Cameroun : une association améliore les conditions de vie des détenus


Lecture 8 min.
arton25176

Daniel Moundzego, président de l’Association des Réfugiés Sans Frontières (RSF) et Coordonnateur du Projet 3 DACDET (Défense des Droits des Personnes Détenues et Amélioration de leurs Conditions de Détention au Cameroun) vient une fois de plus de poser un geste remarquable à la Prison Centrale de Douala. Il répond aux questions d’afrik.com.

Afrik.com : Monsieur Daniel Moundzego, que témoignait la présence de votre Organisation le 16 Mars 2012 à la Prison Centrale de Douala ?

Daniel Moundzego
: L’Organisation dont j’ai la charge, « l’Association des Réfugiés Sans Frontières », dans le souci d’améliorer les conditions de détention des détenus en terre camerounaise, a organisé vendredi 16 mars à 11 heures, une cérémonie officielle de remise de l’Assistance alimentaire, vestimentaire et médicale à 265 détenus vulnérables de la Prison Centrale de Douala que nous avions identifié grâce à la collaboration avec les services de Monsieur Dieudonné Engonga Mintsang, Régisseur de ladite Prison.

Notre présence en ce jour , dans ce lieu de détention, après la cérémonie de libération de 28 détenus vulnérables le 29 décembre 2011 et la visite des quartiers des femmes, des mineurs et des condamnés à mort en compagnie de la Chargée de la Gouvernance de la Délégation de l’Union Européenne au Cameroun, le 19 janvier 2012, est la manifestation de la volonté de l’Administration Camerounaise d’accompagner et d’appuyer les actions de la société civile dans la recherche du bien être, de la promotion et la protection des droits de l’homme dans le milieu carcéral.

C’est aussi l’indicateur de l’effet du plaidoyer que mène l’Association des Réfugiés Sans Frontières en direction des autorités de la République du Cameroun pour le respect des droits de l’homme en milieu carcéral et l’amélioration des conditions de détention des détenus.

Cette cérémonie vient après celle que nous avions organisée à Maroua, le 23 février 2012, sous le patronage de Monsieur le Préfet de la Diamaré.

Afrik.com : Qu’aviez-vous remis aux 265 détenus vulnérables du Pénitencier de Douala ?

Daniel Moundzego
: Comme nous avions dit aux pensionnaires de ce pénitencier, le 29 décembre 2011, ils ne doivent pas perdre l’espoir. Nous y étions partis avec un peu de tapioca, de sucre, de riz, d’huile d’arachides, de savons, de savonnettes sanitaires, de savons rouges, de kits hygiéniques, de sel, de cahiers et stylos à bille, de cubes Maggi, de brosses à dents. Chacun des 265 détenus vulnérables avait reçu un sac banco. Mais nous n’avions pas oublié les quartiers de la prison centrale de Douala. Sept sacs de 50 kilos de riz et un sac de 100kg plus un demi sac de tapioca leur avaient été remis.

Afrik.com : Quel était l’objectif de cette cérémonie à laquelle les hommes et femmes de médias étaient fortement impliqués?

Daniel Moundzego
: L’objectif de cette cérémonie était de susciter le réveil de la conscience populaire sur les enjeux de la solidarité primitive, du respect des droits des personnes détenues et l’amélioration de leurs conditions de détention.

Nous voulions amener, à travers l’action des médias, de la presse et du téléphone arabe, les citoyens, les citoyennes et les autres parties prenantes, à comprendre que Dieu nous a créé tous et nous a demandé de nous aimer les uns les autres comme il nous aime. L’Amour du prochain n’a de sens qu’avec le donné.

La remise de l’assistance alimentaire, vestimentaire et sanitaire aux 265 détenus vulnérables identifiés, est notre façon de témoigner l’Amour que nous avons envers les détenus qui vivent un calvaire d’absence de visite, d’abandon de la famille, etc.

Afrik.com : Aimeriez-vous être plus fréquents au quotidien auprès des détenus ?

Daniel Moundzego
: Oui, nous aurions aimé être plus fréquents au quotidien auprès des détenus. Malheureusement, la volonté ne suffit pas, il faut des moyens pour être à la hauteur des attentes de nombreux détenus vulnérables.

Nous y sommes allés le 16 mars dernier, grâce à l’Union Européenne qui, à travers sa Commission a financé un projet que l’Association des Réfugiés Sans Frontières avait élaboré en vue de venir en aide aux détenus vulnérables des prisons centrales de Douala, Yaoundé et Maroua. Le projet dure seulement deux ans et les moyens financiers ne sont pas disponibles en permanence. En ce moment, nous avons bouclé la première phase et nous espérons obtenir de l’Union Européenne, dans les meilleurs délais, les moyens financiers pour continuer à être à leurs côtés.

