Lumière sur le cinéma de Madagascar


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Laza

Les 6èmes Rencontres du Film Court de Madagascar, parrainées cette année par le réalisateur burkinabè Gaston Kaboré, accueillent du 8 au 16 avril pas moins de 280 films répartis en 40 séances gratuites. État des lieux du cinéma malgache, cartes blanches aux festivals Interfilm de Berlin, Off-Court de Trouville, Kurzfilmtage Suisse et au Festival International du Court-Métrage de Clermont-Ferrand, mais aussi à Canal + et à la Cinémathèque Afrique vont rythmer pendant dix jours la capitale du pays.

Depuis six ans, les Rencontres du Film Court valorisent les courts-métrages sur l’Ile Rouge. Permettant à la fois aux cinéastes malgaches de se former à travers différents ateliers et de rencontrer des réalisateurs étrangers, le festival permet avant tout de primer des réalisateurs de films de fiction, documentaire ou d’animation à travers une compétition qui réunit cette année 16 courts-métrages. Laza, producteur, réalisateur et directeur des Rencontres, nous présente l’édition 2011.

Afrik.com : Comment est né le projet des Rencontres du Film Court et comment parvenez-vous à le pérenniser depuis six ans ?

Laza : J’ai fait mes études de cinéma à Paris. Et quand je commençais à revenir à Madagascar, pas pour rentrer et y vivre toute l’année mais pour essayer de monter des projets ici, le “milieu” du cinéma était tellement vide que même si j’étais persuadé que l’on avait des histoires à raconter, il fallait un minimum. Je ne savais pas trop par où commencer, alors j’ai décidé de monter ce projet. Je me souviens encore de la fois où j’étais venu voir la directrice du Centre Culturel Français avec mon projet de deux pages. Elle ne me prenait pas au sérieux et me disait : “mais comment voulez-vous monter un projet de festival de film dans un pays où il n’y a même pas de réalisateur ?”. Elle n’avait pas forcément tort mais j’ai insisté et maintenant nous en sommes à la 6ème édition. Je pense qu’on est arrivé à faire 6 éditions car chaque année nous avons de nouveaux partenaires qui croient à ce projet et qui sont persuadés tout comme nous qu’un cinéma de qualité peut exister dans ce pays.

Afrik.com : En mettant l’action sur la formation, vous sensibilisez les malagasy aux différents métiers du 7e art. Quel impact les ateliers (de réalisation, d’effets spéciaux, de scénario, de cinéma d’animation…) ont-ils sur les participants ?

Laza : Comme il n’y a pas encore d’école de cinéma à Madagascar, les Rencontres du Film court sont l’unique “moment” où l’on parle vraiment de cinéma dans ce pays. Les participants aux différents ateliers n’attendent que le mois d’avril pour se perfectionner un peu, à part ceux qui ont la chance de se perfectionner ailleurs.

Afrik.com : Combien de projections seront organisées durant le festival et dans quels lieux ?

Laza : Nous avons programmé 40 séances durant lesquelles nous projetterons 280 films dans 9 lieux tels que l’Institut Français de Madagascar, le Café de la gare, l’Université, en plein air…

Afrik.com : Songez-vous à étendre le festival à l’ensemble de l’île ?

Laza : Bien sûr, déjà l’appel à films [ndlr : pour la compétition] est national et cette année nous avons reçu une dizaine de films des autres provinces. Il y a d’ailleurs un film qui vient de Tamatave en compétition. Des projections sont prévues à l’Alliance Française de Sainte Marie. Mais surtout notre façon d’être présents en province, c’est d’envoyer les lauréats dans quelques villes de Madagascar montrer leur film et les films sélectionnés, après le festival.

Afrik.com : En choisissant le réalisateur burkinabè Gaston Kaboré comme parrain de cette 6e édition, quel message voulez-vous transmettre aux cinéphiles ?

Laza : Monsieur Gaston Kaboré représente beaucoup de choses pour moi, c’est un exemple, et je me sens privilégié de pouvoir le côtoyer un peu. Comme je voulais vraiment mettre l’accent sur la formation cette année, il est le parrain idéal pour ça avec son école Imagine à Ouagadougou. J’admire le dévouement de cet homme et s’il y a un message que je veux faire passer lors de son passage ici, c’est peut-être que le talent est juste le minimum mais qu’il faut apprendre à le gérer et la formation est l’une des méthodes pour y arriver.

Afrik.com : Après le festival, quelle carrière connaissent les films malgaches qui étaient en compétition ?

Laza : Nous éditons un DVD qu’on tire à 500 exemplaires chaque année et que nous envoyons dans les festivals, les chaînes de télévision, etc. Depuis 4 ans maintenant, TV5 achète régulièrement les droits de diffusion de nos films, Canal France International aussi depuis l’année dernière. Grâce aux Rencontres du Film Court, ces films circulent dans le monde entier et gagnent des prix dans des festivals internationaux.. Par la même occasion, cela permet aux réalisateurs de voyager et au cinéma malgache de faire acte de présence sur la scène cinématographique mondiale.

Afrik.com : Depuis plusieurs années, vous militez pour l’éclosion d’une industrie cinématographique malgache. Quel état des lieux faites-vous à la veille du démarrage des Rencontres du Film Court ?

Laza : Je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à faire car un festival ne peut pas tout faire. Surtout, il ne peut pas exister sans réalisateurs et j’ai l’impression qu’il est vraiment temps d’aider les faiseurs de films à être plus confortables dans leur processus de création. D’où l’utilité d’un fond d’aide à la production. Cette année, nous essayons de mettre en place un mini fonds d’aide à la production pour les courts-métrages malgaches. Les Rencontres du Film Court n’ont pas la prétention de vouloir régler tout les problèmes du cinéma malgache, mais je pense qu’il faut faire les choses alors si nous avons l’opportunité d’agir, nous agissons !

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