La présence des descendants africains à Lima au début du 20ème siècle (II)


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Partie 2/2 – La présence africaine à Lima remonte à l’origine même de la Ville. Étant destinée à devenir le siège de la principale Vice-royauté coloniale d’Amérique du Sud, les espagnols s’y installèrent accompagnés de nombreux esclaves.

MALAMBO

Un des quartiers “noirs” de Lima les plus importants est Malambo. Selon un bref mais important article de Luis Tejada, Malambo est un quartier noir d’origine coloniale.

La première construction qu’il y ait eu dans la zone fut une prison d’esclaves, puis il y eut une enceinte de la première décharge publique de Lima. Plus tard, s’établira un hôpital pour lépreux avec une paroisse appelée San Lázaro (1563).

En 1716 sera créé au même endroit un foyer pour aveugles, manchots et infirmes. Peu après autour de ces constructions se forma un faubourg habité par des familles noires, mulâtres, indiennes yungas, des aveugles, des manchots, des lépreux et des infirmes. Pendant les premières décennies du 20ème siècle, ont comptait à Malambo 44 ruelles dans ce qui est représente aujourd’hui blocs 4 et 5 de l’actuel Jr. Francisco Pizarro, et où habitaient un total de 4560 personnes. Malambo se caractérisait par la combinaison d’un profond sentiment religieux exprimé par ses innombrables confréries de même que par les fêtes et l’environnement festif de ses célébrations. Fête et religion sont toujours allées ensemble dans les quartiers pauvres de Lima. La majeure partie des ruelles de Malambo avait chacune son propre Saint Patron et une fête annuelle les identifiait comme la Vierge de Fátima, Saint Domingo, La Cruz, San José, Sainte Rosa, Sainte Eufemia, Cœur de Jésus, la Vierge del Carmen, San Antonio, etc. Les habitants de Malambo, également connus comme les malambinos, étaient des maitres en danse, en musique et en cuisine. Comme ils vivaient dans des ruelles minuscules. Ils avaient l’habitude de prendre les rues, la petite place de San Lázaro ou d’autres places publiques pour les transformer en lieu de représentations festives ou l’humour, la satire et le rie étaient toujours présents.

La proximité de Malambo avec la Pampa de Amancaes, théâtre tous les 24 juin des fameuses fêtes de San Juan, et auxquelles assistaient le tout Lima, aida à consolider le prestige festif des malambinos. Et encore plus lorsqu’en1922 de en provenance de ce quartier arriva une bande de noirs dansant le “Son de los diablos”, pour faire irruption dans les carnavals du Président Leguia, en rompant le programme officiel et en se mettant à danser autour du roi carnavalón.

Dans les chinganas de Malambo, on mangeait des fritures, beaucoup d’entre elles préparées avec les tripes, de chanfainita (met à base de viande de bovin) et des confiseries telles que le frijol colao ou le turrón (touron, nougat) de Doña Pepa devenu célèbre plus tard.

Mais tout n’était pas divertissement à Malambo. Il y eut également une organisation ouvrière et une contestation sociale. Quatre ou cinq grandes boulangeries existèrent dans le quartier, qui approvisionnaient la ville, et dans lesquelles se rassemblaient les ouvriers et les artisans boulangers. Aux débuts de 20ème siècle, l’usine textile El Inca se fixa dans le secteur et recruta un nombre important d’habitants du quartier. L’organisation ouvrière, l’activisme syndical les grèves et les manifestations se développèrent dès lors très vite dans la zone. En décembre 1918, dans une rue de Malambo se forma le comité de grève Vitarte-El Inca qui comme nous le savons initia l’historique lutte pour les 8 heures, le plus important mouvement de revendication de la classe ouvrière péruvienne des débuts du 20ème siècle. À Malambo fonctionna également une bibliothèque ouvrière dirigée par des anarchosyndicalistes et une imprimerie du nom de “Proletaria”, qui imprima une bonne partie des journaux ouvriers de l’époque.

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