Portrait de Katia Barillot


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Katia Barillot. Les téléspectateurs d’MCM Africa la connaissent tous. L’animatrice de Clip X-press, ancienne présentatrice sur Canal Plus, a construit sa carrière de journaliste dans un univers médiatique impitoyable. La jeune Guadeloupéenne, fière de ses racines et seule dans ses combats, dénonce le manque complicité des Noirs dans la sphère professionnelle. Portrait.

Regard sensuel, sourire éclatant, Katia Barillot ressemble à une fille de magazine. En Afrique, beaucoup la connaissent à travers Clip X-press, l’émission qu’elle anime quotidiennement sur MCM Africa. En France, la jeune Guadeloupéenne est connue du grand public pour avoir présenté pendant trois ans la météo sur Canal Plus. Derrière l’image cathodique d’un physique avenant se cache une véritable journaliste qui a fait ses armes toute seule dans l’univers des médias. Un monde qui fait rarement de cadeaux.

 » Je suis venue au journalisme par hasard, Je ne savais pas que ça pouvait m’intéresser « . Tout commence alors qu’elle est encore sur les bancs de la fac. Elle a vingt ans. Parallèlement à sa licence de Lettres modernes à Paris, Katia travaille dans une boite de production pour payer ses études. Son ambition : devenir enseignante. Mais une rencontre va bouleverser ses plans. Christian Dauriac. Alors directeur de France 3 Ile de France, il cherche une fille  » spirituelle et impertinente  » pour co-animer un talk-show avec Paul Wermus et demande à Katia de participer au casting. L’aventure commence.

Sortir du rôle de faire-valoir

 » C’était très difficile de faire l’émission à deux. J’étais une jeune néophyte, je décorais le plateau. Ça n’a pas été facile à vivre. A la télé, on vous jette à l’eau pour savoir si vous savez nager. On ne vous dit rien, on vous laisse trouver les clefs toute seule « , se souvient Katia. Elle sera remplacée un an plus tard. Il ne lui restait plus que la météo et un bulletin sur la pollution à présenter sur la chaîne.

C’est la chaîne Canal Jimmy qui lui mettra véritablement le pied à l’étriller du journalisme. Cobra girls, l’émission bi hebdomadaire qu’elle co-présente, lui fait goûter au travail de terrain. Le principe : deux jeunes femmes sillonnent dans une voiture les régions françaises à la rencontre des acteurs de la vie locale.  » L’émission m’a beaucoup appris. Elle m’a ouverte à d’autres choses et m’a obligée à sortir de mon cocon et du studio « , se souvient-elle. Prémisses d’une vocation.

L’accélérateur Canal Plus

Alors qu’elle rédige tous ses contenus, elle a du mal à se considérer comme une journaliste*. Car l’image qu’elle a des gens de la profession,  » des personnes imbus d’elles-mêmes et s’estimant les seules à savoir réfléchir sur un problème de société « , est loin d’être reluisante. Dans sa tête, elle reste une simple animatrice.  » Il est aussi vrai que je n’avais pas, à l’époque, une grande confiance en moi « .

Katia déploie ses ailes. Elle multiplie et cumule les expériences professionnelles. Presse écrite en Suisse, Radio France internationale (RFI), télévisions, il s’agit pour elle  » d’une condition de survie économique et professionnelle « . Gagner sa vie et surtout prouver qu’elle est autre chose qu’une simple jolie jeune femme. En 1999, tournant majeur de sa carrière, elle entre à Canal Plus dans la plus prestigieuse émission de la chaîne privée française – Nulle part ailleurs – pour y présenter la météo. Même si le travail n’a rien pour mettre en valeur toute l’étendue de ses compétences, il fait exploser sa notoriété.

La preuve par l’exemple

 » Je dois beaucoup à des gens comme Christian Doriac, Alex Taylor (ex RFI) et Alain Degreef (Canal Plus). Des rencontres. Ils ont vu au delà des apparences et m’ont permis d’être moi-même, si tant est qu’on puisse être soi-même à la télé « . Le regard qu’elle jette sur les média est sans complaisance.  » Sous les paillettes et les sourires, c’est un monde très violent. Tout marche par relations « .

Fière de ses racines, elle ne milite pas, pour autant, avec prosélytisme pour la cause afro.  » Quand on s’applique à travailler, on le fait avant tout pour soi. Ceux qui prétendent le faire au nom des leurs devraient être plus honnêtes avec eux-même. Si mon exemple encourage les miens, j’en serais ravie. Car je représente pour les Noirs un exemple de réussite et je leur prouve que c’est possible « . Une pierre à l’édifice.

Ne pas pratiquer l’invisibilité

Si elle refuse d’être un chef de file de la communauté afro, elle reconnaît le manque criant de représentation des Noirs dans les médias. Et s’étonne, en effet, qu’il n’y ait pas  » de plumes noires dans les grands journaux ou les grandes radios français ». C’est à la faveur d’un des ses premiers voyages à Londres qu’elle se rend compte du retard de la France.  » On ne peut pas se construire sans estime de soi, sans voir des personnes de sa communauté qui fassent quelque chose de positif « .

Il important, pour Katia, de garder un esprit d’appartenance. Esprit que  » les  » Noirs qui réussissent ont perdu « , estime-t-elle.  » Sous couvert d’intégration, ils pratiquent l’invisibilité « . Paradoxalement, elle note un malaise entre les Noirs eux-même dans le domaine professionnel.  » Il y a plus de distance entre les Noirs qu’entre les Noirs et les Blancs. J’ai rarement rencontré de gentillesse parmi les miens, il y a comme une sorte de méfiance « , déplore-t-elle. Dans ce monde individualiste, elle souhaiterait juste un peu plus de  » tolérance et de fraternité entre les Noirs ». En attendant, Katia continue son bout de chemin, du mieux qu’elle peut, en espérant que son travail soit, chaque jour, reconnu d’avantage.

*Elle est aujourd’hui journaliste à la rédaction du journal de Canal Plus

Photo

Katia Barillot.

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