Casablanca : femmes et transports urbains, incompatibles ?


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Les passagers d'un bus
Les passagers d'un bus

Circuler dans la ville blanche est un stress quotidien. Artères bouchées à longueur de journée, utilisation incessante du klaxon, pollution… Mais être une femme et se déplacer dans la ville blanche est non seulement un stress quotidien mais surtout un casse-tête !

Une étude menée par la Banque mondiale et dont les résultats ont été révélés le 12 octobre mettent en exergue les difficultés que rencontrent les femmes à se déplacer dans la capitale économique marocaine. D’après un échantillon de 600 femmes interrogées, « il serait plus difficile de se déplacer pour une femme que pour un homme », rapporte le quotidien marocain Le Matin. Le moyen de transport qui pose le plus de problèmes est l’autobus. Emprunter un bus à Casablanca est un parcours semé d’obstacles pour les femmes. Marcher dans les rues de la ville pose parfois de sérieux problèmes pour elles et les transports publics ne répondent pas à leurs attentes. Ironie du sort, la situation n’a jamais changé et tend même à s’accentuer…

M’dina Bus, la bête noire des femmes

Il suffit de monter dans un bus casablancais pour comprendre la détresse de toutes ces femmes. Bousculades à l’entrée, priorité aux hommes car « ce sont les plus forts » et surpopulation. Dur d’être cliente chez M’dina Bus, la société du transport urbain de Casablanca. Celles qui arrivent à monter à bord doivent faire face à un autre fléau : le pelotage. Certains malins profitent des gros afflux pour se coller et caresser de jeunes demoiselles, comme dans d’autres pays d’ailleurs. « Traverser la rue sans se faire harceler est impossible et lorsqu’on opte pour le bus ou le taxi blanc les hommes en profitent pour nous voler ou nous tripoter », explique Sanae, une habituée des transports en commun.

Autre problème, le danger qu’elles rencontrent au coucher du soleil. Les rues de la cité blanche ne sont pas sûres une fois la nuit tombée. Les arrêts se font rares dans la périphérie de la ville et attendre le bus dans un endroit isolé, peu sécurisé et mal éclairé n’est pas rassurant. « Je ne peux pas prendre le bus et attendre plusieurs minutes avant que celui-ci n’arrive, dans des stations mal éclairées et vides parfois. Je suis alors obligée de prendre un petit taxi, ce qui me revient plus cher », explique Leila. Mais l’utilisation des petits taxis le soir peut être risquée pour les femmes. Certaines vous le diront, beaucoup de taxis sont choisis selon le faciès du conducteur. La nuit, si une femme est seule elle aura tendance à éviter les taxis conduits par les « jeunes ». Casablanca est loin des dangers du Cape Town ou de Détroit mais le soir les risques d’agressions sont très élevés dans certains endroits de la ville.

Arrêter de sortir : ultime solution ?

Certaines femmes jettent l’éponge et finissent par démissionner de leur job afin d’éviter les transports en commun. C’est le cas d’Aïcha. « À l’époque où je travaillais, il me fallait une heure de trajet pour arriver sur mon lieu de travail. Je me faisais constamment harceler sexuellement et je me suis fait voler mon sac à deux reprises. J’ai donc décidé de rester à la maison, ça devenait trop dur psychologiquement et même financièrement », affirme la jeune femme. Comme Aïcha, elles sont nombreuses à renoncer définitivement, ou presque, à emprunter le bus. Se déplacer quotidiennement en petit taxi à un coût, loin d’être à la portée de tous. Pour ces femmes, les déplacements se font désormais à proximité du domicile pour, entre autre, aller faire ses courses, se rendre dans les centres de santé ou dans les écoles.

Ces problèmes ne sont pourtant pas présents dans toutes les grandes villes du Maroc. Nul doute que la venue prochaine du tram – prévu pour décembre 2012 – répondra à certains d’entre eux. Toutefois, la cité économique du royaume a encore tant à faire en matière de sécurité des transports en commun. Pour l’heure, les plus chanceuses, minoritaires, sont celles qui se déplacent en voiture. Dans ce cas, le problème est de toute autre nature. Et pour le comprendre, il suffit de revenir à la phrase d’introduction…

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