Algérie : le pari perdu de la croissance économique


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arton19488

Les patrons fédérés au sein du Forum des chefs d’entreprises (FCE) ont sonné, hier, le tocsin à l’occasion d’une rencontre-débat ayant pour thème « Quel avenir pour l’entreprise algérienne ? » La situation économique du pays ne fait pas sourire et les « incitations macroéconomique et microéconomiques font défaut pour créer de la croissance ».

Le président du FCE, l’ex-ministre des PME, Réda Hamiani en l’occurrence, n’y est pas allé par quatre chemins pour critiquer la politique économique actuelle du gouvernement marquée par « le gonflement exponentiel du budget d’équipement de l’Etat. Faut-il rappeler que les dépenses d’équipements publics sont passées d’un volume annuel de 453 milliards de dinars en 2002 à 2814 milliards de dinars en 2009.

Cette hausse des dépenses publiques « ne profite que marginalement à l’entreprise algérienne et, par voie de conséquence, ne produit que peu de résultats en termes de croissance économique », selon M. Hamiani. C’est donc, pour M. Hamiani, un investissement de l’Etat dans l’importation puisque « l’explosion de la facture des importations est directement liée à l’augmentation sans précédent du niveau des dépenses d’équipement du budget de l’Etat ». Le président du FCE, qui use habituellement d’un langage diplomatique quand il s’agit de critiquer les actions du gouvernement, ira jusqu’à dire que « l’orientation prise vers un retour graduel à la gestion administrée des importations est une mauvaise solution ». Le FCE, qui a jugé récemment l’instauration du crédoc (lettre de crédit) comme seul moyen de paiement des importations, a estimé, hier, par la voix de son président, que « les mesures censés restreindre l’importation, à l’image de cette obligation de passer par le crédit documentaire, sont des mesures qui, aux yeux des chefs d’entreprise, pénalisent nettement plus les producteurs qu’elles ne contribuent à réduire les importations ». M. Hamiani s’est même interrogé sur « la justesse de la décision du gouvernement de limiter la part étrangère à 49% dans l’investissement lorsqu’elle est autorisée à 70% dans les activités de pur commerce ». Après avoir ainsi balisé le terrain aux intervenants, le professeur Abdelmadjid Bouzidi, lui, n’a fait que noircir davantage le tableau représentant les fondements de l’économie nationale et la vulnérabilité des moteurs de croissance.

Les voyants sont au rouge

Selon M. Bouzidi, « le régime de croissance actuel n’est pas bon. Il est extensif, coûteux et éphémère. C’est-à-dire que l’on injecte massivement des ressources sans pour autant créer de la richesse et le retour sur investissement est faible ». Chiffres à l’appui, le professeur a indiqué que l’écart entre la croissance du secteur hydrocarbures et la croissance hors hydrocarbures est de taille, se situant à -6,6% en 2009 contre 2,3% en 2008. Déchiffrant les autre moteurs de croissance pour le cas Algérie, l’investissement public orienté vers le développement de l’infrastructure représente 84% (soit 10% du PIB) de la totalité des investissements, alors que le privé ne représente que 15% et les IDE (investissements directs étrangers) se limitent à un taux de 1%. Au niveau du Maghreb, l’Algérie se situe loin derrière ses voisins en termes de consommation puisque la moyenne annuelle entre 2005 et 2008 était de l’ordre de 78% du PIB en Tunisie, 75% au Maroc, alors que la proportion ne dépasse pas 44% en Algérie. Sur le plan du commerce extérieur, l’Algérie est audsi le mauvais élève du Maghreb puisqu’elle n’exporte que 184 produits, contre 1193 produits pour la Tunisie et 1120 pour le Maroc. Ceci alors que la dépense publique, fortement critiquée par les patrons du FCE, est la plus importante en Algérie avec au tableau de bord un taux du 45,4% du PIB, alors que la dépense publique en Tunisie représente 27,5% et 28,9% au Maroc. A. Bouzidi a indiqué que « le voile des hydrocarbures risque de se déchirer et nous nous dirigeons droit dans le mur ».

Le président d’honneur du FCE, Omar Ramdane, a, lui, résumé le climat des affaires en trois mots : « Inquiétude, illisibilit et blocages. » Selon lui, la situation économique et des affaires est « pire que celle vécue par les chefs d’entreprise durant les années 1990. Je me pose sérieusement la question : devrai-je continuer ou non ? » Ainsi, il s’avère que le désespoir et l’incertitude sur le plan économique ont atteint même la sphère qui crée la richesse. Economiquement, l’Algérie doit son salut à ses hydrocarbures.

Par Ali Titouche, pour El Watan

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