La consommation de l’iboga interdite en France


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Iboga
Iboga

Classé patrimoine national au Gabon, l’iboga, une plante hallucinogène utilisée lors de rites traditionnels, est, depuis mercredi, interdite à la consommation en France. L’Agence française de sécurité sanitaire en a décidé ainsi après le décès de deux consommateurs en 2005 et 2006. La mission de lutte contre les dérives sectaires insiste sur sa dangerosité lorsque sa consommation n’est pas encadrée.

« Aujourd’hui, l’iboga et l’un de ses composants, l’ibogaïne (et certains produits dérivés), sont classés comme stupéfiants par le Ministre de la Santé et des Solidarités », a annoncé mercredi l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) dans un communiqué. L’organisme français enquêtait depuis 2005 sur les effets néfastes de cette plante à la suite du décès d’un homme qui en aurait consommé dans le cadre d’un stage chamanique. L’iboga est cultivé dans les forêts d’Afrique centrale, particulièrement au Gabon, où il est classé patrimoine national. Sa racine est traditionnellement utilisée dans le cadre du culte bwiti, un rite initiatique hérité des pygmées et qui marque le passage à l’âge adulte.

Le problème est que sa consommation sans surveillance, et associée à d’autres drogues ou à de l’alcool, pourrait entraîner la mort. La vigilance de l’Afssaps a redoublé suite au nouveau décès d’une personne, Jerry, qui en avait ingurgité et dont le corps a été retrouvé le 18 juillet 2006, à La Voulte-sur-Rhône, en Ardèche (France). L’iboga est interdite aux Etats-Unis depuis 1966, de même qu’en Suisse et en Belgique.

« Apprentis sorciers »

L’Afssaps n’est pas le seul organisme à s’être intéressé à la plante. La Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) s’est inquiétée dans ses rapports 2005 et 2006 de l’utilisation de l’iboga, en France, dans le cadre du « développement de la mouvance New Age », désignant des groupes qui développent « des pratiques guérisseuses, d’épanouissement personnel parfois fondées sur le chamanisme ». Mais la mission pointait surtout son utilisation par des mouvements sectaires qui profiteraient de l’état de faiblesse créé chez les consommateurs pour « asseoir une doctrine ».

Elle souligne que « dans le cadre du rituel africain, c’est un sorcier guérisseur, maîtrisant la pratique [bwiti] (…) qui organise la cérémonie et “initie” le sujet selon les coutumes ancestrales. Cela, regrette-t-elle, ne semble malheureusement pas être le cas dans les stages proposés en France, où l’on peut parler, au sens propre, “d’apprentis sorciers” » C’est pourquoi elle interroge « particulièrement » le ministère de la Santé « sur l’encadrement de la consommation de l’iboga ».

Pourtant, à la suite de l’information judiciaire ouverte par le parquet de Privas pour « homicide involontaire » et « mise en danger d’autrui », suite au décès de la Voulte-sur-Rhône, c’est bien le nganga (le maître de cérémonie) qui a été emprisonné à la maison d’arrêt de Valence le 27 janvier dernier. Herman Nzamba Boussougou, dit « Mallendi », tradipraticien de 26 ans agréé au Gabon, a pourtant prouvé aux autorités qu’il était absent du territoire français le jour de la cérémonie qui a coûté la vie à Jerry. Celles-ci lui reprochent le millier de cérémonies qu’il explique avoir dirigé depuis qu’il officie en France.

Après un premier refus, le juge des libertés a accepté sa libération voilà moins d’un mois. La femme qui a avoué avoir donné l’iboga à Jerry, malgré le fait qu’il ait pris de la méthadone et de l’alcool, a été mise en examen pour les mêmes chefs d’accusation que lui mais elle n’a jamais été incarcérée. « Le plus surprenant est que Mallendi reste accusé de mise en danger de la vie d’autrui, pour touts les cérémonies auxquelles il avoue avoir participé, mais aussi d’homicide involontaire, alors qu’il était en Afrique lorsque l’accident s’est produit, regrette Gérard Estier, de l’association Meyaya, qui organisait la cérémonie.

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