Tortures policières en Egypte


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Drapeau de l'Egypte
Drapeau de l'Egypte

C’est à travers son blog que le journaliste indépendant égyptien Wael Abbas a pu réveler une affaire de torture et de viol commis par des policiers dans l’exercice de leurs fonctions. L’amorce d’une affaire d’Etat ?

Tout commence lorsqu’en janvier 2006 un jeune chauffeur de taxi de 21 ans, Emad al-Kabir, est arrêté par des policiers du quartier populaire de Boulaq, au Caire. Détenu quarante-huit heures, il subit durant sa détention plusieurs séances de coups et de torture, incluant un viol à l’aide d’un baton. Relâché sans charge retenue contre lui, Emad Al-Kabir se serait sans doute toujours tu, comme tant d’autres victimes de violences policières en Egypte.

Mais ses bourreaux avaient filmé la scène à l’aide d’un téléphone portable, et ils pensèrent parfaire leur travail d’humiliation et d’intimidation, en toute impunité, en faisant circuler ces images dans son quartier. Selon l’avocat d’Emad al-Kabir, ils voulaient que ces images barbares « servent d’exemple ».

C’était compter sans le courage et le civisme du journaliste indépendant Wael Abbas, 32 ans, dont le « blog » est aujourd’hui parmi les plus fréquentés d’Egypte. Son objectif, qu’aucun journaliste ne reniera : « rendre les informations publiques et inciter les gens à témoigner ». Dès qu’il en a eu connaissance, il n’a pas hésité à diffuser ces images pour dénoncer les pratiques des policiers. Son objectif : « rappeler à mes compatriotes qu’ils ont des droits ».

Objectif atteint : l’information est reprise par un quotidien indépendant, Al-Fajr, qui complète son enquête, et elle conduit à une prise de conscience plus large des dérives policières en Egypte. Déjà, le livre fameux d’Alaa el-Aswany, L’immeuble Yacoubian, et le film qui l’a adapté, avaient levé un coin du voile sur ces atteintes fréquentes aux Droits de l’Homme dans les commissariats égyptiens. Mais la force des images saisies sur le vif par les auteurs des faits donne à l’information une puissance décuplée. La dénonciation devient évidence, le scandale éclate.

Du coup, la plainte déposée par Emad Al-Kabir va devoir être instruite, les deux jeunes policiers qui l’ont ainsi torturé et violé vont devoir répondre de leurs actes, ils sont aujourd’hui sous les verrous et le Ministère de l’Intérieur, cessant de les couvrir, a annoncé dans un communiqué qu’il s’en remettait à la décision de la justice, « quelle qu’elle soit ». Jugement le 3 mars.

Au delà des pratiques qu’elle révèle, et qui seraient monnaie courante parmi les policiers du Caire, l’affaire Emad Al-Kabir prouve autre chose : l’importance que revêt aujourd’hui, dans tous les pays du monde, l’information indépendante délivrée via Internet.

Autant il était possible de faire taire un journal de presse écrite et de censurer l’audiovisuel, autant il est difficile de masquer les faits, dès lors qu’ils sont visibles sur des blogs. Ainsi les nouveaux médias deviennent-ils l’arme ultime des defenseurs des Droits de l’Homme…

Nouveaux organes d’information, au service de l’actualité directe, en prise directe sur le réel, les blogs sont aujourd’hui les alliés du Droit contre l’arbitraire et l’injustice. Malik Moustafa, autre « journaliste blog » égyptien, parle pour cette nouvelle pratique de « journalisme populaire », libéré de toute censure… Wael Abbas n’est pas isolé, et son courage vient secouer la torpeur civique : il mérite d’être salué, encouragé, imité !

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