« Les soldats inconnus »


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Dans le programme « OFF » du Festival d’Avignon, une pièce tire son épingle du jeu : Les soldats inconnus, une création collective des compagnies Graines de soleil de Paris et Gueules tapées de Dakar. Une pièce simple et touchante, portée par d’excellents acteurs, qui rend hommage aux soldats africains morts pour la France.

La pièce s’ouvre sur le visage tourmenté d’un jeune officier. Il parle : « Cette fois encore, on ne faisait pas de détail, on les envoyait tous à la mort. C’est ça l’égalité. Français, Algériens, Sénégalais, Marocains, Ivoiriens, Tunisiens, Maliens, Malgaches… des hommes dont la vie ne vaut rien ». Hiver 1944 dans les Vosges. Le jeune sergent, né à Oran, en Algérie, d’origine espagnole et appelé en 1939 s’est ensuite engagé dans les forces françaises libres. Il se retrouve avec deux goumiers marocains qui ont participé à la libération de l’Italie et du Sud de la France, Ali et Mokhtar. A leurs côtés, les tirailleurs sénégalais Aboubakar et malien Moussa, deux anciens prisonniers de guerre qui ont connu les camps nazis.

Cinq Africains qui se battent « pour l’honneur de la France », selon la formule consacrée. Cinq personnalités qui racontent leur guerre et la vie à laquelle ils ont été arrachés. La pièce s’inspire de témoignages, de lettres, de photos et se base sur des textes : C’était la guerre des tranchées de Tardi, Morts pour la Francede Doumbi Fakoly, Le masque boiteux – histoire de soldats de Koffi Kwahulé, La danse du sergent Musgrave de John Arden et Les oubliés de guerre de Michel Séonnet. La troupe a aussi beaucoup travaillé l’improvisation pour donner corps à ces soldats qui revivent sur scène.

Graines de soleil et Gueules tapées

« Nous voulions rendre hommage aux tirailleurs, aux hommes qui ont combattu et sont morts pour une patrie qui n’était et n’est pas la leur. Une patrie qui aujourd’hui leur refuse bien des droits y compris celui de mémoire. Nous voulions parler de ces hommes, de leur vie, celle qu’ils ont perdue et celle qu’on leur a imposée, de leur courage et de leurs faiblesses devant les multiples horreurs qui viennent avec la guerre », expliquent les responsable de la compagnie Graines de Soleil dont le siège se trouve dans le Quartier de la Goutte d’Or, à Paris, et qui a produit la pièce avec la troupe théâtrale « Les Gueules Tapées » de Dakar. Les acteurs sont tous remarquables et l’on doit la mise en scène, épurée mais efficace, à Khalid Toumer, qui a créé Graines de Soleil en 1998.

Alors que la polémique sur les pensions des anciens combattants africains est toujours d’actualité et qu’à la rentrée sort le film Indigènes de Rachid Bouchareb, présenté au dernier festival de Cannes, il faut aller voir Les soldats inconnus. Une pièce simple et forte au goût de sang et de trouille mais aussi de fraternité et de courage. Co-produit par les Instituts culturels français de Casablanca et de Marrakech (Maroc), le spectacle se joue en ce moment au Festival « OFF » d’Avignon, dans l’excellente Chapelle du Verbe Incarné, un espace théâtral dédié aux scénographies d’Outre-mer, d’Afrique et des diasporas.

Pour voir prochainement Les soldats inconnus :

Lavoir Moderne Parisien (35, rue Léon – 75018 Paris) du 5 au 16 septembre 2006 à 21h

L’espace 600 de Grenoble (97, galerie de l’Arlequin) les 10,15 et 18 novembre 2006

Centre culturel La Clef (21, rue de la Clef – 75005 Paris) le 23 novembre 2006

Festival des Réalités de Bamako, Mali, décembre 2006

Fest’Art, Festival international pour la paix, Dakar, Sénégal, mai 2007

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