Omar el-Béchir contre la CPI : dilemme entre paix et justice


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Le chef de l’Etat soudanais Omar el-Béchir est toujours libre ce vendredi en terre tchadienne où il participe au sommet de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (CEN-SAD). L’Union européenne (UE) a pourtant exhorté jeudi le Tchad à respecter ses obligations vis-à-vis de la Cour pénale internationale (CPI) en arrêtant le raïs soudanais. Mais N’Djamena joue la carte de la réconciliation. A l’instar de l’Union africaine (UA) qui refuse, elle aussi, de coopérer avec l’instance pénale internationale afin de préserver la paix au Soudan.

Le président Omar el-Béchir est au Tchad ce vendredi depuis deux jours, mais ne risque pas d’être privé de sa liberté à cause du mandat d’arrêt lancé à son encontre par la Cour pénale internationale (CPI). Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l’Union européenne, a enjoint jeudi le Tchad d’arrêter le raïs soudanais en vertu des mandats émis contre lui par la CPI. N’Djamena est signataire du traité de Rome, ce qui l’engage à respecter les décisions de la juridiction basée à La Haye. « Les crimes les plus graves pour la communauté internationale dans son ensemble, comme le génocide, les crimes contre l’humanité et crimes de guerre, ne doivent pas rester impunis. Les poursuites doivent être garanties par des mesures tant nationales qu’internationales », a indiqué Catherine Ashton dans un communiqué. Le chef de l’Etat soudanais est sous le coup de deux mandats d’arrêt émanant de la CPI. Le premier a été émis le 4 mars 2009 pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et le second le 12 juillet pour génocide au Darfour, région de l’ouest du Soudan en proie à une guerre civile depuis 2003.

Le ministre tchadien de l’Intérieur, Ahmat Mahamat Bachir, avait assuré ce mercredi qu’Omar el-Béchir n’aurait « rien à craindre » durant son séjour à N’Djamena où le chef de l’Etat soudanais a pris part au sommet de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (Cen-Sad) qui s’achève ce vendredi au Tchad. Idriss Déby Itno, son homologue tchadien, privilégie ainsi son récent rapprochement avec le Soudan. Les deux pays sont en effet dans un processus de réconciliation, après cinq années de guerre larvée par rebelles interposés. La lune de miel soudano-tchadienne a débuté en janvier dernier avec la signature d’un « accord de normalisation », assorti d’un protocole de sécurisation de la frontière commune aux deux pays. Le président Omar el-Béchir a d’ailleurs rencontré ce vendredi les chefs de cette force militaire mixte. « Nous sommes déployés depuis six mois de part et d’autre de la frontière. La collaboration entre nos deux forces se passe très bien », a confié au président soudanais le général tchadien Bob Bichara, commandant en second de la force dirigée par le colonel Abdallah Fatalrahim du Soudan. Chacun des deux chefs d’Etat avait maintes fois appelé les rebelles qu’il protégeait à déposer les armes. Khartoum a ainsi expulsé, ce mardi, trois des leaders de la rébellion tchadienne en direction de Doha, au Qatar.

« Nous ne sommes pas contre la Cour pénale internationale »

Outre le Tchad, l’Union africaine (UA) est aussi un soutien pour Omar el-Béchir contre la CPI. Les motivations de l’organisation panafricaine diffèrent néanmoins. Le président de la Commission de l’UA, Jean Ping a accusé la Cour pénale internationale « d’acharnement sur l’Afrique ». En précisant que les membres de l’UA étaient nombreux à être des Etats signataires du Traité de Rome, Jean Ping a expliqué ce vendredi son point de vue, avant le sommet de l’UA qui se tiendra du 25 au 27 juillet à Kampala, en Ouganda. « Nous ne sommes pas contre la Cour pénale internationale », a-t-il déclaré. « Nous devons trouver un moyen pour ces entités (Sud et Nord Soudan) de travailler ensemble et de ne pas recommencer la guerre, et c’est ce que nous faisons, mais M. Ocampo (procureur de la CPI) n’en a rien à faire ».

A l’approche du référendum du Sud-Soudan sur son indépendance, l’UA privilégie le maintien de la paix dans ce pays. Elle a par conséquent demandé aux Nations unies de « différer la procédure lancée par la CPI contre le Président el?Béchir » dans un communiqué. L’UA reste ferme sur ses position depuis l’émission du premier mandat contre Omar el-Béchir. Le raïs soudanais pourrait encore défier la CPI. Il est invité dimanche à prendre part au sommet de l’UA qui se tient dans un pays signataire du Traité de Rome. En octobre dernier, il avait néanmoins renoncé à se rendre en Ouganda.

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