L’étrange cas d’Inge Lynn Collins Bongo


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Inge Lynn Collins Bongo
Inge Lynn Collins Bongo

Aux Etats-Unis, lorsqu’au début du mois de septembre 2009, juste dans la foulée de la contestation des résultats des élections présidentielles donnant Ali Bongo Ondimba vainqueur, les téléspectateurs américains de la chaîne ABC étaient choqués par le comportement de celui qui venait d’être élu au Gabon.

Les Américains étaient choqués non par le fait qu’Ali Bongo Ondimba perpétuait l’oligarchie kleptocrate instituée par son père défunt, mais par ce que révélait l’ex-épouse américaine du président élu du pays qui compte parmi les plus grands producteurs de l’or noir sur le continent africain. Inge Lynn Collins Bongo révéla que non seulement Ali Bongo Ondimba la battait et était bigame (étant encore légalement marié avec elle dans la loi américaine), mais qu’il était aussi un  radin insensible, un mari défaillant à son devoir alimentaire et de soutien à sa première femme abandonné.

Une image illustrant l’article sur l’un des sites d’information répercutant l’interview d’Inge Lynn Collins Bongo la montrait, formulaires entre les mains, dans les bureaux d’assistance sociale du Comté de Riverdale pour y solliciter des coupons de rations alimentaires.

Une honte proverbiale — tant pour le Gabon que pour l’Afrique. Et certains Américains en avaient fait des gorges chaudes sur le danger que couraient les Américaines à épouser des Africains qui, pour la plupart, sont menteurs, escrocs et polygames.

Inge Lynn Collins dit au reporter d’ABC : « Le Gabon est un pays fait de nantis et de démunis, les nantis étaient tous des Bongo… Quand je me plaignais de cette situation, ils se marraient littéralement. Ils pensaient que les Américains étaient idiots pour se soucier des droits de l’homme ». On ne peut que féliciter cette Américaine si pleine de bonté et de générosité qui, malgré son mariage à un « nanti », avait à cœur le sort des damnés de la terre gabonaise.

Le 4 février 2010, le Sous-comité permanent des investigations du Comité sur les affaires intérieures et de la sécurité du Sénat américain a rendu public un rapport de 330 pages titré « Tenir la corruption étrangère hors des Etats-Unis : Quatre études de cas ». Les 4 études de cas sont ainsi énumérés : 1) L’étude de cas Obiang (Guinée équatoriale) ; 2) L’étude de cas Bongo (Gabon) ; 3) L’étude de cas Abubakar (Nigéria) ; et 4) L’étude de cas angolais.

Ces études de cas détaillent la malfaisance financière de certaines « Personnes Politiquement Exposées (PPEs) » africaines qui, se comportant en hors-la-loi financiers, ont enfreint et continuent à enfreindre la loi américaine contre le blanchiment d’argent « en utilisant les services des institutions financières et des professionnels américains pour introduire aux Etats-Unis de grosses sommes provenant de fonds suspects pour servir leurs intérêts ». Dans ce cas, les « fonds suspects », en clair, c’est l’argent volé par les kleptocrates africains des « démunis » de l’Afrique dont le sort préoccupe énormément Inge Lynn Collins Bongo.

Mensonges et blanchiment d’argent

Mais il se fait que la bonne Samaritaine Inge Lynn Collins Bongo est une menteuse fieffée dont l’effronterie dans l’affabulation ne le dispute qu’à sa maîtrise des filières intercontinentales du blanchiment d’argent. Inge Lynn Collins Bongo a non seulement facilité le vol par son mari des démunis de son pays, mais elle a personnellement volé au peuple gabonais plus de 2 millions de dollars sur une période de 10 ans, vol documenté par l’investigation du Sénat américain.

Je dis bien « documenté » car on ne sait avec certitude si elle a d’autres comptes dans des banques offshores ou de l’argent liquide dans des coffres des banques américaines. En effet, Yamilee Bongo-Astier, demi-sœur du Président Ali Bongo et belle-sœur d’Inge Lynn Collins Bongo, « avait 1 millions de dollars en billets froissés de 100 dollars emballés dans son coffre dans une banque » de New York, bien qu’elle se déclarait « étudiante sans emploi ».

Pour sa part, Inge Lynn Collins Bongo « avait accepté de multiples virements offshores dans ses comptes en fiducie et utilisé ce fonds pour maintenir un mode de vie somptueux et déplacer l’argent à travers le réseau des comptes bancaires et des comptes titres à son avantage et à l’avantage de son mari ».

L’analyse du rapport du Sénat sur les activités financières d’Inge Lynn Collins Bongo est accablante : « Pendant dix ans, de 1999 à 2009, Mme Collins Bongo avait un compte en fiducie appelé Collins Trust à Fidelity Investments. De plus, pendant trois ans, de 2000 à 2003, elle avait des comptes Collins Trusts à HSBC. Ces deux institutions financières n’étaient pas au courant de sont statut PPE [Personnes Politiquement Exposées], de son mariage au Ministre de la Défense du Gabon, et de son association avec la famille Bongo au Gabon.

Cette ignorance était due en partie par son utilisation de Collins, au lieu de Bongo, pour ouvrir ses comptes et procéder à ces transactions. Dès l’abord, de 2000 à 2002, Mme Collins Bongo utilisa son fonds commun de placement à Fidelity comme un compte chèques pour déplacer près de 2 millions de dollars à travers le réseau de ses comptes dans d’autres institutions financières. Au cours de la même période, elle utilisa son compte à HSBC pour recevoir des transferts bancaires substantiels totalisant près de 650.000 dollars des banques offshores, sans qu’aucune question ne lui soit posée. Lorsque chacune de ces institutions financières remarqua finalement cette transaction inhabituelle et examina l’activité du compte, chacune d’elles découvrit rapidement le statut PPE de Mme Collins Bongo. Une banque, HSBC, réagit en fermant son compte ; l’autre permit au compte de reste ouvert au vu des fonds infimes qui y restaient et du manque d’activité récente ».

On peut donc arguer que le Président Ali Bondo Ondimba est un voleur, un kleptocrate, un bigame (selon Inge Lynn Collins Bongo), un tricheur des élections (selon l’opposition gabonaise), mais l’homme n’est certainement ni radin ni mari défaillant à son devoir alimentaire et de soutien à sa première femme.

En fait, le rapport du Sénat dit clairement que « de 1999 à 2009 » Inge Lynn Collins Bongo menait des activités financières intenses dans le « réseau » de ses différents comptes bancaires et brassait des millions de dollars (les tableaux détaillés de ses transactions donnés dans le rapport sont étourdissants et montrent des opérations sophistiquées de blanchiment d’argent dignes d’un baron de la drogue latino-américain).

Mais comme le reportage d’ABC montre aussi Inge Lynn Collins Bongo sollicitant et obtenant l’assistance sociale en 2009, qu’elle ne s’étonne pas de voir les autorités californiennes la traîner bientôt en justice pour fraude et larcin des biens publics…

Ali Bongo et Inge Lynn Collins Bongo
Ali Bongo et Inge Lynn Collins Bongo
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