Les soldats rwandais de retour en RDC


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La communauté internationale multiplie les mises en garde contre les autorités rwandaises, après qu’une centaine de leurs soldats ait été aperçue en territoire congolais. Le Président Paul Kagamé menace depuis le 23 novembre de « s’occuper » des miliciens et ex-soldats hutus rwandais, réfugiés en RDC depuis la fin du génocide de 1994. Jeudi, des combats au nord de Goma, entre des rebelles hutus et des hommes « non identifiés », ont déjà causé la fuite de milliers de personnes.

Paul Kagamé a mis ses menaces à exécution. La présence d’une centaine de soldats de l’armée rwandaise sur le sol congolais, annoncée dès mardi par les autorités congolaises, a été confirmée mercredi par la Monuc (Mission des Nations unies en RDC). Le Président rwandais menaçait depuis le 23 novembre dernier de « s’occuper » des anciens miliciens Interahamwe et des soldats des Forces armées rwandaises (Far), réfugiés en République démocratique du Congo (RDC) depuis la fin du génocide de 1994. Un génocide auquel ils ont pour la plupart participé et qui a fait entre 500 000 et un million de morts. L’accord de Pretoria, signé le 30 juillet 2002 par les chefs d’Etats rwandais et congolais, prévoyait le désarmement de ces rebelles hutus. Depuis le lancement en 2002 de son programme de rapatriement volontaire, la Monuc a rapatrié 11 270 combattants étrangers (rwandais, burundais et ougandais) et leurs familles, dont 3 511 ex-combattants rwandais, selon l’AFP.

Mais les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), fortes d’environ 8 000 hommes, poursuivent leurs attaques. Sur le sol rwandais comme congolais. C’est pourquoi Paul Kagamé a estimé qu’il était tant pour son pays de s’occuper du problème. « Cela ne prendra pas longtemps, ou cela se passe même maintenant », a-il indiqué, mardi, mystérieux, devant le parlement rwandais. Jeudi, des combats entre des rebelles hutus rwandais et des hommes non identifiés ont éclaté au nord de Goma, à l’est de la RDC, provoquant la fuite de milliers de personnes, selon l’Onu.

Craintes d’un embrasement de la région

Les intentions, puis les actions rwandaises, suscitent depuis une semaine les condamnations de la communauté internationale, qui craint un nouvel embrasement de la région. « Toute menace allant contre les engagements pris ou visant à anéantir les efforts en cours est inacceptable et injustifiable (…), d’autant qu’elle aurait des conséquences graves pour le processus en RDC, comme pour la stabilité dans la région », estime la Monuc, à travers un communiqué remis à l’AFP. « Ce phénomène d’infiltration (de soldats rwandais, ndlr) n’a rien de nouveau, mais ça prend une toute autre dimension, l’allure même d’une invasion », ajoute le chef de la mission onusienne, M’Hand Djalouzi. La région des Grands Lacs est en plein processus de stabilisation, après deux guerres de RDC – 1996-1997 et 1998-2003 – qui ont fait selon l’Onu près de 3,3 millions de morts. Le conflit le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale.

Le Rwanda, comme l’Ouganda et le Burundi, ont largement soutenu les rebelles opposés à Kinshasa, faisant même entrer leurs troupes sur le sol congolais. Ce qui leur a permis de piller les richesses minières de cette région. Mercredi, Kampala a annoncé le « déploiement préventif » de soldats ougandais, le long de la frontière avec la RDC, pour prévenir l’incursion d’« éléments négatifs ». Le Président congolais Joseph Kabila a annoncé mardi l’arrivée « dans les tous prochains jours de 10 000 soldats au Nord-Kivu, à la frontière avec le Rwanda. Se voulant rassurant, dans un courrier daté du 25 novembre et adressé au chef de l’Etat nigérian et président de l’Union africaine, Olusegun Obasanjo, Paul Kagamé répète que « l’opération envisagée » visera « strictement les rebelles », et non les soldats congolais. Et qu’elle ne dépassera pas « quatorze jours ».

Le raidissement de Kigali est intervenu une semaine après la conférence des Grands Lacs de Dar es-salaam (Tanzanie), où quatorze chefs d’Etats de la sous-région, sous l’égide du Conseil de sécurité de l’Onu, ont répété leurs intentions d’œuvrer pour la paix. Les Présidents congolais et rwandais se sont rencontrés le 27 novembre dernier, en marge du sommet de la Francophonie de Ouagadougou. Selon des sources citées par l’AFP, le chef de l’Etat rwandais aurait fait trois propositions à son homologue congolais. Autoriser les forces rwandaises à pénétrer en RDC sur une profondeur de 100 à 150 Km. Organiser des troupes conjointes entre les deux pays pour neutraliser les rebelles. Et mettre des troupes rwandaises sous commandement congolais pour effectuer le désarmement. Des propositions que Joseph Kabila aurait toutes trois rejetées.

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