Nord-Mali : les radios privées interdites de diffusion de musique par les islamistes


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Les islamistes qui occupent depuis près de cinq mois le nord du Mali ont annoncé mercredi 22 août l’interdiction de la diffusion de toute musique dite « profane » sur les radios privées installées dans cette vaste zone désertique où ils entendent appliquer la charia, la loi islamique.

Les versets du Coran ont remplacé les musiques à la mode et les chants traditionnels sur les quelques radios qui continuent à émettre dans le Nord. « Nous, les moudjahidines de Gao, de Tombouctou et de Kidal (les trois régions administratives du Nord, ndlr), nous refusons désormais la diffusion de toute musique occidentale sur les radios en terre d’islam », a déclaré Oussama Ould Abdel Kader, un des porte-parole du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), « C’est la musique de Satan », ont expliqué les responsables du Mujao qui ont pris cette décision. « C’est la charia qui demande ça, il faut faire ce que Dieu demande ».

Tolérant les journaux internationaux, mais pas la musique, un groupe d’hommes armés est même descendu dans les locaux de radio Anya, à Gao, pour leur interdire toute diffusion de programmes musicaux en provenance de France. Les responsables des radios qui se sont exprimés à ce sujet ont expliqué ne rien pouvoir faire contre la force des islamistes. Ces derniers s’en sont fréquemment pris à des hommes des médias ces derniers mois dans le Nord. A radio Aadar, en début de mois, un animateur a été durement tabassé, et a été laissé pour mort par les moudjahidines. Depuis, en signe de soutien, les responsables se sont mis en grève, la radio a préféré se taire plutôt que de se soumettre. Toujours à Gao, « radio Mohamed Askia islamia », remplace dorénavant la radio des jeunes, financée par l’Unicef, récupérée par le Mujao. Depuis plusieurs semaines à Tombouctou et Kidal, les radios internationales ne sont plus reprises et les stations locales de l’ORTM sont fermées ou islamisées. Un grand nombre d’animateurs et de journalistes ont quitté les villes, et quelques-uns sont restés tentant de résister avec courage à cette censure de plus en plus oppressante.

Une politique de Terreur

Après des destructions de monuments saints, un endoctrinement religieux, la multiplication de violence « lapidation, amputation… » au nom de la Charia, c’est au tour de l’interdiction de toute musique en provenance de l’extérieur jugé « profane ». D’après le reportage d’un des Observateurs de France 24 mettant en scène un mariage à Gao dans lequel, on peut observer que pour ne pas s’attirer d’ennuis, les futurs époux ont troqué les longues festivités traditionnelles contre une unique cérémonie religieuse, célébrée dans la plus grande sobriété. Traditionnellement, les mariages au Mali durent plusieurs jours. Les festivités peuvent même s’étaler sur une semaine chez certaines ethnies.

Depuis qu’ils contrôlent la région, les islamistes ont fait savoir que seuls les couples mariés seraient tolérés. Le 20 juin, à Tombouctou, deux personnes qui entretenaient une relation hors mariage ont été punies de 100 coups de fouet. Le soir même, ils annonçaient fièrement que les deux jeunes gens étaient désormais mariés, une union célébrée par celui qui avait exécuté la sentence. Un mois plus tard, dans la ville d’Aguelhok, un couple non marié était condamné à la lapidation. Dans une région où les interdits se multiplient (la télévision, la musique occidentale, le football ou encore la consommation d’alcool et de tabac sont jugés « illicites » par les musulmans extrémistes), les futurs époux font désormais le choix de l’austérité.

Les islamistes du Mujao et d’Ançar Dine (Défenseurs de l’islam), alliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), contrôlent depuis près de cinq mois le Nord du Mali, d’où ils ont évincé les rebelles touareg laïcs.

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