Les mariages interfamiliaux sont très fréquents en Algérie


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Les conclusions d’une enquête sur la consanguinité (mariage entre proches) réalisées pour la première fois en Algérie, par la FOREM donnent froid dans le dos. Un phénomène très fréquent dans notre société mais qui n’a jamais fait l’objet d’une étude documentée. Et dire que ses conséquences au plan médical sur les enfants qui naissent d’un mariage consanguin sont souvent néfastes.

Pour certains spécialistes, les malformations, les maladies génétiques ou les arriérations mentales seraient légèrement plus fréquentes chez les enfants issus d’une union consanguine et le risque de fausses couches serait augmenté. La Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem) a tenté à travers cette enquête réalisée dans 21 communes réparties sur 12 wilayas du pays — trois wilayas du Sud (El Oued, Biskra et Ghardaïa), quatre du Centre (Alger, Boumerdès, Bouira et Béjaïa), trois de l’Est (Bordj Bou Arréridj, Tébessa et Annaba) et deux de l’Ouest (Oran et Aïn Defla) — de montrer l’ampleur de ce phénomène. Cette étude menée par des étudiants en médecine en fin de cursus a débuté en novembre 2006 pour se terminer en avril 2007. Elle s’est déroulée dans les PMI où a été opéré le captage des 2600 mamans à la faveur des visites de vaccination. Les enquêteurs ont travaillé sur un échantillon dont 47% des familles ont moins de trois enfants, 37% ont entre quatre et sept, et 7,7% ont plus de sept.

Les résultats de l’enquête ont ainsi révélé que le taux de consanguinité est de 38,30%. « Ce taux varie selon les wilayas et donc les communes choisies », souligne la Forem. Avant de préciser que le taux le plus élevé a été retrouvé dans la commune de Bir El Ater, dans la wilaya de Tébessa, avec 88%. Elle sera suivie par la wilaya de Ghardaïa avec un taux de 56%, Aïn Defla avec 52%, Béjaïa avec 50,6%, Bouira 42,5%, Boumerdès 42%, Biskra 34%, Annaba 32,5%, Bordj Bou Arréridj 27% et El Oued 22,5%. La wilaya d’Alger est considérée au-dessous de la moyenne avec un taux de consanguinité de 29,25% alors que le taux le plus bas est retrouvé à Oran, 18,5%. S’agissant de la consanguinité du deuxième degré, qui est la plus marquée dans certaines wilayas, elle est plus importante à Boumerdès, Aïn Defla et Bordj Bou Arréridj avec des taux respectivement de 85,71%, 76,3% et 75,92%. Elle est de bas niveau dans la wilaya d’Oran avec 18,91%.

De nombreuses anomalies congénitales observées

Concernant les anomalies congénitales observées à la naissance, les enquêteurs ont recensé une série de malformations et de maladies. Il s’agit entre autres du bec de lièvre, la maladie du Duchenne, les cardiopathies, l’agénésie des membres, la trisomie 21 et les mucoviscidoses. Ces anomalies sont très fréquentes avec des taux très élevés (6,52%) soit presque deux à trois fois les taux admis qui sont de 2 à 3%, souligne la Forem. Pour ce qui est des maladies génétiques qui sont très nombreuses dans les familles issues d’un mariage consanguin, les auteurs de cette enquête précisent que la fréquence paraît proportionnelle au lien de consanguinité. Les résultats ont révélé ainsi 23 cas d’anémie hémolytique (béta thalassémie et drépanocytose), 14 cas de cardiopathies congénitales, 8 cas d’hydrocéphalie, 8 cas de myopathie de Duchenne, 8 cas de bec de lièvre, 7 cas d’hémophilie et trois cas de surdité.

L’enquête en question montre que suite à une étude comparative entre les familles issues de mariages consanguins à celles non liées par le sang, ces malformations et ces maladies sont plus importantes. A titre d’exemple, l’on cite l’hydrocéphalie qui est 13 fois plus fréquente, l’hémophilie 11 fois plus fréquente, la maladie du Duchenne 8 fois plus fréquente, les maladies neurologiques 7 fois plus fréquentes et les anémies congénitales sont 3 fois plus importantes. Ces résultats renseignent ainsi sur les conséquences de cette union qui semble très importante en Algérie. A l’issue de cette enquête, la Forem conclut que les bouleversements sociologiques survenus au cours des 45 dernières années n’ont eu qu’un effet minime sur les liens de sang. La Forem recommande une approche plus précise, notamment dans les régions réputées à forte endogamie.

Djamila Kourta, pour El Watan

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