Immigration : l’enfer et le paradis


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Où est l’enfer ? Où est le paradis ? Pour certains candidats à l’immigration clandestine aux Canaries, l’Espagne est devenue le paradis. Dans tous les cas, la porte d’entrée dans ce monde paradisiaque qu’est l’Europe. Cette dernière serait devenue une sorte de nouvelle terre promise…

Où est l’enfer ?

Où est le paradis ?

Pour certains candidats à l’immigration clandestine aux Canaries, l’Espagne est devenue le paradis. Dans tous les cas, la porte d’entrée dans ce monde paradisiaque qu’est l’Europe. Cette dernière serait devenue une sorte de nouvelle terre promise. Un paradis terrestre, cette nouvelle terre d’Eden, ce temple de la consommation de masse ou la vie quotidienne serait facile. Où la gratuité serait la norme. Où la souffrance et la misère auraient été éradiquées, voire abolies. Bref, tout est à portée de main. N’importe qui peut réaliser toutes ses aspirations, tous ses fantasmes de réussite matérielle. Voir Barcelone et mourir, tel semble être le slogan de ces immigrants de troisième type. Le rouge et le bleu, les couleurs de la prestigieuse équipe de football de Barcelone sont devenus leur emblème.

Embarqués dans des pirogues de fortune « affrétées » par quelques trafiquants, par quelques mafieux locaux, ces candidats au paradis dont le seul rêve est de quitter l’enfer africain avec sa torpeur qui, selon eux, ressemble aux flammes de l’enfer chrétien, son cortège de guerres civiles, de pauvreté dévastatrice, sans oublier de misère organisée et entretenue par des ubus indigènes. Sans négliger les pandémies comme le sida ou le paludisme ou la méningite. Tous ces candidats au paradis européen semblent persuader que l’Europe, en général, et l’Espagne en particulier est leur seule issue de survie. Attitude, du reste, qui témoigne de leur désespoir, à laquelle on compatit bien volontiers.

Cependant, on reste en face d’un comportement suicidaire. Comme l’illustre, l’hécatombe provoquée par ces voyages dans des pirogues de fortune, les décès de masse de ces passagers clandestins partis de Mauritanie, du Mali, et maintenant du Sénégal, qui bravant les vagues de l’océan Atlantique au péril de leur vie en tentant de rejoindre ce qu’il croit être le paradis. Et fuir l’enfer africain. Quelques chiffres sur cette catastrophe humanitaire : 1 200 Africains sont arrivés en 45 jours. 40% des pirogues de fortunes font naufrage. Des cadavres sont repêchés dans l’océan.

Entre novembre 2005 et mars 2006 environ 1 200 et 1 300 Africains ont péri. Selon d’autre source, sur les 22 000 Africains qui ont débarqué aux Canaries, un sixième de leurs compagnons de « voyage » sont morts, certains de déshydratation. Il semblerait que 15 OOO Africains subsahariens attendent leur tour pour embarquer vers le paradis espagnol. Et pourtant, l’Europe, ce paradis imaginaire, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas se sont indignés de la régularisation des 600 000 clandestins par le gouvernement socialiste de Zapetero. Désemparée, la vice-premier ministre espagnole, Madame Maria Térésa Fernandez de la Véga s’exclamait : « Ce n’est pas un problème d’un pays, mais celui de tout un continent ».

Un problème de deux continents aurait été plus exact. En effet, l’enfer européen existe. Il suffit d’être confronté à son système d’administration kafkaïen de l’immigration. La carte de résident permanent n’est plus le sésame de naguère. A cela s’ajoute la cruauté de la vie quotidienne. On pense aux problèmes de logement et d’emploi. Aux diplômes qui ne servent à rien… Quant à l’éducation de sa progéniture, cela tourne à la tragédie. Le taux de réussite scolaire dans les milieux immigrés est catastrophique.

C’est pourquoi, pour faire face à cette immigration dangereuse, des mamas africaines se battent pour déconseiller à leurs fils, à leurs frères d’émigrer dans ces conditions et surtout de créer des activités économiques, notamment La pêche, pour les fixer localement les populations candidates au voyage de l’enfer africain à l’enfer européen. Nono Lotange, une des figures emblématiques du mouvement des sans papiers, vient de créer Fraternité, Français, Immigré (FFI) dont le slogan est « Afrique Terre des possibles », afin d’apporter une contribution aux populations candidates à l’immigration en leur fournissant une assistance technique et financière pour créer leur propre activité chez eux.

Toutes ces initiatives témoignent, malgré le drame des Canaries, d’une nouvelle attitude africaine face aux catastrophes humanitaires, au sous-développement et à la pauvreté de masse. Où est l’enfer ? Où est le paradis ? Comme l’écrivait Amadou Kourouma : « Allha n’est pas obligé ».

BOLYA BAENGA

Dernier livre paru : La Profanation des Vagins, Le Serpent à Plumes, 2005

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