Tchad : s’asseoir autour d’une table « oui », se rallier « non »


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Le président Goukouny Weddeye est retourné lundi pour la première fois au Tchad depuis qu’il a été chassé du pouvoir en 1982. Il a rencontré le président Idriss Déby Itno à la tête d’une délégation d’opposants dont faisait partie Ahmat Yacoub. L’ex-secrétaire général du FNTR explique à Afrik quelle a été leur démarche.

Cela faisait quatorze ans qu’Ahmat Yacoub, l’ex-secrétaire général du FNTR (Front national du Tchad rénové), l’un des nombreux mouvements rebelles tchadien, n’avait foulé le sol de N’djamena. S’il l’a fait de nouveau ce lundi, c’est pour apporter un gage de bonne volonté au président Déby dans la perspective de discussions générales de paix qu’il tente d’initier en compagnie d’autres opposants, parmi lesquels l’ex-président Goukouni Weddeye (1980-1982). Un processus indispensable, que Libreville tente de faciliter, alors que les rebelles succèdent aux rebelles depuis des années à la tête du Tchad sans laisser la moindre opportunité de paix durable aux citoyens. La stratégie du président Déby a longtemps consisté à phagocyter l’opposition, comme il l’a récemment fait avec l’ex-chef du FUC (Front uni pour le changement) Mahamat Nour. Mais Ahmat Yacoub assure que la délégation reçue ce lundi au palais présidentiel de N’djamena ne s’y laissera pas prendre et que son seul but est d’impulser des discussions générales inter-tchadiennes.

Afrik : Pourquoi avoir accepté de rencontrer le président Déby ?

Ahmat Yacoub :
Notre mission était d’inciter les uns et les autres, toutes les parties impliquées dans la crise tchadienne, à se mettre autour d’une table et dialoguer. Maintenant, nous avons rencontré le président Déby et il y a d’autres étapes : celle d’aller vers les politico-militaires, les partis politiques, la société civile… Cela nécessiterait d’autres voyages, en Libye (où une délégation des mouvements militaires se trouve depuis plusieurs semaines pour des discussions inter-tchadiennes qui bloquent, ndlr), au Soudan, là où les partis en présence se trouvent.

Afrik : Des opposants reprochent déjà à la délégation d’avoir discuté avec le président Déby…

Ahmat Yacoub :
Nous n’y sommes pas allés pour discuter. Nous y sommes allés pour remettre un message de paix et amener le président Idriss Déby à nous soutenir dans notre démarche. Si nous avions discuté, cela aurait signifié que nous étions des représentants des parties en présence… or nous voulons les impliquer.

Afrik : L’opposition politico-militaire soutient-elle votre démarche ?

Ahmat Yacoub :
Aujourd’hui, la communication est très facile. Nous sommes en contact permanent avec toutes les parties en présence. Maintenant, il faut leur expliquer de vive voix notre démarche. Celle à laquelle le président Déby a apporté son soutien.

Afrik : Les politico-militaires avaient pourtant refusé en avril dernier de soutenir le président Goukouny Weddeye, qui avait rencontré Idriss Déby à Libreville…

Ahmat Yacoub :
C’était une incompréhension. Au départ, les gens croyaient qu’il s’agissait d’un ralliement, comme le capitaine Mahamat Nour l’a récemment fait. Au fur et à mesure que les choses avançaient, les gens ont adhéré à la démarche. Et la rencontre de lundi était dans la suite de celle d’avril dernier. Les parties en conflit sont en contact permanent avec le président Goukouni Weddeye.

Afrik : Pourquoi les discussions entre le gouvernement tchadien et les mouvements rebelles bloquent-elles à Tripoli ?

Ahmat Yacoub :
Elles sont bloquées car les politico-militaires posent une question sur la modification de la Constitution. Ils souhaitent que le Premier ministre ai plus de prérogatives face à un président tout-puissant. Ils réclament également un régime parlementaire.

Afrik : Ne souhaitent-ils pas également le départ du président Déby ?

Ahmat Yacoub :
Nous sommes dans une autre logique. Nous avons évolué. Il s’agit d’ouvrir des discussions non pas séparées, comme cela s’est fait depuis 17 ans, mais avec tout le monde. Quand j’ai rencontré Idriss Déby, le 18 février dernier (dans la foulée du sommet Afrique-France), des opposants m’ont attaqué en croyant que j’allais me rallier. Cela a encore été le cas hier (lundi, lors de la rencontre).

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