« Sarko en Afrique » : Tintin au Congo ?


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Quels liens Nicolas Sarkozy entretient-il avec l’Afrique ? Le président français a vite fait d’oublier le discours de rupture avec la Françafrique qu’il tenait durant sa campagne pour gérer au plus près les fructueuses « affaires africaines ». Antoine Glaser, directeur de La lettre du continent, et Stephen Smith, ancien reporter en Afrique pour Le Monde, Libération, et actuellement professeur d’université aux Etats-Unis, signent avec Sarko en Afrique (Plon, 2008), un ouvrage incisif et informé.

«Voila comme il se doit : à la fin du dessin animé, on a compris le film », concluent les sulfureux duettistes Antoine Glaser et Stephen Smith. La thèse de cet essai est dans l’avant-propos. A vous de lire… Cependant, au terme de cette plongée dans les eaux sous-marines franco-africaines de Bernard Kouchner, désormais chantre des militaro-humanitaires, des corridors humanitaires au Darfour en dépit de l’échec de l’opération « Restore Hope » en Somalie. Tout est humanitaire ! Tout est médiatique !

Glaser et Smith citent un officier de l’Etat-major des armées françaises : « il y a un deal entre Sarkoky et Kouchner. Kouchner est entré au gouvernement en échange de la promesse qu’il aurait un dossier médiatique pour lui tout seul : le Darfour et tout ce qu’il y a autour. C’est sa lucarne pour exister en dehors de L’Elysée »

« Sarko en Afrique » est aussi un livre très instructif sur la « chose militaire », sur le mythe de la France, gendarme du Continent Noir. Cet essai est riche sur la mutualisation des interventions armées françaises. En effet, la « France-Tchad » coexiste avec la France-Europe (l’Eufor au Tchad pour le Darfour), voire la France-ONU comme en Côte d’Ivoire. Ce qui n’est pas sans télescopage et autres dégâts collatéraux.

« Le Tchad est compliqué, la RCA (République Centrafricaine) est complexe et la France n’est pas simple », lâche à Glaser et Smith, le colonel Axelos de l’Eurofor.

Rien n’est simple, en effet…. Puisque tout est à l’avenant…. Une superbe bande-dessinée en noir et blanc… Le Colonel de réserve Jean-Marie Bockel, ancien ministre de la Coopération rétrogradé au rang de secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants. « Le BongoLand »…. Omar Bongo Odimba, le président du Gabon, le doyen des chefs d’Etats africains.

La fameuse « rupture » est un fantasme

Du discours du Cap, en Afrique du Sud, sur le désengagement militaire sur le Continent en passant le désormais mémorable Discours de Dakar qui n’est du reste qu’une reprise du funeste du discours de Toulon durant la campagne présidentielle, l’« ‘immigration choisie » est née. Une thématique pour capter les voix du Front national. Glaser et Smith rappellent en filigrane cet aspect : la politique d’immigration pèse sur la politique africaine de la France.

Un chiffre parle de lui-même : « le nombre de chômeurs chez les Immigrés, tous niveaux d’éducation confondus, est trois fois supérieur à celui des nationaux, il est même quatre fois supérieur chez les immigrés diplômés »

La bande-dessinée continue sur les bricolages en tous genres, de l’Angolate (trafic d’armes) à l’affaire Guy-André Kieffer (le journaliste franco-canadien disparu en Côte d’Ivoire) sans oublier l’affaire du juge Borrel à Djibouti. Glaser et Smith reviennent à la « chose militaire » et insistent sur cette plate-forme des « forces prépositionnées ». Djibouti, c’est la porte du Moyen-Orient et surtout de l’océan Indien.

Les tribulations de « Sarko en Afrique », de ses stratèges, conseillers et surtout hommes d’affaires (d’hommes d’enfer, adeptes du « marché de gré à gré », le capitalisme en mitaine), est une bande dessinée très drôle, très fouillée.

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