Racisme : un test en ligne pour mesurer les préjugés


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Non au racisme
Non au racisme

Clichés sur les Noirs, les femmes, les personnes âgées ou les Maghrébins. L’Observatoire des discriminations propose de les mesurer sur Internet. Un test qui a pour objectif de lutter contre les discriminations, en France, aussi bien dans le quotidien que dans le monde du travail. Eclaircissements de Jean François Amadieu, auteur du test et Directeur de l’Observatoire des discriminations.

Jean-François Amadieu« 77% des répondants ont des préjugés négatifs à l’encontre des Maghrébins et 58% à l’égard des Noirs », explique Jean-François Amadieu, le directeur de l’Observatoire des discriminations. Avec ce test, en ligne depuis juillet 2007, l’institution tente de comprendre les mécanismes de la discrimination et permet d’évaluer les préjugés vis-à-vis des Noirs, des Maghrébins, des Femmes et des Seniors. « Cette enquête a deux objectifs principaux. D’une part, du fait qu’il soit en ligne, on accumule beaucoup de données car des milliers de tests sont réalisés. On a donc une mesure des stéréotypes à grande échelle. Ensuite, c’est une manière de sensibiliser le grand public sur la question des stéréotypes », affirme M.Amadieu.

« Les gens ne se représentent pas bien leur manière de penser »

Le test donne des résultats étonnants. « On a remarqué que parmi les porteurs de prénoms originaires d’Afrique Subsaharienne, la majorité d’entre eux ont une vision négative des Maghrébins et des Africains » explique le Directeur de l’Observatoire des discriminations. Autre fait intéressant, le test révèle que « 87% des personnes interrogées associent les femmes à la maison ». Jusque là rien de particulier si ce n’est que l’image du sexe féminin n’a pas vraiment évolué. Fait surprenant, parmi ces 87% de personnes interrogées figure un nombre non négligeable de femmes qui s’associent naturellement à la maison, plutôt qu’au travail.

Comme l’affirme M. Amadieu, « les gens ne se représentent pas bien leur manière de penser ». Alors que seulement 8% des interrogés admettent qu’ils ont des préjugés, les résultats des tests créditent de 58% les personnes adeptes des stéréotypes.

Ces derniers sont aussi bien d’ordre social qu’intellectuel. Il y a quelques mois, l’Observatoire des discriminations a réalisé une enquête et « a constaté que les gens ont du mal à apprécier les Noirs et les Maghrébins, au niveau intellectuel » explique le chercheur. « Au niveau social, les Noirs sont considérés comme des gens sympathiques, qui aiment faire la fête. Par contre, d’un point de vue intellectuel, la vision est très négative », poursuit M. Amadieu. « Pour les Maghrébins, les gens portent une appréciation moins favorable sur les aspects sociaux. Les Maghrébins sont vus comme des gens malhonnêtes, intolérants. En revanche, la vision au niveau intellectuel est plus positive », précise-t-il.

Des préjugés lourds de sens

Les mentalités ne semblent pas avoir évolué. « Voleur », « menteur » et « agressif », voici les caractéristiques qui reviennent le plus souvent vis-à-vis des Maghrébins. « Paresseux » et « fainéant » sont attribuées aux Noirs. Des clichés qui perdurent. « Les préjugés sont la représentation colportée durant des générations. Il y a différents raisons, notamment historique et relatives à l’époque coloniale. Cela perdure dans les esprits notamment à cause de [leur] médiatisation » selon Jean-François Amadieu.

Que faire face aux préjugés ? « Il faut sortir du déni, identifier les préjugés et faire un diagnostic. On ne va pas changer les esprits du jour au lendemain, c’est un travail de longue haleine. Cela passe par l’éducation, la publicité, les médias. Par exemple, dans les contes pour enfants, il y a des stéréotypes clairs. Le prince est toujours blanc et gentil, le méchant est toujours vêtu de noir et plutôt disgracieux », souligne M. Amadieu.

En plus de mesurer les préjugés, le test s’impose comme une prise de conscience. « Ca ne sert à rien de culpabiliser les gens » explique M. Amadieu, mais « il ne faut pas que les préjugés interfèrent sur le comportement ». Un des enjeux du test est de mettre en garde les professionnels quant à leurs critères d’embauches. Que les préjugés, qu’ils soient physiques, raciaux ou autres « ne prennent pas le dessus sur le reste ».

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