MCM Africa tire sa révérence


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Logo de MCM Africa
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MCM Africa vit ses derniers jours. La chaîne musicale africaine du groupe MCM a été rachetée vendredi par TRACE Media BV et laissera la place en avril prochain à une nouvelle chaîne, TRACE@mcm, axée sur les cultures urbaines. Réactions à chaud dans l’univers des medias afro-caraïbéens.

MCM Africa s’arrête. Rachetée à 80% vendredi dernier par TRACE Media BV, la chaîne musicale du groupe MCM (Lagardère) sera remplacée en avril prochain par la chaîne TRACE. Si la nouvelle direction se refuse à communiquer pour l’instant sur les futurs programmes, la ligne éditoriale est définie comme « une combinaison inédite et explosive de programmes musicaux, d’information, de mode, d’expression, d’humour et d’événements liés aux cultures urbaines ». En un mot : fini l’Afrique. Ou presque. Hommes de presse, de radio ou de télévision des médias afro-caraïbéens, chacun analyse à sa façon la mort de MCM Africa. Un regard souvent impitoyable.

Amobé Mévégué, producteur et animateur de l’émission Plein Sud sur Radio France internationale (RFI) et directeur de publication du magazine Afrobiz. « Je suis seulement étonné que la disparition de la chaîne ne soit pas survenue plus tôt, cela faisait trois ans que tout le monde en parlait. MCM Africa n’a jamais été une priorité pour le groupe Lagardère. Mais cela pose clairement le problème de la représentativité de la culture afro-caraïbéenne dans l’univers des médias français. La place qu’occupe la musique africaine et des Caraïbes est insignifiante en France. Il n’y a aucune radio nationale qui nous diffuse. C’est le néant. »

Robert Brazza, animateur à Africa N°1. « C’était une disparition programmée. Depuis la disparition des programmes, l’antenne ne correspondait plus à une réalité africaine. Ce n’est pas parce que la chaîne passait de temps en temps un clip de Koffi Olomidé ou de Kassav qu’on pouvait se prévaloir d’une chaîne africaine. Avec de artistes comme Puff Daddy ou R Kelly à l’antenne, nous étions plus dans une logique MTV. La disparition de la chaîne relève dans une certaine mesure d’une honnêteté de la part d’MCM pour arrêter l’hypocrisie. La page est tournée. Il est temps qu’une réelle chaîne donne à la musique afro-caraïbéenne la part qu’elle mérite. Et qu’elle ne soit pas noyée par la musique de la diaspora afro-américaine. »

Jean-Michel Denis, rédacteur en chef adjoint d’Afrique Magazine. « Malgré toutes les critiques qu’on pouvait faire à MCM Africa, c’était un élément indispensable de l’audiovisuel africain. C’est quelque chose qui va manquer. La chaîne faisait beaucoup de sponsoring et développait une logique de partenariats. Même si c’était devenu un robinet à clips, la chaîne était en outre un espace d’exposition nécessaire pour les artistes. Quel va être l’impact sur l’industrie musicale en Afrique ? Le secteur audiovisuel africain, dans l’espace francophone, n’a pas beaucoup de moyens. Il faudrait très vite recréer une nouvelle chaîne de télévision, mais je reste assez pessimiste sur le sujet. Du moins à court terme. »

Joseph Andjou, journaliste et présentateur du journal i-Afrique sur i-Télévision (Canal +). « Je n’ai aucun sentiment de tristesse ou de regret à l’égard de la disparition de MCM Africa. Le groupe MCM n’a jamais investi comme il se doit sur l’Afrique car l’Afrique ne paie pas. La chaîne a disparu et je dirais tant mieux car elle était faite par des gens qui n’avaient pas envie de faire avancer l’Afrique. Ils en nourrissaient d’ailleurs une vision tout à fait éronnée. S’il faut monter une chaîne avec des gens qui ne connaissent pas vraiment l’Afrique ce n’est pas la peine. La culture africaine ne va pas en prendre un coup. Il est possible de monter une vraie chaîne africaine. Il faut juste des personnes compétentes et ambitieuses et des fonds. Ce qu’il faut c’est démarrer petit pour grandir progressivement. Je ne suis pas pessimiste pour l’avenir. Et puis il existe déjà en Afrique des chaînes privées de télévision, à l’image de LC2 au Bénin, qui marchent très bien. Il faudrait simplement qu’elles arrivent à s’installer sur un bouquet satellitaire en France pour mieux ventiler leurs programmes ».

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