Nigéria : impossible duo Etat de droit – bonne gouvernance ?


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L’Etat de droit assure l’égalité des citoyens devant la loi. C’est donc une base essentielle pour tout pays aspirant à un développement durable. L’exemple du Nigéria, met en avant les insuffisances de l’Etat de droit en Afrique. Insuffisance des textes, insuffisance de la justice. Pour répondre à ces faiblesses, il faut faire appel à l’activisme des citoyens, de la société civile mais aussi des médias pour exiger une meilleure gouvernance. Seul un tel contrepouvoir pourra faire basculer la gouvernance dans une sphère plus favorable à l’intérêt général.

Selon la définition de Kofi Bentil, la notion d’état de droit est le principe selon lequel les gouvernements doivent être régis par un ensemble de lois bien définies qui engagent tout le monde au sein d’une juridiction donnée. L’état de droit implique, entre autres, l’équité, l’égalité devant la loi, le respect des droits de l’homme, de la vie et des biens personnels, un traitement juste et équitable pour tous, par opposition au traitement arbitraire des masses par les dirigeants, les gouvernements et les fonctionnaires. À cette fin, le respect de l’état de droit est essentiel pour le développement général et la stabilité de chaque pays africain, en l’occurrence le Nigéria.

Egalité devant la loi

L’idée clé de l’état de droit est que la loi devrait s’appliquer à tous de la même manière, aussi bien aux gouvernants qu’aux gouvernés. Ainsi, selon les mots du constitutionnaliste du 19ème siècle, A.V. Diecy, l’état de droit assure un «gouvernement de droit et non un gouvernement d’hommes». L’alternative à l’état de droit n’est que l’arbitraire, l’anarchie, l’insécurité et le désordre.

L’état de droit définit et encadre la relation entre le gouvernement et le peuple. Comme l’a dit John Locke «La tyrannie commence là où la loi s’arrête ». Pour qu’une loi soit respectée et suivie, elle doit refléter l’esprit du peuple, tout comme l’a expliqué Von Savigny. L’état de droit doit protéger les droits fondamentaux des personnes qu’il gouverne et répondre à leurs besoins en perpétuel changement. L’état de droit favorise la démocratie, l’indépendance judiciaire, la paix, la sécurité, l’ordre et la bonne gouvernance.

L’Etat de droit recule

Bien que les pays africains aient connu un développement humain généralisé et des opportunités économiques en progrès, depuis 2000, l’état de droit s’est détérioré dans un certain nombre de pays, selon l’indice Mo Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG). Bien que dans les médias, le Nigéria soit présenté comme un pays démocratique disposant de très bonnes lois, il est néanmoins regrettable que les tendances à la dictature, à l’autocratie, à la corruption, à la mauvaise gestion et à l’abus des fonctions publiques soient encore très fortes. Résultat des courses : une stagnation socioéconomique et politique générale, des inégalités, de la pauvreté, de la faim, du chômage de masse, bref, du sous-développement subi par la majorité. Afin de s’en sortir, il est urgent de réviser totalement les différents systèmes qui gouvernent le Nigeria.

L’état de droit est un principe selon lequel toutes les personnes, les institutions et les entités sont responsables sur la base des lois qui ont été publiquement promulguées, équitablement appliquées, indépendamment jugées et compatibles avec les principes internationaux des droits de l’homme. Pour la survie et la prospérité de la liberté au Nigeria, ces éléments devraient au moins exister dans notre démocratie.

L’environnement juridique

Les tribunaux jouent un rôle essentiel dans le respect de la loi, en particulier lorsqu’ils sont à l’écoute des griefs exprimés par les groupes minoritaires ou par ceux qui peuvent détenir des opinions minoritaires. Par conséquent, il est besoin urgemment d’un pouvoir judiciaire actif, judicieux et indépendant au Nigéria. L’accès à la justice au Nigéria devrait être assuré et garanti pour tous.

Il convient de noter que la constitution, dans n’importe quel pays, a un impact majeur sur le système judiciaire et l’état de droit. Il est donc proposé que la constitution de 1999 de la république fédérale du Nigeria soit sincèrement amendée pour refléter l’esprit du peuple et le respect des droits des personnes qu’elle cherche à servir. Le chapitre II de la Constitution devrait également devenir applicable et exécutoire en particulier contre l’État. Les agents et les organismes chargés de l’application de la loi ont également un rôle très important à jouer au Nigéria en vue de l’assainissement, de la sauvegarde et de la consolidation de l’état de droit.

Un nécessaire activisme de la société civile

Les masses d’électeurs ainsi devraient voter plus judicieusement et élire des dirigeants désintéressés qui gouvernent conformément à la loi. Les jeunes nigérians devraient devenir plus actifs dans la gouvernance et la prise de décision. L’organisation d’ateliers et de séminaires éducatifs pertinents est très importante et les médias ont un très grand rôle à jouer. Car la plupart des Nigérians et des Africains ne connaissent pas leurs droits donc ne peuvent pas lutter. Mais à l’aide de programmes ciblés avec les médias, une plus grande partie des personnes serait bien informée et éclairée.

D’évidence l’Afrique est bénie et riche. Sachant que l’état de droit est le fondement de la véritable démocratie et de la stabilité socioéconomique dans le monde entier, il est urgent, pour les États africains et le Nigéria en particulier, cherchent à redéfinir et à restructurer leurs objectifs, leurs institutions, leurs structures et le mode de sélection de leurs gouvernants.

Le niveau actuel de corruption, l’abus des droits de l’homme et le manque de respect de l’état de droit en général par les dirigeants politiques au Nigeria n’est pas seulement inquiétant, mais absolument honteux! À cette fin, pour faire avancer la cause de la liberté au Nigéria, les jeunes devraient exiger la reddition des comptes, la transparence, la véritable démocratie et la bonne gouvernance et le respect de l’état de droit. Tous les autres acteurs doivent également devenir très actifs, sinon le statu quo pourrait perdurer, ce qui tuerait dans l’œuf toute aspiration au développement et au progrès.

Victoria Olagbegi-Oloba, analyste pour Africanliberty.
Article publié en collaboration avec Libre Afrique.

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