Le ministre de l’Intérieur ivoirien contre le tribalisme dans la Police


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Drapeau de la Côte d'Ivoire
Drapeau de la Côte d'Ivoire

Le ministre ivoirien de l’Intérieur Joseph Dja Blé a affirmé avec force, lundi à Abidjan, qu’il refusait de procéder au recrutement des agents de la Police nationale sur des bases tribales, comme le lui auraient demandé certaines personnalités, dont il a volontairement tu les noms.

« Ils m’ont demandé de ne pas recruter des ressortissants du Nord et de ne retenir à 80% que des gens de ma région. Je n’ai pas accepté cela. Si d’autres ministres l’ont fait, moi je ne le ferai pas », a notamment confié à la presse M. Blé qui est de l’ethnie bété (celle du chef de l’Etat Laurent Gbagbo).

« J’ai trouvé curieux qu’à un concours d’entrée à la Police, les ressortissants du Nord ne soient jamais admis. Cela est impossible, parce qu’ils ne sont pas bêtes. Lorsque je sortais de l’école de Police, le major de ma promotion était un jeune du Nord. Cela veut dire qu’ils ne sont pas nuls », s’est indigné le ministre de l’Intérieur, visiblement écoeuré.

« Alors, je comprends difficilement que depuis quelques années, on organise les concours et que les originaires du Nord ne sont pas admis. Pourquoi sont-ils devenir subitement tous nuls ? » s’est-il encore interrogé, en demandant qu’il soit mis fin à ces pratiques.

« Il faut arrêter ce genre de pratiques qui nous ont conduits à la guerre. Si nous voulons aller à la réconciliation, nous devons y mettre fin. Cette guerre, nous en savons beaucoup, mais allons d’abord à la paix. Quand la paix sera revenue, nous ferons l’histoire de cette guerre, parce que nous savons d’où elle est venue », a-t-il enfin conseillé.

Un pays dans son intégralité

M. Dja Blé, qui revendique sa qualité de « ministre de la République » et non celui d' »une seule région », a donné l’assurance que désormais, tous les candidats originaires du Nord ou de toute autre région seront admis s’ils le méritent et non en fonction d’un quelconque critère tribal.

Le ministre de l’Intérieur du gouvernement ivoirien de transition, qui est lui-même commissaire de Police divisionnaire, réagissait en fait à un article du quotidien « Le temps », proche du camp présidentiel, qui, dans son édition de samedi, avait titré: « Scandale à la Police nationale: Dja Blé recrute 500 rebelles ».

Le quotidien a notamment rapporté que M. Dja avait « reçu de l’état-major du MPCI (NDR: Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire, dirigé par Guillaume Soro), depuis Bouaké, une liste de près de 500 rebelles qu’il aurait pour mission d’intégrer dans la Police ».

Pour le ministre, qui s’est inscrit en faux contre ces « allégations mensongères », il ne s’agissait en fait que d’un « odieux chantage » que ceux qu’il a accusés d’être les commanditaires de l’article, voulaient exercer sur lui après qu’il a fermement rejeté leurs consignes.

Des observateurs retiennent que par ses déclarations, qui ont le mérite de la franchise, voire d’un réel courage dans le contexte particulier que vit le pays, le ministre de l’Intérieur a levé un coin du voile sur des pratiques que la presse d’opposition dénonce régulièrement depuis l’arrivée du président Gbagbo au pouvoir, en octobre 2000.

On estime qu’elles pourraient ne pas être appréciées en haut lieu et dans la « famille policière » où d’aucuns pourraient être tentés de lui reprocher ce « manquement à l’esprit de corps » dans une corporation dont la majorité des agents sont originaires de l’Ouest, son propre « pays ».

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