Mali : « Les otages français sont en danger »


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La France, la coalition africaine et l’armée malienne ont lancé vendredi une opération militaire contre les jihadistes affiliés à Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi). L’intervention militaire aurait permis de reconquérir la ville de Konna, à 600 km de Bamako, la capitale du Mali. Contacté par Afrik.com, Michel Galy, politologue et sociologue spécialiste du Mali, met en garde contre une guerre longue qui risque de se transformer en guerre nomade en se propageant dans tout le Sahel. Interview.

Afrik.com : François Hollande a engagé la France dans une intervention militaire au Nord-Mali. Est-ce que la France est en guerre ?

Michel Galy :
Tout à fait. Même si le gouvernement essaye de ne pas le dire. Cette intervention militaire s’inscrit à la suite des guerres discontinues depuis l’indépendance. J’approuve cette guerre car la situation au Mali est critique. Les islamistes ont décidé de descendre au Sud pour conquérir Bamako. La seule solution c’était l’intervention des anciennes puissances coloniales. Par le biais des mirages, hélicoptères d’assaut et forces spéciales françaises qui interviennent au sol contrairement à ce qui a été dit depuis le mois de janvier 2011.

Afrik.com : Les autorités françaises avaient, en effet, dit et répété que le soutien de la France au Mali se limiterait à une aide logistique. Pourquoi ce revirement ?

Michel Galy :
Il ne faut pas faire de procès d’intention à François Hollande ni à son gouvernement. Ils ont sous estimé la force des jihadistes. Et ont fait confiance aux discours trompeurs des diplomates et militaires qui ne connaissent pas bien l’Afrique. Qui pensaient qu’ils pouvaient séparer Ansar Dine et le MNLA des autres mouvements plus radicaux comme Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique) et le Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest). Soit, les bons islamistes d’un côté, et les mauvais de l’autre. Or, ces islamistes se sont tous alliés pour combattre l’armée malienne et descendre à Bamako.

Afrik.com : Cette alliance islamiste constitue un danger pour la France. Quels sont les risques qu’encoure l’armée française ?

Michel Galy :
Le risque d’une escalade. Au lieu d’une guerre limitée dans le temps et dans l’espace, l’armée française pourrait faire face à une guerre longue. Le pire scénario pour elle, serait de devoir livrer bataille pour un double coup d’Etat : reconquérir, d’une part, le Nord-Mali et ensuite, détruire d’autre part le camp de Kati pour mettre fin au pouvoir du Capitaine Sanogo. Par ailleurs, les otages français risquent leur vie. Les 6000 ressortissants français doivent quitter le Mali, le Mali devient une zone en danger.

Afrik.com : Les risques sont donc nombreux. Est-ce que la France peut essuyer une débâcle ?

Michel Galy :
Non. En termes militaire, il n’y a pas match. Ce qui pourrait être dangereux c’est que la France se mette dans la tête d’envoyer des parachutistes à Gao, Tombouctou et Kidal, les trois régions administratives du Nord-Mali. Essayer de contrôler la région serait très compliqué. Les militaires français peuvent conquérir ces trois villes, mais les islamistes se réfugieront dans le désert et dans les montages. Ce changement de position peut provoquer l’effet de contagion au Niger, en Mauritanie, en Algérie et même dans tout le Sahel. Ce qui déboucherait par une déstabilisation en chaîne entrainant une guerre nomade.

Afrik.com : La France entame sa première guerre sous la présidence de François Hollande. Quel est l’enjeu majeur pour le nouveau président français ?

Michel Galy :
Entre Bangui (la capitale de la Centrafrique) et Bamako, on va voir si la politique de François Hollande s’éloignera ou non de la Françafrique. La politique du nouveau président français peut alors être une continuité de cette relation bilatérale si, par exemple, Bozizé est maintenu au pouvoir en Centrafrique.

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