Quand la tradition autorise le sexe avant le mariage


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En République Démocratique du Congo, les Mongo laisseraient les filles avoir des relations sexuelles hors mariage. Ainsi expérimentées, ils estiment qu’elles seront plus à même de satisfaire leur futur mari. Les relations extra-conjugales seraient par ailleurs considérées par le partenaire comme une preuve de sex-appeal…

Certains congolais affirment que ce n’est qu’une rumeur, mais plusieurs spécialistes sont formels : chez les Mongo, les femmes ne sont pas tenues d’arriver vierges au mariage. Comme les Tetela, les Baboa ou les Muyombe, cette ethnie du Nord de la République Démocratique du Congo n’a rien contre le fait que les jeunes filles et garçons aient des relations sexuelles avant d’avoir la corde au cou. « Dans ces sociétés, le mariage n’est pas un événement, mais un processus. Dès qu’un fiancé se présente dans la famille de la fille et verse une pré-dot, il peut recevoir la jeune fille chez lui et avoir des rapports sexuels sans que cela soit une infraction », explique Barthélémy Kalambayi Banza, enseignant-chercheur au département des sciences de la population et du développement à l’université de Kinshasa.

« Et j’ajouterai que chez les Mongo tu peux fréquenter une fille chez ses parents jusqu’à t’enfermer avec elle en chambre. C’est encore une pratique courante à Kisangani », indique Léon Tsambu, assistant à la faculté des sciences sociales au département de sociologie et anthropologie de l’université de Kinshasa. Si la future épouse satisfait celui qui doit devenir son mari, le mariage sera célébré. Dans le cas contraire, les parents de la femme ne reçoivent pas la dot.

Femmes plus libérées dans l’intimité

Des traditions qui pourraient ulcérer certaines ethnies, comme celle des Luba, qui tiennent à la virginité avant le mariage. Mais pour les Mongo et les autres ethnies aux mœurs voisines, les relations pré-nuptiales cimenteraient la relation maritale à venir. Elles représentent l’« occasion d’acquérir suffisamment d’expériences afin de mieux « maîtriser » leur mari, une fois mariées », souligne Barthélémy Kalambayi Banza. Une expérience qu’elles acquièrent dès le plus jeune âge. « Ce n’est pas en termes de coutume et de souhait qu’il faut envisager la question. Il y a plutôt une espèce d’institutionnalisation de l’éducation sexuelle des filles qui finalement, puis-je dire, éveille le sens et la curiosité au point qu’elles finissent, dans certains cas, par être tentées de goutter aux délices du fruit défendu, qui ne l’est pas pour autant », commente Léon Tsambu.

Dans cette éduction, les femmes jouent un rôle de premier plan. « Les filles apprennent très tôt de leur mère comment se conduire avec son mari au lit, et il y a aussi l’expérience des sœurs aînées sur les cadettes qui joue beaucoup, à en croire un témoignage », poursuit Léon Tsamba, qui précise que les Mongo sont « pour la plupart d’une beauté à débaucher un ayatollah ». Ainsi formées aux plaisirs de la chair, bien des hommes seraient ravis de les avoir comme partenaires. Papy* a déjà connu une femme mongo. Le souvenir qu’elle lui a laissé est pour le moins positif. « Avec cette femme, on pouvait parler librement de sexe, raconte-t-il. Elle ne se fixait pas de limites et c’est ce que j’ai le plus apprécié. Avec les autres Africaines, on sent qu’elles ne se lâchent pas parce qu’elles ont peur que, si elles font telle ou telle chose, on pensera que c’est une pute. »

Femmes taxées de prostituées

On taxe justement parfois les filles mongo de prostituées – les belles de nuit de cette ethnie sont d’ailleurs appelées mingando – ou de filles au pagne léger, d’après plusieurs interlocuteurs. « La réputation de filles faciles au sujet des Mongo est due à l’éducation sexuelle précoce et à l’union libre avant le mariage, mais aussi le fait que certaines parmi elles se prostituent. Pourtant elles ne sont pas les seules à se prostituer en ville », remarque Léon Tsambu.

La mauvaise réputation des « filles de l’Equateur », du nom d’une province congolaise où l’ethnie est très présente, tient aussi au fait que la sexualité extraconjugale ne constituerait pas non plus une infraction. « Certains maris des sociétés qui ne condamnent pas la sexualité préconjugale et extraconjugale vont jusqu’à dire que leurs femmes ne sont pas jolies lorsqu’elles ne sortent pas avec d’autres hommes », confie Barthélémy Kalambayi Banza.

De quoi inquiéter certaines épouses, qui voient en elles des voleuses potentielles de maris. « Les femmes mongo sont réputées pour être expertes sur le plan sexuel. Alors, si un homme n’est pas satisfait avec sa femme, il pourrait chercher les bras d’une femme mongo », souligne Kitala Nzundu, lui aussi assistant au département sociologie de l’université de Kinshasa.

La menace du sida

La liberté sexuelle des Mongo effraye certains acteurs de la lutte contre le sida. La séroprévalence dans le pays est de 4% officiellement, avec d’importantes disparités selon les régions. Et utiliser un préservatif n’est toujours pas un réflexe. La foi grandissante des Mongo réduit cependant le nombre de partenaires sexuels. « Dès qu’un Mongo s’engage dans la voie de la prière, il abandonne les pratiques traditionnelles s’il a réellement cru à cette religion », assure Barthélémy Kalambayi Banza. Christine, une Congolaise topoke de 52 ans réfugiée en France, a constaté les changements amenés par la foi chrétienne : « Les gens prient beaucoup alors ces coutumes ont reculé. Il y a des femmes Mongo qui vont vierges au mariage ».

*Son prénom a été changé

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