Liberté, Egalité, Fraternité… Courage !


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Ce que l’on croit acquis car gravé dans le marbre de nos palais nationaux, constitue aujourd’hui et plus que jamais une véritable cause à défendre. Chacun doit se battre pour ces valeurs. L’arme est simple tout en étant radicale : le bulletin de vote.

Par Alexandre et Emmanuel GOUJON*

La France traverse c’est vrai, une période difficile de crise économique, de perte de repères, de craintes par rapport à l’avenir. Dans ce contexte, le triptyque républicain, rappel des valeurs universelles qui font de la France une exception et fondation de notre identité nationale, reste l’unique socle sur lequel la nation française peut se rassembler. D’autant plus que les débats de la campagne présidentielle de 2012 s’annoncent acrimonieux, voire haineux. Ils risquent donc d’approfondir les fractures de la société française, profondément fragilisée et bloquée.

Libertés bafouées et responsabilité zéro

A force de lois opportunistes et de réglementations toujours plus nombreuses, les Libertés individuelles et collectives sont bafouées. Toute initiative relève du parcours du combattant. La Liberté individuelle est de plus en plus limitée en France aujourd’hui au détriment de la responsabilisation des citoyens : le code de la route et le renforcement grandissant de la sécurité routière en sont une dernière illustration. Les nombreuses tentatives de censure de l’Internet en sont une autre. Au lieu d’insister sur le sens des responsabilités de chaque citoyen, on sanctionne tout le monde à cause de l’irresponsabilité de quelques-uns. Idem pour la liberté d’entreprendre. L’aberration est au rendez-vous : des démarches laborieuses, des contrôles multiples pour des broutilles, des organismes nombreux et un suivi administratif qui nuit à la productivité, une législation confuse et mouvante. Autant de freins à la création de richesses et d’emplois.

Egalité massacrée

L’égalité n’est plus qu’un principe théorique dans une France qui a peur. La discrimination est devenue la règle, notamment à cause de la banalisation du discours raciste et de la faillite du système scolaire. Tout le monde stigmatise tout le monde. Les habitants de notre pays sont de plus en plus isolés. Le combat collectif dans l’intérêt général n’apparaît plus possible. La désignation de boucs-émissaires déconstruit le sentiment d’appartenance à une communauté nationale : les exemples ces temps-ci sont légions. Un jour on stigmatise les pauvres, estimant qu’ils coûtent trop cher à l’Etat et devraient travailler gratuitement. Un autre on stigmatise les Noirs ou les Arabes, plus criminels que les autres… Le lendemain ce sont les musulmans qui sont au pilori parce qu’ils sont obligés de prier dans la rue. Le jour d’après, on encourage la vindicte populaire contre les propriétaires de Porsche… A chaque jour son bouc-émissaire. Comment avoir envie de vivre ensemble si la peur de l’autre, l’envie et le mépris dominent ? La stigmatisation systématique occulte en fait la réalité fondamentale des problèmes que nous devrions tous ensemble prendre à bras le corps : égalité salariale entre les hommes et les femmes, lutte contre la délinquance et le trafic de drogue, lutte contre l’échec scolaire et la marginalisation programmée, réforme de l’assiette de financement du filet de sécurité social…

Fraternité ? Solidarité ?

La Fraternité, c’est la capacité de reconnaître en l’autre un frère donc un égal. Avec l’Egalité foulée aux pieds, la Fraternité reste elle aussi toute théorique, même si le système de protection sociale permet encore une redistribution effective, sinon juste, des richesses. Lorsque l’argent et la consommation constituent les valeurs cardinales de la société, la Fraternité n’a plus sa place. C’est l’Homme qu’il convient de remettre au centre du débat politique, dans son intégrité physique, morale et spirituelle. Quand on ne propose que « du pain et des jeux » – compris aujourd’hui comme un salaire ou une indemnisation et une occupation, plus ou moins abrutissante – , nous sommes déjà dans la décadence parce qu’on encourage la passivité et non l’esprit d’initiative et d’entraide. Certains ajoutent au triptyque républicain la solidarité. Pourquoi pas ? Cependant, quand une majorité de Français refusent par exemple la réforme des retraites, ils font indirectement porter sur les plus jeunes le poids financier de cette charge. Ils creusent ainsi le fossé entre les générations. L’individualisme de notre société motive le report systématique des réformes de solidarités sociales. La solidarité se retrouve vidée de son sens.

