Au Maroc, un parlementaire qui viole est un homme libre !


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Après être entré dans le cercle privilégié des destinations sexuelles, le Maroc est à présent le nouvel eldorado des violeurs. Et pas n’importe lesquels : les parlementaires.

Hassan Arif est libre ! Ce vendredi après-midi, à la Cour d’appel de Rabat, s’est déroulé l’un des procès les plus grotesques depuis la création des tribunaux. Ce député du parti de l’Union Constitutionnelle et président de la commune d’Aïn Aouda, poursuivi depuis trois ans pour viol sur une fonctionnaire du ministère des Habous, a été condamné à un an de prison par le Tribunal de première instance à Rabat. Mais coup de théâtre ! La Cour d’appel, plutôt que de confirmer, voire même d’augmenter la peine – de cinq à dix ans de prison comme le prévoit l’article 486 du code pénal marocain pour ce genre de crime ou de dix à vingt ans de prison si une défloration s’en est suivie d’après l’article 488 – du premier jugement, a décidé d’acquitter le parlementaire. Tout ceux qui s’imaginent que la justice marocaine est corrompue, à ces gens, je dis qu’ils ont plus que jamais raison.

Ce nouveau cas illustre parfaitement la manière dont fonctionne le système judiciaire au Maroc. Plus vous êtes fortunés et hauts placés, moins d’inquiétude vous aurez à être envoyés en prison. Il y a toutefois certaines exceptions. Car vous pouvez être riches ou bien placés et tout de même jeter dans les geôles du royaume comme un vulgaire malfrat si vous avez le malheur de critiquer l’élu, communément appelé Sa majesté le roi du Maroc Mohamed VI.

C’est donc une affaire sordide de viol. Et la justice a offert sur un plateau d’argent la liberté au premier coupable. Ô Maroc, à quand le changement de tes us et coutumes ? C’est à n’y rien comprendre. Toutes les preuves concernant la culpabilité d’Hassan Arif, qui nie tout en bloc et affirme ne pas connaître la victime si ce n’est dans un contexte « professionnel », étaient pourtant réunies. Maroc Telecom a fourni les preuves écrites de 284 communications téléphoniques passées entre le député et sa victime. La jeune femme, indignée par le comportement schizophrénique du juge, a précisé que le parlementaire mis en cause continue de la harceler au téléphone et par SMS. Mais la plus explicite des preuves est sans aucun doute les tests ADN effectués par le laboratoire de la Gendarmerie royale sur Hassan Arif. Ils révèlent qu’il est bel et bien le père de l’enfant né de ce viol. Ha oui, car dans son élan sexuel, Hassan Arif a enfanté sa victime ! Pour sa défense, Arif a expliqué qu’ « en tant que président de commune et responsable politique », il recevait fréquemment des appels en absence sur son téléphone. Il se devait donc de rappeler sur ces numéros pour en connaître les raisons. Au point de rappeler 284 fois ? Quel dévouement !

Nous parlions de la justice corrompue au Maroc, mais il subsiste tout de même des magistrats, à l’instar du procureur général Youssef Zerhouni Salmouni, qui tentent de sauver le système. A l’audience, Salmouni a tenu a rappeler que l’accusé, un « représentant » du peuple, a non seulement violé l’intégrité physique mais aussi psychique de la victime. Il a mis en avant la gravité de l’affaire en dénonçant la manière dont la défense a agi pour faire de la victime une fabulatrice et en insinuant qu’elle méritait ce qui lui est arrivé. Une situation récurrente dans ce pays où les femmes victimes de viol prennent trop souvent place sur le banc des accusés.

Le procureur général a décidé de faire appel du jugement rendu par la Cour d’Appel. Ce sera donc à la Cour suprême de trancher. Espérons que celle-ci fasse preuve de transparence et de lucidité et qu’elle rende un verdict juste et exemplaire. Un verdict à la hauteur des attentes d’une femme meurtrie à vie et d’un public qui croit ou qui en tout cas essaie de croire en une justice au Maroc. Un pays qui n’appartient pas à un homme, mais à tout un peuple. Un peuple qui ne doit pas craindre de se lever pour que naisse une vraie justice.

Rien n’est fini. Aujourd’hui, Hassan Arif libre. Demain, Hassan Arif condamné !

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