Burundi : une affaire de viol, d’espionnage et de grève d’avocats


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La justice burundaise a rendu lundi son verdict. Vingt cinq ans de prison pour le français Patrice Faye accusé de viol sur cinq mineures. L’avocate de la partie civile, Me Suzanne Bukuru, a été arrêtée le 15 juillet pour « complicité d’espionnage » dans le cadre de ce dossier. Ses collègues du barreau ont entamé lundi une grève d’une semaine pour soutenir leur consœur.

Une affaire qui fait du bruit au Burundi. Le Français Patrice Faye, une personnalité locale, a été condamné lundi à 25 ans de prison et 14 000 euros de dommages et intérêts pour le viol de cinq mineures dans le cadre de ses activités de bienfaisance envers des enfants et adolescents victimes de guerre, orphelins du sida ou souffrant de la pauvreté. Le procureur du tribunal de grande instance de Bujumbura avait requis 35 ans de prison. Le célèbre animateur à la télévision nationale de 58 ans, détenu depuis le 4 avril à la prison de Mpimba, à Bujumbura, clame son innocence.

Son avocat, Me Fabien Segatwa a déclaré que son client avait été « choqué par le verdict du Tribunal (qui) se fonde sur de fausses accusations ». « Les juges eux-mêmes disent que les témoignages sont contradictoires. Malgré cela, ils condamnent quelqu’un à 25 ans de prison. Condamner quelqu’un qui a déjà plus de 50 ans à 25 ans de prison, c’est le condamner à mort », a-t-il affirmé. L’aventurier et documentaliste lyonnais (est de la France) est arrivé au Burundi il y a une trentaine d’année et y a formé des troupes de théâtre et une école.

La France a réagi à cette affaire. Bernard Valéro, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a déclaré que la France était inquiète « par les conditions dans lesquelles la procédure qui a mené à cette décision s’est déroulée », rapporte ce mardi Reuters. Il a ajouté que Paris veillerait à ce que Patrice Faye bénéficie d’une « protection consulaire et… à la préservation de ses droits, notamment son droit de bénéficier d’une défense équitable », toujours selon l’agence de presse.

L’avocate de la partie civile accusée de «complicité d’espionnage»

Dans la même journée, les avocats du barreau ont entamé une grève d’une semaine pour soutenir leur consœur, Me Suzanne Bukuru, incarcéré le 15 juillet. Une centaine d’hommes en robe noire ont manifesté une heure devant le palais de justice de Bujumbura pour exiger la libération de l’avocate de la partie civile dans l’affaire Patrice Faye. « Les avocats ont décidé, au cours d’une assemblée générale, de suspendre depuis aujourd’hui (lundi) jusqu’à vendredi toute participation aux audiences publiques au Burundi en signe de protestation et d’indignation face à une justice qui torpille et persécute ses propres défenseurs », a annoncé le président du barreau, Me Isidore Rufyikiri.

Suzanne Bukuru est accusée par la justice burundaise de « complicité d’espionnage » pour avoir collaboré avec des journalistes de la chaîne de télévision française M6 en mission d’investigation sur l’affaire Patrice Faye. Me Bukuru affirme pour sa part qu’elle n’a fait que faciliter le travail de journalistes qui ont eu l’accréditation de la part du Conseil National de la Communication.

La justice burundaise serait soumise à de fortes pressions des autorités françaises d’après RFI qui rapporte les propos du porte-parole de la Cour suprême du Burundi, Elie Ntungwanayo : « Il faut nuancer, il faut relativiser les choses. Patrice Faye a été condamné par un premier jugement, il a donc le droit d’exercer un recours devant la juridiction d’appel, a-t-il assuré. La condamnation n’est pas définitive tant que les voies de recours ne sont pas épuisées ». L’affaire Patrice Faye a déjà fait quelques dommages collatéraux au Burundi.

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