Tiken Jah Fakoly : versant intense de la liberté


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La magnifique salle de concert parisienne était comble jeudi 25 novembre pour le passage de Tiken Jah Fakoly : l’émotion était palpable dans la foule qui reprenait les paroles puissantes d’une voix qui symbolise pour beaucoup d’Africains le courage et la liberté.

Il y a une magie Tiken Jah : elle est dans la force tranquille d’un chant. Un chant qui depuis plusieurs années s’est élevé pour « dire Non en chanson », pour dénoncer sans haine les dérives de l’Afrique contemporaine, au point d’incarner la révolte et la liberté -« contre les puissants du jour ou de la veille » comme disait Thomas Sankara quand il dénonçait à la fois les politiques corrompus et les complices du colonialisme.

La magie Tiken Jah a enflammé La Cigale, dans une forme de communion impressionnante. Pour paraphraser le titre du grand livre de Mahmoud Hussein, classique de la littérature politique des indépendances, le chanteur ivoirien a fait gravir à son public le « versant intense de la liberté » : le moment où, après la révolte des premiers albums, il faut attaquer plus directement les maux les plus profonds, et devenir authentiquement révolutionnaires.

Avec « Révolution africaine« , Tiken Jah Fakoly aborde en effet la phase la plus constructive de la revendication politique : l’appel à l’éducation, comme moyen de libérer les esprits et d’achever le processus démocratique. L’appel à la lucidité, avec « Sors de ma télé« , décryptage ironique des discours politiciens cyniquement mensongers. L’appel à la mobilisation collective, avec « Il faut se lever« , qui mériterait de devenir l’hymne de tous ceux qui, sur le continent ou ailleurs, décident de s’engager pour « changer tout ça », l’appel au vote, comme moyen légitime d’affirmation de la volonté de faire bouger la société.

Discours de responsabilité, dont l’intelligence est servie par une inspiration musicale impeccable, à laquelle pas un spectateur ne pouvait rester indifférent : à quoi servaient les fauteuils de La Cigale, quand toute la salle debout reprenait en dansant la formule magique « Il faut se lever », appel vibrant à la jeunesse africaine pour prendre en main ses destinées.

La magie Tiken Jah est d’autant plus puissante qu’elle impose désormais un renoncement à la facilité et à la démission : elle soulève un enthousiame d’autant plus fervent qu’il trace les voies d’un renouveau du combat. Avec « political war« , c’est le rejet des guerres civiles absurdes qui ont longtemps ensanglanté certains pays, et dont l’apaisement est aujourd’hui indispensable, pour relever les vrais défis de l’avenir du continent.

L’intensité de la parole de Tiken Jah emportait l’adhésion : le frémissement était général, de la corbeille aux deuxièmes balcons, et la vieille salle rouge et or renouait pour un soir avec ses grandes heures, au rythme libérateur du reggae. Nous en sommes tous sortis grandis, plus forts, plus libres. Merci au magicien qui nous a rendu l’énergie.

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