« Ayiti dekole » : le Carnaval de Haïti s’envole


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Ce dimanche 19 février 2012 marque le début du grand Carnaval en Haïti. Toute la ville des Cayes dans le département du Sud est remplie d’activités carnavalesques… Vue la situation critique du Champ de Mars de Port-au-Prince, devenu un camp de réfugiés depuis le tremblement de terre, le gouvernement haïtien a jugé nécessaire cette année d’organiser le grand défilé du Carnaval aux Cayes, 3ème ville du pays, située à 200 km au Sud de la capitale.

Comme chaque année, l’organisation du Carnaval est l’occasion de réaliser des costumes splendides, des déguisements étonnants, dont beaucoup évoquent des personnalités de la scène politique haïtienne. Le caractère « politique » du Carnaval est d’ailleurs accentué par le thème choisi pour la manifestation : le décollage d’Haïti…

« Ayiti dekole »

Le slogan « Ayiti dekole » est tiré de la chanson « dekole » ayant annoncé l’album « One life to live » (une vie à vivre) de l’artiste J-Perry, sorti en fin d’année 2011.

Cette chanson, à laquelle participent Hervé Antoine dit Shabba et Réginald Tout-Puissant alias Izolan, « défend » l’image du pays, et fait l’éloge de ses richesses, pour attirer investisseurs et touristes, sans oublier de fustiger les détracteurs d’Haïti. « Ole Ole, decoller ! j’aimerais que mon pays prenne son envol », chantent-ils.

Une tradition profondément ancrée

La tradition du carnaval haïtien remonte au XVIème siècle et à l’arrivée des Français à Saint-Domingue… Cette tradition est bien vivante aujourd’hui : Carnaval est un temps fort pour la société haïtienne : réunions familiales et amicales, défilés, chansons, danses, fêtes… Tous les comportements sont admis, sous le prétexte de l’outrance et de la licence carnavalesque… Il sera toujours temps de faire pénitence ensuite… La libération totale du Carnaval est une jubilation et un vrai élan de vie.

Certains psychologues et sociologues y voient une sorte de récupération, délai nécessaire pour rattraper les interdictions et les règles contraignantes que la société et l’Eglise maintiennent pendant tout le reste de l’année, pour toutes les classes sociales et tous les statuts sociaux…

Le Carnaval constitue donc un moment important de la vie haïtienne, et il couvre une longue période de l’année, par sa préparation d’abord, longue élaboration et fabrication des costumes et des défilés, des danses et des chants, puis par son déchaînement, pendant les 3 jours de réjouissances qui viennent de commencer , culminant dans les défilés ponctués de « merengues » et de chants de toutes sortes…

Michel Martelly: du Carnaval à la Présidence…

Même s’il a perdu de sa vigueur, et certains de ses aspects les plus traditionnels, le Carnaval reste un moment d’exaltation et les bandes musicales surenchérissent dans leurs joyeux refrains, souvent aux franges de la morale et avec beaucoup de liberté vis-à-vis des pouvoirs politiques.
L’actuel président d’Haïti, Michel Martelly, a lui-même souvent utilisé la liberté du Carnaval pour faire entre une voix libre, devenue ainsi très populaire… Au point de le conduire à l’élection.

C’est sans doute pourquoi il a lui-même souhaité que l’orientation du Carnaval soit plus mobilisatrice que critique et appelle « au décollage » d’Haïti… L’idée étant que, pour une fois, plutôt que de compenser frustrations et impatiences, la joie de Carnaval puisse fédérer les énergies au service du relèvement du pays…

Reste que cette année encore, la vitalité du Carnaval est une preuve de la bonne santé du peuple haïtien, qui continue de croire en sa bonne étoile et se relève malgré toutes les catastrophes qui surviennent, pour faire triompher la vie, la générosité, le partage, le jeu et la bonne humeur. Les valeurs mêmes du Carnaval…

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