Afrique : « L’enfant doit rester au cœur des politiques de développement »


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La situation des enfants en Afrique reste préoccupante, en dépit d’un net recul de la mortalité infantile des moins de cinq ans. Pour la directrice adjointe du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, Barbara Bentein, deux solutions existent pourtant : la poursuite des politiques de développement centrées autour de l’enfant et le développement des services sociaux par les États.

L’ Afrique demeure la région la plus mal lotie au regard des indicateurs concernant les droits des enfants dans le monde. C’est ce qui ressort du rapport sur la situation des enfants dans le monde publié ce jeudi par le Fonds des Nations unies pour les enfants (Unicef), à l’occasion des vingt ans de la Convention internationale des droits de l’enfant. En dépit de son adoption massive, celle-ci n’a pas réussi à atteindre ses objectifs en vingt ans. Les droits des enfants continuent d’être bafoués dans le monde, où un milliard d’enfants sont privés d’un ou de plusieurs services essentiels à leur survie, particulièrement en Afrique. Alors que l’Unicef se félicite de la diminution du taux de mortalité infantile des enfants de moins de cinq ans – il est passé de 90 décès à 65 pour 1000 au niveau mondial -, le chiffre demeure plus élevé en Afrique de l’Ouest et centrale où il est de 169 décès pour 1000 naissances.

« La mortalité infantile reste notre défi numéro un en Afrique », déclare Barbara Bentein, drectrice régionale adjointe de l’Unicef pour l’Afrique de l’ Ouest et du Centre. « Des progrès ont été accomplis dans ce domaine puisqu’il y a vingt ans 206 enfants de moins de cinq ans sur 1000 naissances mourraient. Mais on est loin du compte. Deux millions et demi d’enfants en Afrique de l’Ouest et du centre meurent encore de maladies bénignes ou lors d’accouchements. Des morts que l’on pourrait facilement éviter », ajoute-t-elle.

L’enfant doit être une préoccupation majeure des politiques de développement

Selon Barbara Bentein, la Convention a été un moteur de changements politiques, sociaux et culturels sur le continent. Elle a permis à l’enfant, « tout être humain âgé de moins de dix-huit ans », de se voir reconnaître un statut juridique dans chacune des Constitutions nationales des pays signataires. « La Convention a modifié les regards que les gens portaient sur l’enfant. On a reconnu une spécificité de l’enfant. Il y a vingt ans, il y avait peu de programmes destinés à les protéger contre la malnutrition, les conflits, les mutilations génitales. Aujourd’hui, les ONG, les institutions internationales et les États travaillent de concert en ce sens », explique-t-elle.

Comme le mentionne le rapport, certains États africains ont largement contribué au recul de la mortalité infantile dans leurs pays grâce à des politiques nouvelles centrées davantage sur l’enfant. Le Niger a ainsi instauré la gratuité des soins pour les jeunes de zéro à cinq ans depuis 2007, réduisant de 40% le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans. Le Bénin a de son côté vu sa mortalité infantile diminuer de 35% depuis vingt ans. Des avancées de taille rendues possibles par les politiques sociales menées par ces États.

La nécessité de services sociaux de santé et d’éducation

Bien qu’ infime comparée aux autres régions du monde, l’amélioration de la situation des enfants sur le continent sont dues aux efforts des États en matière de programmes sociaux. Le Ghana a ainsi lancé une importante série de mesures sociales complémentaires adressées aux familles les plus vulnérables pour protéger femmes et enfants. Suppression des frais médicaux pour les jeunes enfants, facilitation d’accès à une assurance santé, système de transfert d’argent aux familles les plus démunies, des mesures efficaces qui portent aujourd’hui leurs fruits.

S’il s’avère que ces mesures sont exemplaires, Barbara Bentein souligne qu’elles devraient se multiplier dans les années à venir, ce qui signifie prendre le contre-pied les Politiques d’ajustement structurel (PAS) imposées par les institutions financières internationales dans les années 80. « Le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale (BM) ont appris de leurs erreurs, des effets néfastes causés en Afrique par les PAS. Et la crise financière montre de nouveau les limites de leurs positions passées. Il faut des services sociaux de santé et d’éducation pour améliorer concrètement le quotidien des enfants dans ces pays», estime la directrice régionale adjointe de l’Unicef.

En attendant, il s’agit pour les organisations internationales, les Etats et les ONG de consolider leurs stratégies centrées autour des besoins de l’enfant, comme le préconise le rapport de l’Unicef. Mais le manque de financement, accru par la crise financière de 2008 et la diminution de l’aide au développement, pourrait bien venir assombrir l’horizon de la Convention internationale des droits de l’enfant. Signée à ce jour par 193 états, soit l’ensemble des pays du monde, excepté les États-Unis et la Somalie, elle a été adoptée le 20 novembre 1989. La Convention est le traité le plus ratifié au monde.

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