La peur serait elle la seule réponse aux changements ?

Certes le monde change. Les lignes sont floues. Plus d’ennemi identifié comme le fût le bloc soviétique. Plus de sécurité de l’emploi. Les acquis sociaux nécessairement remis en cause. Autant de nouvelles peurs aggravées par le vieillissement de la population : les anciennes générations sont moins enclines à s’adapter à la réalité d’aujourd’hui et facilement tentées par le mirage d’un monde immuable, le redoutable « âge d’or », le terrible « comme avant ». D’autant que pour la première fois depuis sans doute plus d’un siècle, la jeunesse sait qu’elle est majoritairement en pleine régression sociale et qu’elle va vivre moins bien que ses parents. Et nos hommes et femmes politiques au lieu de montrer la lumière au bout du tunnel et de tirer avantage des richesses multiculturelles de notre histoire et de notre population agitent en permanence la peur de l’autre. La peur, c’est vrai, permet de contrôler. Mais la peur à grande échelle crée la panique.
Dans certains cas elle est déjà là et entraîne la violence. Quand l’autre est un concurrent dans le travail, une menace dans la vie quotidienne et que l’on n’a plus rien à perdre, la violence se déchaîne. C’est une des façons de comprendre la violence grandissante dans les quartiers défavorisés. La peur est pourtant en opposition avec le triptyque républicain : la Liberté, l’Egalité entre les hommes et femmes de notre pays et la Fraternité devraient susciter un sentiment de sain dynamisme, de respect mutuel, l’envie d’avancer car plus personne ne serait seul devant les difficultés. La France regorge d’énergies individuelles contrariées, d’aspirations tuées dans l’œuf, de fiertés étouffées : de l’air, laissez nous vivre, ouvrez les horizons !
Notre société étriquée et le manque de vision provoquent le départ de nombre de jeunes Français qui préfèrent s’exiler, quitter leur patrie, parce qu’ils s’y sentent à l’étroit. Prisonniers de leur image, coincés dans des cadres impérieux qui interdisent les passerelles professionnelles, déçus enfin de l’immobilisme ambiant alors qu’ailleurs tout bouge. Pendant que nous Français restons dans notre bocal à tourner en rond en nous regardant le nombril, la marche du monde s’accélère et la France est à la traîne.

Le Courage

La plupart des Français savent qui ils sont, d’où ils viennent et ne se reconnaissent plus dans les discours extrêmes car ils savent que la solution ne s’y trouve pas. L’enjeu principal de cette nouvelle campagne électorale nationale sera de réconcilier les Français entre eux et avec eux-mêmes. La victoire en dépendra. Le Courage, c’est de remettre la Liberté au cœur de toute action. Le Courage, c’est de responsabiliser chacun, de nous considérer tous comme Egaux, parties intégrantes d’un tout. Le Courage, c’est de réinstaurer le respect de tous. La Fraternité viendra d’elle même car nous avons besoin de tous pour bâtir la France de demain. Avec le triptyque républicain, c’est la justice aussi qui reprendra du service. Ce qui est juste s’évalue à l’aune de notre devise républicaine ! Liberté, Egalité, Fraternité, c’est la force de la France pour elle-même et pour le monde entier. Il faut se réapproprier cette identité là ! Transformer la puissance de ces valeurs universelles en projet commun national et en un nouvel idéal. C’est la clé du progrès de notre pays. Le candidat qui saura s’emparer de cette tâche avec courage et détermination, celui qui réussira à rassurer et à rassembler plutôt que de développer jusqu’à la nausée la théorie du bouc-émissaire, ce candidat courageux a toutes les chances de remporter l’élection présidentielle en s’emparant à nouveau du triptyque républicain.

*Alexandre Goujon est créateur d’entreprises innovantes et consultant

Emmanuel Goujon est consultant, journaliste et écrivain.

Dernier ouvrage paru : L’Imperméable, Vents d’Ailleurs, oct. 2010

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