Le malaise de la CPI face à Gbagbo


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La Cour pénale internationale (CPI) qui avait affirmé ne pas avoir suffisamment de preuves pour juger Laurent Gbagbo, semble de plus en plus désorientée face à l’ex-Président ivoirien. La Procureur de l’instance internationale, Fatou Bensouda, a indiqué vendredi qu’elle s’est rendue en Côte d’Ivoire pour chercher des informations sur le dossier du prisonnier de la Haye.

A la Cour pénale internationale, on tente toujours de trouver plus d’éléments pour pouvoir juger Laurent Gbagbo. Un véritable malaise semble s’être installé entre l’instance internationale et l’ex-Président ivoirien, emprisonné à la Haye depuis novembre 2011. Elle ne sait plus sur quel tableau jouer pour que ce dernier réponde des crimes contre l’humanité, durant les violences post-électorales de novembre 2010, dont il est soupçonné.

En visite vendredi en Côte d’Ivoire, Fatou Bensouda, la Procureur de la CPI, a rencontré le ministre ivoirien de la Justice, Gnénéma Coulibaly. Et à l’issue de ce tête-à-tête, elle a indiqué s’être rendue dans le pays pour une « mission technique » destinée notamment à rencontrer ceux qui « assistent » la CPI pour « obtenir plus d’informations » dans l’affaire Gbagbo. Déjà début juin, les juges de la CPI ne sont pas parvenus à se mettre en accord sur l’ouverture d’un procès contre l’ancien chef d’Etat, exigeant plus de preuves pour le juger.

Alors va-t-on finir par le juger ou non? C’est la question qui trotte dans l’esprit de ses partisans. Encore nombreux, ils se rendent régulièrement devant la Haye pour réclamer sa libération. «Ils n’ont rien. Le dossier est vide. Ils vont le libérer », lance cette mère de famille ivoirienne, résidant en France, qui ne manque jamais une occasion pour aller soutenir Laurent Gbagbo à la Haye. Aux yeux des adeptes de l’ex-Président, la CPI n’a pas le choix. « Elle va devoir abandonner les charges contre Laurent Gbagbo, car Alassane Ouattara a aussi beaucoup de sang sur les mains.»

Pro-Gbagbo et anti-Gbagbo mobilisés

De son côté, le régime de Ouattara martèle la même phrase : « Il faut laisser la CPI faire son travail ». Histoire de montrer qu’il prend ses distances avec le dossier judiciaire Gbagbo. Et surtout, il tente le tout pour qu’on ne l’accuse pas d’interférer dans cette affaire épineuse et de manquer d’impartialité. Des piques régulièrement lancées par les soutiens de l’ex-dirigeant ivoirien et les ONG de défense des Droits de l’Homme, telles que Human Rights Watch, qui rappellent que pour le moment seuls les pro-Gbagbo ont été mis sur le bancs des accusés.

Si les pro-Gbagbo sont mobilisés pour la libération de l’ancien leader de la Côte d’Ivoire, les associations des victimes de l’ex-chef d’Etat ivoirien le sont tout autant. Elles ont manifesté leur mécontentement à la mi-juin dans les rues d’Abidjan, pour les lenteurs de la CPI dans la confirmation des charges de crime contre l’humanité qui pèsent sur celui qu’elles estiment responsable des morts de la crise post-électorale. « Le procès de M.Gbagbo est égal à une paix durable en Côte d’Ivoire », « Les escadrons de la mort ont tué durant les six mois du blocus. Les mercenaires libériens ont massacré à Mamie Faitai et Andokoi S.O.S », « Pour nos mamans victimes d’Abobo. CPI où est ta crédibilité ? », scandaient les protestataires.

Un remue-ménage qui montre que la réconciliation n’est pas pour tout de suite, en Côte d’Ivoire. Les blessures de la crise post-électorale sont toujours saillantes. Et la CPI qui, pour l’heure, ne sait plus où donner de la tête pour vider le dossier des coupables des crimes commis lors de cette page sombre de l’histoire de la Côte d’Ivoire, n’arrange pas les choses. C’est à se demander si elle n’est pas le verrou qui fait obstacle à la réconciliation.

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