Procès Thomas Sankara : Gilbert Diendéré ne cède rien, l’audience reprend lundi


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Gilbert Diendéré
Gilbert Diendéré

L’interrogatoire du général Gilbert Diendéré a pris fin ce jeudi 11 novembre. Sans grande avancée, l’homme étant demeuré fidèle à la ligne de défense qu’il a adoptée depuis le début.

Troisième et dernier jour de l’audition du général Gilbert Diendéré. La parole a été accordée aux avocats de la défense, qui se sont efforcés de démontrer à la Cour l’innocence, en lui accordant la parole, à plusieurs reprises. Le général a eu l’occasion de plastronner devant la Cour, allant même jusqu’à donner des leçons à la procureure militaire, Pascaline Zoungrana, qui a déclaré qu’au moment des faits, en 1987, le lieutenant Gilbert Diendéré, alors chef de corps adjoint du Centre national d’entraînement commando (CNEC), était en réalité le véritable chef, Blaise Compaoré, le chef n’étant pas souvent disponible en raison de ses fonctions de ministre de la Justice.

Ces propos de la procureure ont amené le président du tribunal à poser la question de savoir si le chef de corps du Centre national d’entraînement commando et son adjoint dans l’armée ont les mêmes attributions. Reprenant la parole, Pascaline Zoungrana déclare : « Ils ont les mêmes attributions. Le chef de corps peut donner des instructions à son adjoint qui, en l’absence de son chef peut prendre des décisions et lui rendre compte (…) Le général Gilbert Diendéré a pris des décisions en tant que chef de corps. Il a sauté son chef Blaise Compaoré pour rendre compte au commandant Boukari Lingani. Il était le chef de corps du CNEC, de fait ».

Calmement et avec le sourire habituel qu’on lui connaît, Gilbert Diendéré a administré en douce une leçon à la procureure : « Je voudrais lui dire de retourner à ses documents. Elle ne maîtrise pas la chose militaire. Si le chef de corps et le chef de corps adjoint voulaient dire la même chose, l’un n’allait pas exister », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Il n’y a pas deux capitaines dans un bateau. L’adjoint supplée le chef de corps en cas d’absence ou d’indisponibilité. Mais tant que le chef de corps est joignable, l’adjoint ne peut pas prendre de décision sans lui rendre compte. Vous êtes complètement à côté de la plaque. J’ai exercé les fonctions de chef de corps adjoint puis de chef de corps, je sais de quoi je parle ».

À la question de savoir s’il avait failli à sa mission en tant que chef de la sécurité du Conseil de l’entente, Gilbert Diendéré répond : « Il y a eu un problème qu’on aurait dû éviter, mais qu’on n’a pas pu éviter. Je ne peux pas dire que j’ai totalement failli, mais j’ai un pincement au cœur que ce soit arrivé dans l’enceinte que je devais protéger (…) Donc je reconnais qu’il y a eu un manque, mais dire que c’est de ma faute, je ne peux pas le dire ».

Pour les avocats de Gilbert Diendéré, aucune preuve n’atteste la culpabilité de leur client à qui on veut faire porter une responsabilité qui n’est pas la sienne. L’un d’entre ces avocats, Me Mamadou Sombié, a pour sa part, tenté de montrer que des assassinats ont également eu lieu sous la présidence de Thomas Sankara. Les cas de Yorian Gabriel Somé, chef d’état-major général de l’armée voltaïque au moment du coup d’État d’août 1983, des commandants Fidèle Guebré et Amadou Sawadogo ont été évoqués. Et l’avocat de conclure : « Du sang a coulé sous la présidence du capitaine Thomas Sankara. Accuser aujourd’hui un soldat, c’est lui faire porter une camisole de force. Nous admirons tous Thomas Sankara, mais il n’était pas un Saint ».

Ces propos ont suscité de vives réactions dans la salle d’audience, obligeant le président du tribunal à exiger le retour du silence. L’ex-chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré n’a rien cédé, n’a rien reconnu de tout ce qui lui est reproché. C’est donc un homme satisfait de sa prestation qui a déclaré à la barre, ce jeudi 11 novembre, en guise de mot de fin : « Je n’ai pas de choses particulières à dire. J’attendrai volontiers le passage des témoins. Je suis satisfait d’avoir donné certains éléments qui permettent de savoir que moi, Gilbert Diendéré, je n’étais pas le chef du commando et n’étais pas membre du commando qui est allé au Conseil de l’entente. Je voudrais aussi ajouter que le fait que le parquet ait laissé tomber le chef d’accusation d’assassinat pour celui de complicité d’assassinat est déjà une bonne chose ».

L’audience reprendra lundi, avec le passage à la barre de deux accusés : Albert Pascal Sibidi Bélemlilga, Diakalia Démé, respectivement adjudant-chef et adjudant-chef major, en service à l’Escadron motocycliste commando (EMC) au moment des faits. Après ces deux hommes, commencera l’audition des témoins parmi lesquels Boukari Kaboré dit « Le lion ».

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Historien, Journaliste, spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne
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