Le roi et les pompons


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Un boeuf comme amende pour avoir enfreint sa propre loi sur le respect d’une période de chasteté de cinq ans imposée à toutes les femmes vierges du pays, Mswati III, le roi du Swaziland n’est pas au-dessus des lois. Avec déjà sept épouses et une fiancée, il n’a pas pu résister aux charmes de Nonsetselelo, sa nouvelle conquête.

Mswati III, le souverain du Swaziland, n’aura bientôt plus assez de doigts pour porter ses alliances. Avec déjà une femme pour chaque jour de la semaine et une fiancée, il s’est épris de la jeune Nonsetselelo Magongo, 17 ans. Problème : la belle enfant est vierge. Or le roi venait de promulguer juste une semaine auparavant une loi imposant une période de chasteté de cinq ans à toutes les vestales du pays. Qu’à cela ne tienne, il s’est acquitté de l’amende en vigueur pour tout(e)(s) contrevenant(e)(s) : un boeuf bien dodu.

Un quinquennat de chasteté imposée à toutes les vierges du royaume pour lutter contre la pandémie du sida : c’est le pompon ! C’est bien le cas de le dire puisque début novembre, l’homme fort de Mbabane a remis au goût du jour l' » umcwasho « , le pompon de la virginité. Un signe distinctif que toutes les femmes qui n’ont pas encore goûté aux plaisirs de la chair doivent désormais arborer ostensiblement sur un bandeau prévu à cet effet. En dépoussiérant ainsi cette ancienne coutume, Mswati III pense avoir trouvé une solution efficace pour endiguer les affres d’un virus qui décime son peuple.

Une parade maison

L’idée de réhabiliter l' » umcwasho  » n’est pas nouvelle. Déjà le roi Sobhuza, le père de l’actuel souverain, avait imposé à deux reprises le port et le respect de l’  » umcwasho « . Avec un quart de la population (900 000 habitants) aujourd’hui séropositive et déjà vingt mille morts, le Swaziland est l’un des pays les plus touchés par le sida. Maladie déclarée désastre national depuis deux ans par Mswati III. Maladie contre laquelle il oppose aujourd’hui l’abstinence avec la nouvelle ancienne parade maison.

Jaunes et bleus pour les filles en dessous de dix-huit ans, rouges et noirs pour les plus âgées, les pompons doivent garantir et protéger la chasteté de la jeune gent féminine. Précaution supplémentaire, la loi assortit l’  » umcwasho  » à l’interdiction aux femmes de porter des pantalons. Toute personne prise en faute est alors traduite devant un tribunal et devra s’acquitter d’une amende forfaitaire de cent cinquante dollars ou d’un boeuf offert à la communauté. Et il est un délit pour tout homme de courtiser et à fortiori de toucher lesdites vierges du pays.

Mea culpa royal

 » Je reconnais ma responsabilité en ne respectant pas cette coutume « , déclare Mswati III après avoir pris pour fiancée la jeune Magongo. Un mea culpa qui n’est pas intervenu avec la première des spontanéités puisqu’il aura fallu une marche de protestation de trois cents vierges jusqu’au palais royal pour mettre le roi en face de ses responsabilités. Un roi qui n’est pas au-dessus des lois, quand bien même en fût-il l’artisan. Abdiquant sa fierté, il obtempère et choisit de régler sa dette en nature : un boeuf. Si l’amende bovine n’est pas grand chose pour le monarque, elle représente en revanche plusieurs mois de salaires pour l’homme de la rue.

Pour autant, l' » umcwasho  » est loin de faire l’unanimité. Et dans un pays où une fâcheuse et persistante croyance populaire voudrait que l’on guérisse du sida en couchant avec une femme vierge, certaines craignent, ainsi exposées à la vue de tous, une recrudescence de viols aux soi-disant vertus curatives.

Un autre clivage se fait jour dans les différentes réactions et oppose le milieu rural à la ville. Les jeunes Swazilandaises des villes, aux moeurs plus libérées, sont farouchement opposées à ce nouveau diktat social. Beaucoup ont d’ailleurs cru au départ à une bonne blague et beaucoup demain pourraient rire jaune. Mais après tout, ce n’est pas parce que l’on porte des pompons qu’on est obligé de respecter leur commandement d’abstinence. Toute loi est faite pour être enfreinte, comme l’a si bien montré le roi lui-même.

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