Qu’à cela ne tienne, chaque fois que nous aurons quelque chose, nous irons les voir.

Afrik.com : Comment procédez-vous pour mieux connaître les réalités du milieu carcéral ?

Daniel Moundzego
: En étant proche des détenus depuis longtemps, nous connaissons les réalités du milieu carcéral à travers leurs témoignages, leurs interpellations, leurs cris de détresse.

Afrik.com : Avez-vous déjà identifié quelques difficultés rencontrées par les détenus de la Prison Centrale de Douala? Et quelle solution comptez-vous apporter ?

Daniel Moundzego
: Oui, nous avons déjà identifié quelques difficultés rencontrées par les détenus de la Prison Centrale de Douala. Il y a entre autres : la surpopulation, les maladies, surtout la maladie « debout debout » pour les sans abris, l’absence de visite, l’abandon de la famille, la difficulté d’avoir les documents administratifs (Carte Nationale d’Identité par exemple) pour les détenus vulnérables qui sont libérés, il y a aussi la stigmatisation des familles et de la société envers les détenus libérés.

En tant qu’interface, nous avons besoin du soutien et d’appui. Tous ceux qui vivent sur le territoire camerounais ont un rôle à jouer pour humaniser les prisons et les lieux de détention.

L’Association des Réfugiés Sans Frontières appelle à un élan de solidarité et de pardon à l’endroit des personnes qui sont en conflit avec la loi. Ces personnes qui ont perdu le droit à la liberté d’aller et de venir sont des êtres humains comme nous et qui conservent le droit à la vie, le droit à la santé, le droit à la dignité, le droit à une alimentation équilibrée, le droit à un environnement saint, le droit à un traitement humain, le droit à une justice équitable qui se fait dans le respect des prescriptions du code de procédure pénale. Bref, de tous les autres droits fondamentaux.

Afrik.com : Vos exhortations à l’endroit des plus hautes autorités de l’Etat camerounais et aux détenus?

Daniel Moundzego
: Nous exhortons les plus hautes autorités de l’Etat camerounais d’aller plus loin en augmentant le budget de l’Administration Pénitentiaire et de la Justice, en améliorant les conditions de travail du personnel pénitentiaire et de la justice, en rimant l’Administration pénitentiaire et la justice aux exigences de la modernité avec l’usage des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication afin de réduire considérablement les dysfonctionnements dont les traits caractéristiques sont la lenteur des procédures judiciaires et juridiques et les longues détentions préventives.

C’est certain, le gouvernement s’emploie et le Chef de l’Etat donne de plus en plus un clin d’œil que nous constatons par les changements importants dans la décision au niveau de la justice et de l’administration pénitentiaire.

Oui, l’Union européenne fait beaucoup dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’homme. Mais la solution est camerounaise. Nous ne cesserons d’exhorter les hommes d’affaires, les personnes nanties camerounaises à soutenir les efforts du gouvernement et surtout à appuyer les organisations de la société civile comme la nôtre.

Aux détenus, nous disons qu’ils ont des droits, mais ils ont aussi des devoirs. Nous les invitons à la repentance véritable et à la nouvelle naissance. En pratiquant l’Amour de Dieu, ils seront épargnés des fruits de la paresse et de l’oisiveté qui conduisent à la perdition. Le Cameroun a besoin d’eux quand ils seront redevenus de vrais citoyens.

Nous ne cesserons de dire et de reconnaître l’évolution positive du dialogue entre l’Administration et l’Association des Réfugiés Sans Frontières. Dialogue grâce auquel nous pouvons continuer d’apporter notre modeste contribution pour le bien être des personnes détenues au Cameroun.

Nous espérons vivement que cette évolution se traduira par des décisions au plus haut niveau pour élargir le champ d’accès libre des lieux de détention aux organisations de défense des droits de l’homme, autre que la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés.

Afrik.com : Un autre message à l’endroit du Premier Magistrat de la République du Cameroun ?

Daniel Moundzego
: Non, nous ne faisons que réitérer notre appel à l’endroit du Premier Magistrat dont la teneur suit : « Monsieur le Président de la République, l’environnement carcéral est la vitrine et le baromètre de la démocratie et de l’Etat de droit. Vous faites déjà beaucoup. L’opinion internationale a récemment reconnu une avancée significative de respect des droits de l’homme au Cameroun. Mais nous vous exhortons à améliorer la qualité et les conditions de travail du personnel pénitentiaire, de délocaliser les prisons urbaines, d’augmenter le budget de l’administration pénitentiaire et de la Justice, de veiller à l’application du code de procédure pénale notamment l’habeas corpus et de fournir en médicaments essentiels les infirmeries de prison ».

Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News