Journal d’un Vert sénégalais en campagne


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Drapeau du Sénégal
Drapeau du Sénégal

Le Rassemblement des écologistes du Sénégal – « Les Verts » bat la campagne en vue des prochaines législatives. Il espère bien décrocher une place au sein de la prochaine Assemblée. Chronique d’une journée de campagne.

Il est 8 heures et des poussières. La journée d’Ousmane Sow Huchard, tête de liste du Rassemblement des écologistes du Sénégal – Les Verts, commence sur les chapeaux de roues. Comme chaque matin, depuis le début de la campagne des législatives sénégalaises, le 7 avril dernier, il va retrouver son directoire de campagne. Un staff de douze personnes milite activement pour que cette première participation à un scrutin électoral ne soit pas la dernière.

« Les présidentielles ont eu lieu six mois après la naissance de notre parti, le 10 août 1999. Nous n’étions pas prêts, même pour une participation symbolique. Nous avons préféré attendre les législatives », explique Ousmane Sow Huchard, historien de l’art, anthropologue, musicologue et muséologue, également connu en tant qu’auteur-compositeur-interprète.

Parcours atypique

On a à peine le temps de s’étonner d’un tel parcours : « Pendant dix ans, j’ai été conservateur de musée. Pour moi, la conservation du patrimoine culturel va de pair avec celle du patrimoine naturel. Je suis écologiste depuis 30 ou 40 ans mais je n’avais jamais fait de politique. C’est en constatant l’état de dégradation de notre environnement qu’avec des amis universitaires et chercheurs, nous avons décidé qu’il était temps, à l’aube du troisième millénaire, de porter le discours de l’écologie politique dans notre pays. »

La matinée avance. Ousmane se rend sur le terrain. « Dans notre programme, nous avons décidé de parcourir l’ensemble des dix régions du pays. Nous sommes allés de Thiès à Touba, en passant par Rufisque et la Casamance. Ce qui m’a particulièrement touché car je suis né à Ziguinchor. » Pour l’heure, il ne reste plus que deux jours de campagne, celle-ci se clôture ce vendredi. La tension est à son comble.

Citoyenneté active

« C’est la partie la plus intense », glisse la tête de liste des Verts. « Pour boucler notre campagne, nous restons à Dakar. Nous prévoyons une intervention au sein de l’Université lors de laquelle nous passerons des films sur la protection du milieu marin et des ressources halieutiques par exemple. Pour susciter une réflexion chez les spectateurs, amorcer un débat. Les gens accrochent car nous ne leur racontons pas d’histoires. Ils identifient très vite les lieux filmés. »

Travailler sur la proximité est le maître-mot des Verts sénégalais. Ils refusent donc de se prêter au jeu des meetings-bains de foule qui attirent plus les jeunes avec des vedettes et de la musique qu’avec des idées. A Dakar, les écologistes ont ciblé les quartiers les plus en difficulté. L’approche se déroule ainsi : « Nous traçons un cercle de 10 mètres de diamètre, nous nous installons et nous discutons avec la population. Nous mettons à plat tous les problèmes. Nous sommes accompagnés par une équipe de télévision et nous donnons la parole aux gens pour qu’ils expriment leurs problèmes. Puis nous tentons de les expliquer : vous vivez dans l’insalubrité à cause des déchets, des tas d’ordures qui jonchent les rues. Nous leur conseillons d’aimer leur cadre de vie et de le protéger. C’est ça, la citoyenneté active », explique Ousmane.

Nous sommes tous des écologistes

Les Verts sénégalais prêchent un slogan simple : « Nous sommes tous des écologistes ». Convaincus qu’en chaque Sénégalais sommeille un écologiste, ils souhaitent réveiller cette conscience écologiste et la faire grandir par l’éducation et la sensibilisation. Afin de construire un « Sénégal vert, divers et solidaire ». Qui protège l’environnement, respecte les minorités et la diversité ethnique, se tourne vers une économie qui intègre la solidarité au sein du tissu social du pays. Leur formation même – qui rassemble aussi bien des agriculteurs biologiques que des gens qui combattent l’insalubrité ou des anti-tabagistes — est un modèle d’intégration et de tolérance. « Notre 2ème tête de liste est d’origine libano-sénégalaise, notre 3ème tête de liste est une femme. Nous sommes les seuls à défendre la parité », insiste Ousmane.

A la suite de leurs différentes interventions journalières, les Verts choisissent ce qui passera dans leur intervention télévisée du soir car le Haut Conseil de l’Audiovisuel (HCA) a attribué à chaque parti 5 minutes d’antenne tous les jours. 19h : point de la journée au siège du parti. Jusque tard dans la nuit, les conversations continueront. Jusqu’à la dernière heure, les militants ne ménageront pas leur peine. « Si nous avons un seul député à l’issue des législatives, nous serons heureux. Nous souhaitons porter le discours de l’écologie politique au sein de la nouvelle Assemblée. »

Conscients d’être une force émergente, « les Verts sont le dernier rempart contre l’exclusion et la misère. Contre des comportements qui méprisent la nature et les hommes », clame Ousmane Sow Huchard. Il ne reste plus qu’à convaincre les Sénégalais.

Pour aller plus loin : lire notre dossier Les Verts poussent en Afrique

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