèves dans tout le pays et les mettre dans les lycées d’excellence pour les faire accéder dans l’excellence scolaire, puis universitaire. Je soutiens donc ce projet, nous avons aussi échangé sur l’expérience française. »

Peut-être bien. Mais ce défilé de politiques français à Brazzaville pousse bien des observateurs de la vie congolaise à s’interroger. Pour certains, c’est le portefeuille bien garni du chef d’Etat congolais, grâce aux retombées du pétrole, qui les attirent. D’autres supposent que la faillite de l’UMP aurait poussé l’ex-Garde des sceaux, mandatée par l’ex-Président français, Nicolas Sarkozy, à tenter sa chance auprès de Denis Sassou Nguesso, pour un éventuel chèque qui pourrait éponger la dette du parti. Quoi qu’il en soit, Rachida Dati n’a sûrement pas rencontré le dirigeant congolais pour évoquer des questions liées à l’éducation. De même, Michel Rocard ne s’est pas rendu au Congo uniquement pour visiter une galerie d’art. Et Jean-François Copé, lui , c’est clair, n’y est pas allé seulement pour participer au Forum économique Forbes Afrique…

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