Drepan Hope, un autre regard sur la drépanocytose


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Trésor Oniangue et Christelle Facorat

Christelle Facorat et Trésor Oniangue ont créé Drepan Hope pour redonner espoir aux malades de la drépanocytose. À coups de prévention et de sensibilisation, le dynamique binôme prouve que l’on peut mieux vivre le quotidien malgré les crises douloureuses que provoque cette pathologie du sang. Les deux fondateurs, eux-mêmes drépanocytaires, en sont la preuve. Ils organisent vendredi, à Paris, avec So Live Productions, un concert dont les bénéfices aideront à la sensibilisation et la lutte contre la maladie.

Drepan Hope est née d’un « ras-le-bol ». Au départ, Christelle Facorat, la présidente, couche sur un blog sa « vie en tant que drépanocytaire ». Une vie ponctuée par les crises de douleurs que provoquent les formes sévères de la drépanocytose, une maladie génétique du sang qui touche principalement les populations noires. « J’ai vu que mon blog faisait de plus en plus de bruit, se souvient la Guadeloupéenne de 26 ans. Il y avait beaucoup de demandes, de gens qui se plaignaient de ne pas entendre parler de cette maladie. »

« Informer les malades, sensibiliser le grand public »

La pathologie, que les Nations Unies considèrent depuis le 22 décembre comme priorité de santé publique, concernerait quelque 50 millions de personnes dans le monde. Mais on en parle peu, et on ne la connaît pas partout. Christelle Facorat a failli le payer de sa vie : « J’ai fait une crise et on peut dire que j’ai été victime d’une « erreur médicale ». J’ai été mal prise en charge, j’ai fait des complications, et j’ai manqué faire une embolie pulmonaire. On m’a transférée dans un hôpital plus spécialisé, où je suis restée hospitalisée un mois… Suite à ça, avec Trésor [Oniangue], on s’est dit : « Pourquoi pas monter une association ? » ».

C’est ainsi que Drepan Hope a vu le jour, au début de l’année 2006. L’association, basée à Clichy, au Nord de Paris, pare au plus pressé. « Pour l’instant, la démarche est d’informer les malades et les familles, et de sensibiliser le grand public », résume Trésor Oniangue, 23 ans, un drépanocytaire d’origine congolaise qui fait office de secrétaire et webmaster pour Drepan Hope.

L’information et la sensibilisation passent notamment par drepan-hope.com, encore en construction, qui appelle entre autres au dépistage et au don du sang. Car, rappelle Christelle Facorat, « les échanges transfusionnels évitent la fréquence des crises », qui surviennent lorsque la déformation des globules rouges empêche le transport de l’oxygène.

Première association créée par des drépanocytaires

Le site, qui compte « entre 10 000 et 15 000 visiteurs par mois », recèle par ailleurs quelques témoignages de drépanocytaires et, surtout, de nombreuses informations : il vulgarise ce qu’est la drépanocytose, détaille ses différentes formes et symptômes et explique quelle hygiène de vie adopter pour vivre au mieux avec. Des données mises en ligne après vérification du contenu par des spécialistes de l’anémie falciforme. Des spécialistes apparemment très motivés.

Pourquoi un tel enthousiasme ? « Trésor et moi étions les seuls malades à avoir monté une association, alors ils nous ont accueilli à bras ouvert ! Avant, il y avait des associations montées par des mères de drépanocytaires, par des amis de drépanocytaires… mais les malades eux-mêmes ne voulaient rien faire. Ils reculaient, ils n’avaient pas envie de se mêler de ça, peut-être parce qu’ils vivent déjà au quotidien avec la maladie », commente Christelle Facorat, qui ajoute que d’autres médecins les ont contactés le 31 décembre pour assister à leurs groupes de parole.

Redonner de l’espoir

Si certains drépanocytaires veulent prendre de la distance par rapport à leur maladie, c’est à cause de la souffrance physique et psychologique, induite par le mal méconnu qui les ronge. C’est pourquoi Christelle Facorat et Trésor Oniangue s’évertuent à les informer mais aussi à leur donner de l’espoir. D’où le nom Drepan Hope, un mélange de « drépano », diminutif de drépanocytose ou de drépanocytaire, et de « hope », qui signifie « espoir » en anglais.

L’une des stratégies employées pour booster le moral des malades et rompre leur isolement consiste à développer des initiatives décalées pour que la drépanocytose soit « connue et reconnue ». Parmi elles, on compte la préparation d’un album conçu en majeure partie pour et par des drépanocytaires.

Un album pour sensibiliser

Pour le casting de chanteurs, compositeurs et autres poètes, Drepan Hope a fait une annonce sur son site, mis à disposition des bannières gratuites téléchargeables sur son Myspace et collé des affiches dans des hôpitaux de Paris, Reims, Metz, Strasbourg et Reims. Au final, une vingtaine de personnes âgées de 13 à 30 ans ont répondu.

Les artistes et l’association travaillent actuellement à la finalisation des textes et des mélodies, en prévision de l’enregistrement d’une maquette. Trésor Oniangue préfère rester discret quant aux artistes et au label intéressés pour se joindre à la conception du disque. Il révèle en revanche que Drepan Hope se penche sur la création d’une Web TV « réservée à l’information sur la drépanocytose ».

Lumière sur le concert Drepan Hope Live

La détermination et l’énergie de Drepan Hope ont séduit Kayz. Avec sa société d’événementiels So Live Productions, ce jeune français d’origine sénégalaise, lui-même drépanocytaire, organise le 30 janvier, au Bizz’art (ex-Opus Café), à Paris, un concert soul dont tous les bénéfices seront reversés à l’association de Christelle Facorat et Trésor Oniangue. A l’affiche, Laure Milan, Rony, Lisa Spada, Larry Paul, Jool, Shad Murray… Kayz donne les raisons de son engagement envers Drepan Hope.

Afrik.com : Pourquoi ce concert de soutien à Drepan Hope ?

Kayz : Je soutiens cette association exemplaire car je trouve que leur manière d’aborder la lutte contre la drépanocytose est moderne et dynamique. Cette association fait appel à des codes d’aujourd’hui bien dans leur temps. Les jeunes gens à l’initiative de Drepan Hope, je les estime fortement et je souhaitais leur rendre hommage et mettre en exergue leur travail par un concert qui est l’une de mes activités adorées. La musique reste un de nos points commun, ça aide aussi.

Afrik.com : Comment avez-vous convaincu les artistes de s’investir gratuitement ?

Kayz : J’ai la chance de travailler régulièrement avec de nombreux artistes hip hop, soul et pop plus ou moins connus à l’occasion des concerts So Live & Co, qu’organise ma société. Ils connaissent tous mon engagement très fort et personnel pour la lutte contre la drépanocytose, et c’est spontanément qu’ils m’ont répondu positivement pour apporter leur voix et leur talent à ce combat en manque cruel de visibilité. Je pense que leur générosité d’artistes a très vite pris le pas, et ce pour le meilleur d’une lutte musicale à l’aube de son histoire.

Afrik.com : L’idée est de pérenniser ces concerts de soutien. Dans quel but ?

Kayz : En effet, il est dans l’optique de So Live Productions de faire de ce rendez-vous une récurrence solidaire pour faire parler de la drépanocytose et pour faire régulièrement le point sur la maladie en France et dans le monde. Car même si l’essentiel de notre propos est le spectacle, la musique, nous informerons et sensibiliserons le public grâce aux médecins spécialisés qui interviendront régulièrement en marge nos actions live.

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