Maroc : les oulémas dénoncent la fatwa sur le mariage « pédophile »


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Le Conseil supérieur des oulémas du Maroc a dénoncé dimanche la fatwa autorisant le mariage des fillettes à partir de l’âge de neuf ans. Quelques heures après cette condamnation, le parquet de Rabat a ouvert une « enquête judiciaire approfondie » sur Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui, l’auteur de l’avis religieux controversé médiatisé début septembre.

La fatwa autorisant le mariage des fillettes à partir de neuf ans provoque de nouvelles protestations. Après les condamnations de plusieurs associations, médias et partis politiques, le Conseil supérieur des oulémas a dénoncé dimanche l’avis religieux que Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui a publié sur le site maghrawi.net.

« Agitateur » et « mystificateur »

Selon des propos rapportés début septembre par le quotidien Al Jarida Al Oula, le leader religieux, jugé salafiste, a expliqué que les fillettes de neuf ans étaient aussi aptes à la vie de couple que les femmes de 20 ans. Il avait appuyé sa théorie en s’appuyant sur l’histoire du Prophète Mahomet, qui se serait marié avec Aïcha alors qu’elle avait neuf ans.

Pour le Conseil des oulémas, Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui, qu’il qualifie d’« agitateur », d’« égaré » et de « mystificateur », oublie une partie importante du récit. « Les hadiths[[Récits rapportant un acte ou une parole du prophète]] cités comme référence à propos du mariage du Prophète » indiquent que l’union et sa consommation se sont déroulées « plusieurs années après l’acte », souligne la plus haute autorité religieuse du Royaume chérifien, seule habilitée à prononcer des fatwas.

Al-Maghraoui persiste et signe

L’instance présidée par le roi Mohamed VI rappelle par ailleurs que l’âge légal pour se marier au Maroc est fixé à 18 ans pour l’homme et la femme depuis l’instauration du nouveau Code de la famille en 2004. Et que, de fait, il ne fallait pas prêter attention à la fatwa de Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui. Un message qu’a relayé jeudi dernier le porte-parole du gouvernement Khalid Naciri lors d’un point presse.

Comment réagit Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui face au déchaînement causé par sa fatwa, assimilée par ses détracteurs à une incitation à la « pédophilie » et au « viol » des enfants ? Apparemment, le religieux n’est pas homme à se laisser abattre. En témoigne son discours tenu le 14 septembre dernier sur maghrawi.net, où il persiste et signe.

« Le mariage des filles à l’âge de neuf ans, a-t-il indiqué, n’est pas interdit puisque, selon les hadiths, Mohamed s’est marié alors qu’Aïcha n’avait que sept ans et il a consommé son union quand elle eut neuf ans. (…) Je suis un théologien confirmé et ce que j’ai dit, je ne l’ai pas inventé. C’est le prophète qui l’a dit avant moi. »

« Enquête judiciaire approfondie »

Et le fondateur de l’association Addaâoua wa Sounna fi Al Coraane (Prédication et sunna dans le coran) de conclure : « Ceux qui me critiquent, comme la presse ou la télévision marocaines ainsi que l’avocat [Mourad Bekkouri] qui a porté plainte, font partie d’une offensive laïque contre la nation islamique et ses théologiens ».

Reste que la perspective d’un procès pourrait se rapprocher pour Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Maghraoui. Outre la plainte de l’avocat Mourad Bekkouri, déposée le 4 septembre, le procureur du roi près le tribunal de première instance de Rabat a ordonné dimanche l’ouverture d’une « enquête judiciaire approfondie ». Une enquête destinée à en savoir plus sur la fatwa et sur la « qualité » qui aurait permis au religieux de la prononcer.

Lire aussi : Scandale au Maroc : une fatwa autorise le mariage « pédophile »

Photo : Tel Quel

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