Téléphonie mobile : le géant indien Bharti Airtel s’implante en Afrique


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Téléphone portable
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Bharti Airtel a racheté lundi, pour 9 milliards de dollars, 15 filiales africaines du groupe koweitien Zain dans 15 pays africains. Son objectif est de trouver de nouvelles sources de croissance, alors que le marché indien est soumis à une vive concurrence avec l’arrivée de nouveaux opérateurs de téléphonie mobile, comme le japonais NTT DoCoMo ou le norvégien Telenor.

La filiale télécoms du puissant conglomérat familial Bharti a décidé de poursuivre son expansion vers l’international, attiré par les promesses de forte croissance des marchés émergents africains.

Bharti Airtel est devenue en seulement dix ans le premier opérateur en Inde, avec 110 millions de clients. Contrôlée par son fondateur, le milliardaire Sunil Mittal, cette société cherchait depuis plusieurs années à prendre pied sur le continent africain pour limiter l’impact de la redoutable guerre des prix en Inde.

En 2009, son projet de mariage de 23 milliards de dollars avec son homologue sud-africain MTN, le deuxième en deux ans, a été empêché par les autorités d’Afrique du Sud à la dernière minute. Depuis, la majorité des analystes le voyait partir à l’assaut des actifs africains de Zain, le groupe de télécoms koweitien. Depuis lundi, c’est chose faite. Pour maintenir sa position de leader, l’opérateur indien a choisi de s’immiscer dans de nombreux marchés africains en rachetant quinze filiales de Zain implantés dans 15 pays – Au Burkina Faso, au Niger, au Sierra Leone, au Soudan, au Ghana, au Tchad, au Gabon, en Congo RDC, au Malawi, en Tanzanie, en Ouganda, au Kenya, en Zambie, au Congo Brazzaville et au Madagascar -. Reste que Bharti n’a pas encore acheté les actifs de Zain en Afrique. Un accord exclusif, valable jusqu’au 25 mars 2010, a été signé entre les deux parties. En cas de rupture de contrat, une indemnité de 150 millions $ est applicable. Bharti Airtel réalise en ce moment un audit préalable sur tous les actifs africains de Zain (sauf le Soudan et le Maroc).

Selon le Financial Times qui cite des sources proches du dossier, la transaction, entièrement en cash, serait réalisée en deux temps, puisque Bharti devrait d’abord payer 8,3 milliards de dollars puis 700 millions à une date ultérieure. Bharti, qui est en négociations exclusives jusqu’au 25 mars avec Zain pour le rachat de ses actifs dans 15 pays, avait précédemment indiqué que la transaction était valorisé 10,7 milliards de dollars. Mais le groupe indien a déclaré mardi que cette valorisation avait été calculée en tenant compte d’un endettement net des opérations africaines de Zain d’environ 1,7 milliard de dollars au 31 décembre 2009.

Au total, Zain contrôle des actifs dans 17 pays d’Afrique dont le plus peuplé, le Nigeria. Or la transaction ne concerne que 15 d’entre eux, le Soudan et le Maroc étant exclus. Les opérateurs africains de Zain comptent environ 40 millions d’abonnés. Ils viendront s’ajouter aux quelque 100 millions de clients de Bharti Airtel. Avec cette opération, le chiffre d’affaires de l’indien franchira la barre des 10 milliards de dollars. Grâce à cette opération, Bharti devrait devenir l’un des plus grands opérateurs sur les marchés émergents avec une présence dans plus de 24 pays en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde.

Un pari audacieux et risqué, porté vers l’avenir

Mais si l’opération impressionne par son envergure, elle n’a pas encore convaincu les actionnaires. L’action Bharti a clôturé, avant cette annonce, en baisse de 4,5% après la chute de 9,2% enregistrée la veille, les investisseurs s’inquiétant de la taille de la dette nécessaire au financement de la transaction, qui pourrait peser sur le bilan du groupe. L’action Bharti baisse parce que certains pensent que le groupe paie un prix trop important pour des actifs qui ne sont pas forcément très rentables.

En effet, les consommateurs africains seraient plus nombreux mais moins enclins à dépenser de gros billets. Ainsi, l’Afrique représente quelque 62% des 64,7 millions de clients de Zain mais ne contribue qu’à hauteur de 15% du bénéfice net du groupe.
D’un autre côté, l’Afrique pourrait bien constituer un terrain de jeux idéal pour l’opérateur indien. Le taux de pénétration des opérateurs de téléphonie mobile reste faible dans le continent (moins de 50% dans certains pays) d’autant qu’entre l’Inde et l’Afrique, les pratiques des utilisateurs et le mode de distribution des téléphones se ressemblent. Bharti Airtel pourra ainsi dupliquer son modèle économique qui a fait son succès en Inde : compenser les petits prix et le faible niveau de dépense mensuelle des consommateurs par un fort volume de vente et des coûts de commercialisation réduits.

Les groupes de téléphonie mobile se ruent sur les marchés des pays émergents

En pleine expansion, le marché africain suscite de plus en plus de convoitise. Tous les grands groupes, y compris occidentaux, cherchent des proies sur ce continent promis à une forte croissance et où les coûts de déploiement du réseau sont moindres que dans les pays développés. Déjà présent dans quatorze pays africains, France Télécom cherche à prendre le contrôle de l’égyptien Mobinil. Selon la rumeur, le groupe Tunisie Telecom ou l’algérien Djeezy pourrait vendre certaines de leurs filiales à des opérateurs occidentaux.

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