Le blanchiment a la peau dure


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Blanchissez-moi tous ces nègres
Blanchissez-moi tous ces nègres

Le blanchiment de la peau tient ses racines du XVIII ème siècle. Il est aujourd’hui une des marques du traumatisme post-colonial. Ces hommes et femmes de couleur noire, bravant tous les dangers dans l’espoir de ressembler aux canons de la beauté blanche, sont au cœur du dernier ouvrage du journaliste et écrivain ivoirien Serge Bilé, Blanchissez-moi tous ces nègres, paru en mars, aux éditions Pascal Galodé. Il retrace l’histoire de ce phénomène si prégnant dans la société africaine.

« Elle blanchirait un nègre ! ». Au début du 20ème siècle, la « Lessive de la ménagère » utilisa ce slogan publicitaire pour vanter les mérites de son produit. La formule, tirée du dernier ouvrage de Serge Bilé Blanchissez-moi tous ces nègres !, paru aux éditions Pascal Galodé, pourrait illustrer la vision autrefois si négative de la couleur noire, selon l’auteur.

Le livre retrace l’histoire du blanchiment des peaux noires. La frénésie blanchissante de certaines personnes trouverait, selon l’auteur, son origine au XVIIIème siècle. Des scientifiques blancs essayèrent de comprendre et de trouver un moyen de blanchir les gens. Avec des expériences toutes plus farfelues les unes que les autres, au prix de graves séquelles pour les cobayes.

Serge Bilé explique également de quelle manière le discrédit de la couleur de peau noire, très fort pendant la colonisation, a été progressivement intériorisé par les populations noires, au point que des millions de personnes à l’heure actuelle se blanchissent la peau, avec des effets désastreux pour beaucoup d’entre elles.

Ces conséquences (brûlures, destruction de l’épiderme, allant même jusqu’aux cancers), Serge Bilé les explique très bien. Le caractère inconscient de la démarche du client qui achète les produits, aussi. A la fin de l’ouvrage, une enquête sur des utilisateurs de produits blanchissants, organisée en novembre 2009 deux grandes villes du Burkina Faso illustre le mécanisme complexe qui en découle.

A la question « Quel est la raison de ce choix (de se blanchir la peau) ? » Un jeune homme de 20 ans répond : « Je veux ressembler à ceux qui sont beaux ». Lorsqu’il est demandé « Quel effet ça vous fait d’avoir un teint clair ? » Un jeune homme de 27 ans répond : « Je suis un homme haut de gamme ». Les réponses, qui montrent à quel point les utilisateurs de ces produits considèrent la couleur blanche comme étant la meilleure, parlent d’elles mêmes.

Un problème de santé publique passé sous silence

Si certains connaissent les effets parfois désastreux de tels produits la grande majorité les découvre a posteriori. Et les politiques de santé publique, que ce soit en Afrique ou en Europe, restent frileuses à l’idée de mettre en place des actions de sensibilisation (La première grande campagne française n’a eu lieu seulement qu’en 2009, à l’initiative de la mairie de Paris).

Alors entre les petits mensonges enfantins de patients qui consultent les dermatologues et n’osent pas dire qu’ils ont recours au blanchissement, et les attitudes ambiguës des puissances européennes (qui interdisent la vente sur leur territoire mais autorisent la production pour l’exportation), il est difficile de comprendre les raisons d’un tel silence autour d’un si grave problème de santé publique. L’ouvrage de Serge Bilé montre toutes ces ambiguïtés. Le livre aide à avoir une vision globale du phénomène, et les raisons du passage à l’acte sont bien expliquées. Les témoignages, multiples, permettent de cerner le mécanisme inconscient qui se met en place.

Mais le livre, et c’est regrettable, reste parfois trop en superficie du sujet, sans tenter véritablement de l’approfondir.

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