L’excision, un problème avant tout d’Africaine


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Excision
Excision (illustration)

Les femmes africaines supportent depuis des siècles l’excision. Elles l’acceptent dans leur majorité mais elles ont lutté et luttent contre une pratique qui leur nuit médicalement.

Lutter contre l’excision a toujours été un leitmotiv pour la femme africaine bien que la pression sociale ait toujours été très forte. La pratique de l’excision fait partie de la tradition et il est difficile d’y déroger.

Les initiatives dans les pays africains sont nombreuses et méritent d’être soulignées. Elles datent de la fin du 19è siècle et le Soudan, où la pratique de l’excision est très répandue, dénonce l’excision depuis 1947. Les femmes africaines au Kenya, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Mali luttent depuis toujours contre l’excision quand celle-ci ne leur convient pas. Les Somaliennes, à contrario, dans leur majorité sont pour l’excision.

Au Sénégal, l’assemblée nationale a voté une loi sur l’excision qui ne fait pourtant pas l’unanimité. Au Burkina Faso, le Comité de lutte contre la pratique de l’excision sensibilise contre le phénomène et une loi condamnant l’excision existe. Au Kenya, les politiques de sensibilisations menées par des organisations non – gouvernementales (ONG) et des associations chrétiennes bien que relativement efficaces concernent les jeunes filles des classes primaire et secondaire qui sont « les recrues à l’initiation ». L’ethnie Meru a trouvé une bonne solution en substituant « une excision par la parole » à l’opération.

L’interdiction de l’excision dans certains pays devient un argument de campagne électorale. La Banque Mondiale estime que la lutte contre cette pratique est un « critère positif de développement ». L’Association malienne pour le suivi et l’orientation des pratiques traditionnelles (AMSOPT) a été approchée par elle à ce propos. Retenons que ce problème est un problème africain et devra être réglé comme tel par des Africaines. C’est la position que pourrait avoir, notamment, l’ethnopsychiatrie développée par Tobie Nathan fonde les mécanismes psychologiques sur la culture. Elle se veut une façon d’indiquer que les hommes sont libres de leurs pratiques et qu’ils ne sont pas à juger même si la critique est possible.

Une bonne idée des hommes ?

Sur quelle loi morale se fonde l’excision ? Un père fera comprendre à son fils qu’il n’est pas question d’épouser une femme non-excisée. Les femmes les accusent donc d’entretenir la pratique. Le fils s’en convaincra tant qu’il n’est pas confronté à une autre réalité comme pour confirmer les effets positifs du brassage culturel. Les hommes n’y trouvent pas forcément leur compte puisqu’ils courtisent des femmes non-excisées.

« On l’assoit sous le couteau » ,traduit littéralement du bambara, désigne l’excisée. L’excision est une pratique courante dans la plupart des pays africains et dans d’autres régions du monde qui marque le passage de la jeune fille à la femme. Ce changement se matérialise par l’excision qui correspond à l’ablation possible du clitoris, des petites et des grandes lèvres.

On distingue trois formes d’excision au total. Il y a d’abord l’excision proprement dite qui consiste en l’ablation du clitoris, ou tout ou partie des petites lèvres. La circoncision pharaonique ou infibulation, qui consiste en l’ablation du clitoris des petites et des grandes lèvres. Les bords de la vulve sont collés et le vagin est obstrué ; une petite ouverture est laissée pour les urines et les menstrues.

Enfin l’introcision consiste en un élargissement de l’orifice vaginal en la déchirant à la main ou avec un silex, ou en fendant le périnée. Le clitoris sera alors replié dans le vagin et recousu. L’excision se pratique sur des petites filles ou plus tard à la période de la puberté , avant le mariage.

À la suite de quoi, on leur demande de danser pour exprimer leur joie alors que leur orifice vaginal n’est que douleur. Aujourd’hui l’excision se pratique sur des nourrissons, ce qui relativise fortement sa symbolique.

L’origine de la pratique est mythique . Pour les Bena Lulua (ethnie du Congo), l’excision se justifie par le mythe des vagins dentés. Le clitoris serait la dernière dent à supprimer. Dans la même optique, les Bambaras le considèrent comme un dard qui peut blesser, voire tuer l’homme. Par ailleurs, ils l’imputent à l’ Islam. Les paroles du prophète à ce propos à Um Atiya, une exciseuse, sont ambigües: « n’opère pas de façon radicale … c’est préférable pour la femme ».

Certaines communautés, par exemple, estiment que l’excision permet aux jeunes filles de rester vierges. Les femmes souvent éloignées de leurs maris, à l’instar des Soninké du Mali, contrôleraient mieux leur désir sexuel. Les Masaï et les Kisii du Kenya estiment qu’une femme non excisée sera hantée par les esprits des ancêtres.

Des risques médicaux certains

Ces pratiques comportent des risques médicaux et la mort en fait malheureusement partie. Les conditions dans lesquelles se pratique en général l’excision, les problèmes que rencontrent la femme excisée pendant son accouchement sont autant de bonnes raisons de proscrire l’excision. Entre les cendres et le sable supposés adoucir l’opération, des questions d’hygiène se posent.

L’excision entraîne des douleurs atroces puisque la zone du vagin est particulièrement sensible et qu’il n’y a pas d’anesthésie locale qui soit faite par les matrones durant « l’opération ». Les septicémies, les infections, le tétanos, les hémorragies et la contamination par le virus du sida, la difficulté à uriner sont autant de conséquences immédiates.

L’accouchement est un autre calvaire pour les femmes infibulées. De fait, la parturiente doit subir une épisiotomie pour permettre à son bébé de ne pas s’étouffer dans un orifice vaginal devenu trop étroit (infibulation). Quant à la question du plaisir sexuel, le clitoris n’est pas la seule zone érogène de la femme et beaucoup d’excisées ont une vie sexuelle normale. Le préjudice physique et – ou psychologique est cependant irréfutable.

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