Les proches de Gbagbo dénoncent l’arbitraire de la justice ivoirienne


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Sous le coup d’un mandat d’arrêt international, Charles Blé Goudé, le leader des Jeunes Patriotes a affirmé dans une interview accordée à RFI et publiée ce mardi qu’il est disposé à comparaître devant un tribunal ivoirien si le président Alassane Ouattara l’est également. Les avocats de Laurent Gbagbo ont dénoncé dans la même journée le « flou juridique » autour de la détention de leur client, assigné à résidence à Khorogo, dans le nord du pays.

Une «traque» des pro-Gbagbo. C’est ainsi que Charles Blé Goudé qualifie la justice du président Alassane Ouattara. Dans un entretien accordé à RFI et publié ce mardi, le chef des Jeunes patriotes affirme que « Ouattara fait comme si son pouvoir avait comme seul objectif de traquer, de tuer, de poursuivre tous ceux qui ont été plus ou moins proches de Gbagbo ». Celui qui est parfois surnommé « le général de la rue » ou « Blé la Machette » dénonce « une justice à double vitesse », un « pouvoir dictatorial » et « tribaliste ».

Sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis le 1er juillet, l’ancien secrétaire général de la puissante et sulfureuse Fédération estudiantine de Côte d’Ivoire (Fesci) a déclaré qu’il était « prêt à comparaître » devant un tribunal ivoirien si le chef de l’Etat et le Premier ministre Guillaume Soro l’étaient également. « Vous savez très bien qu’il a commis des actes, que des hommes ont commis des actes ignobles en son nom », affirme le général de la rue. Introuvable, Charles Blé Goudé, qui s’est plusieurs fois manifesté dans les médias se serait réfugié au Bénin ou au Ghana, à l’instar de nombreux anciens responsables ivoiriens. Il est l’objet de sanctions onusiennes depuis 2006 : gels des avoirs et interdiction de voyager.

Gbagbo en détention «arbitraire»

Si Blé Goudé jouit encore de sa liberté en dépit du mandat d’arrêt contre lui, son mentor Laurent Gbagbo n’échappe pas à la justice ivoirienne. Une justice que la défense de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo qualifie d’ « arbitraire ». Ses avocats, maîtres Lucie Bourthoumieux, Roland Dumas, Jacques Vergès, Marcel Ceccaldi ont dénoncé ce mardi le « flou juridique » qui entoure la détention de leur client, actuellement en résidence surveillée à Korhogo dans le nord du pays. Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité de l’ONU, la défense affirme qu’ « en dépit de [ses] multiples démarches et demandes, [ils n’ont] pu entrer en possession du décret de mise en résidence surveillée » de Laurent Gbagbo.

« Ce décret n’existe pas, le président Laurent Gbagbo se retrouve par conséquent avec l’aval tacite de l’Onuci (l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire) et le soutien actif de la force Licorne (…), victime d’un enlèvement, d’une séquestration et d’une détention arbitraire », poursuivent-ils. La femme du président déchu, Simone Gbagbo, et d’autres hauts fonctionnaires dont l’ex-Premier ministre Gilbert Aké N’Gbo, également assignés en résidence dans le nord seraient aussi les victimes de ces arrestations « dénouées de toute base légale », d’après les hommes de loi.

Les accusations de Me Vergès et de ses pairs font écho à celles d’Amnesty International. L’organisation de défense des droits de l’homme a dénoncé le 22 juin la détention sans inculpation de partisans de Laurent Gbagbo dans des conditions pouvant mettre leurs vies en danger. Elle a estimé « dérangeante » la présence de l’Onuci pour sécuriser l’Hôtel Pergola, où selon elle, sont détenus arbitrairement des pro-Gbagbo.

Une « application illégale » de la résolution 1975 de l’ONU

Sur le fond, les avocats de Laurent Gbagbo ne sont pas en reste. Ils ont vivement critiqué ce qu’ils pensent être un détournement, une « application illégale » de la résolution 1975 de l’ONU adoptée le 30 mars qui exige le départ de Laurent Gbagbo et autorise l’Onuci à utiliser « tous les moyens nécessaires »pour protéger les populations civiles. « Aucune disposition de cette résolution n’autorise ni la remise du président Gbagbo entre les mains de l’autre partie au conflit ni la privation des droits humains les plus fondamentaux », écrivent-ils. L’ancien chef d’Etat, arrêté le 11 avril après plus de quatre mois de crise politique née de son refus de quitter le pouvoir au profit de son rival Alassane Ouattara, est depuis privé de toute communication avec l’extérieur, affirment les avocats.

Il pourrait être poursuivi devant la Cour pénale Internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. A la demande du procureur de la juridiction de La Haye, Luis Moreno-Ocampo, une enquête est en cours pour identifier les auteurs des graves exactions commises après l’élection présidentielle du 28 novembre 2010 en Côte d’Ivoire. La crise post-électorale a fait plus de 3 000 morts et près d’un million de déplacés. Les soupçons de la CPI pèsent aussi sur les partisans de l’ancien chef d’Etat, les Forces de défense et de sécurité (FDS) que les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI, pro-Ouattara).

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