Un café nommé Kaldi


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Des grains de café
Des grains de café

La légende dit que c’est un jeune Ethiopien qui a découvert le café. Kaldi s’est aperçu du pouvoir de ses grains en observant l’agitation de ses chèvres après qu’elles en aient consommé. La suite, on la connaît : le breuvage que l’on tire du café a fait le tour du monde.

Après une matinée studieuse à la Réunion régionale africaine du Bureau international du travail, à Addis-Abeba, je vogue avec des amis vers un snack-bar. Et là, surprise, je m’aperçois que le logo sur les dessous de verres et sur les tee-shirts des serveurs me rappellent étrangement un autre logo : celui de la chaîne de cafés Starbucks. La coïncidence est frappante. Normal, cela n’a rien d’un hasard.

L’Ethiopienne Tseday Asrat, fan du concept de Starbucks, avait demandé à la compagnie américaine si elle pouvait ouvrir une franchise dans son pays. Devant le refus de Starbucks, Tseday Asrat a monté l’enseigne Kaldi’s (chez Kaldi, en français). Pourquoi ce nom ? Cette fois-ci, il n’est plus question de hasard, mais d’histoire. Il en existe plusieurs versions mais, le plus généralement, la légende dit que les précieux grains ont été découverts en Ethiopie, voilà aujourd’hui plusieurs siècles.

Des chèvres qui dansent

Nous sommes à Kaffa, une région située au Sud-Ouest d’Addis-Abeba qui donnera plus tard son nom au café. Kaldi, le nom du héros de cette aventure, promène tranquillement ses chèvres. Il s’aperçoit qu’elles mangent de petites baies rouges qui leur font un drôle d’effet : elles sont toutes excitées. On dirait même qu’elles dansent. Intrigué et faisant le lien avec ce qu’elles consomment, le jeune chevrier goûte la baie amère. Peu après, il se retrouve plein d’entrain et d’énergie, comme ses compagnes quadrupèdes bêlantes.

À ce stade, les versions divergent. Kaldi aurait décidé d’apporter les fameux grains dans son village ou dans un monastère. Selon la première version, Kaldi a torréfié des grains pour les rendre plus comestibles. Les villageois ont apprécié. Certains l’ont même moulu et ont versé de l’eau chaude dessus… Dans le second cas, l’abbé a voulu les préparer mais, jugeant le goût trop amer, a jeté sa concoction dans le feu.

Une agréable odeur s’est alors élevée et l’abbé a décidé de créer une boisson à partir des grains torréfiés. Le breuvage aurait été d’autant plus apprécié qu’il permettait de rester d’aplomb pendant les prières nocturnes. La boisson – notamment appelée « kahweh », qui signifie « fort », « élan » ou « vitalité » en arabe – serait longtemps restée consommée en Ethiopie sans être connue dans le reste de la Corne de l’Afrique.

Kaldi, héros d’un livre

Aujourd’hui, certains consomment le café chaud, froid ou frappé. D’autres le préfèrent sucré, salé, voire parfumé à la cannelle ou à la cardamome. Peu d’adeptes connaissent la légende de Kaldi. Cependant, le nom du jeune chevrier n’est pas tombé dans l’oubli. Il semble même être devenu un label de qualité.

Aux Etats-Unis, la société Kaldi’s Coffee Roasting Company a ouvert sa première maison du café en 1994. En Ethiopie même, Sauda Mdahoma a publié en 2005, aux éditions Shama Books, un livre pour enfants racontant la légende : Kaldi and the dancing goats, the legend of Ethiopian coffee (Kaldi et les chèvres dansantes, la légende du café éthiopien, en français).

Sans oublier le Kaldi’s de Tseday Asrat. Starbucks ne serait d’ailleurs pas gênée par la « contrefaçon » de sa marque. Il faut dire qu’elle est en opposition avec le gouvernement éthiopien, qui souhaite déposer en tant que marque ses cafés les plus réputés : Sidamo, Harar et Yirgacheffe. Une mesure qui lui permettrait, ainsi qu’aux cultivateurs, de tirer plus d’argent de leur commerce. Bonne nouvelle pour Addis-Abeba : selon la BBC, les deux parties viennent de signer un accord qui irait dans le sens des requêtes éthiopiennes.

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