L’Egypte inspirée par la cyber-révolution tunisienne


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Des manifestations de grande ampleur ont eu lieu dans plusieurs villes d’Egypte ce mardi. Sur le modèle de la révolution tunisienne, les réseaux sociaux, en particulier Facebook et Twitter, ont servi de relais à l’appel à la révolte contre la vie chère, le chômage et le pouvoir en place lancé par partis d’opposition, syndicats, associations et simples citoyens.

Après les Tunisiens, les Egyptiens sont à leur tour descendus dans la rue. Ils étaient plusieurs milliers à manifester dans tous le pays pour faire de faire de ce mardi une « journée de révolte contre la torture, la pauvreté, la corruption et le chômage » – au moins 15 000 dans la seule ville du Caire, selon l’AFP. « La Tunisie est la solution ! », « Après Ben Ali, à qui le tour ? », « A bas Hosni Moubarak ! » scandaient les manifestants, prenant pour référence la révolte du peuple tunisien qui, le 14 janvier, a chassé le président Ben Ali resté 23 ans au pouvoir. Dans leur pays, le président Hosni Moubarak, âgé de 82 ans, est au pouvoir depuis 1981…

Globalement pacifique, le mouvement de protestation appelé par les partis d’opposition Wafd et Al-Ghad, les Frères musulmans, des organisations syndicales, étudiantes, de fonctionnaires et de jeunesse, a connu quelques débordements au Caire. La police, dont de 20 000 à 30 000 éléments étaient mobilisés au centre de la capitale, a répliqué à des jets de pierre en faisant usage de gaz lacrymogènes, des canons à eau, et en chargeant la foule à coups de bâtons pour tenter de la disperser.

Les réseaux sociaux ont largement contribué à la préparation de la manifestation très suivie par la jeunesse. Les messages s’y sont succédés à une vitesse effrénée. Les 17 millions d’internautes égyptiens ont relayé l’information via Facebook et Twitter. Plusieurs groupes de soutien se sont formés sur Facebook. Le groupe « Jour de révolution » a déclaré que, par son biais, l’appel à la grève avait été relayé par 80 000 personnes.

« Cher peuple tunisien, le soleil de la révolution ne va pas s’éclipser », pouvait-t-on encore lire ce mardi sur le groupe «25 janvier : la révolution de la liberté»-qui compte près de 400 000 adeptes. Autre exemple : la page intitulée «We are all Khaled Said» («Nous sommes tous des Khaled Said»), créée en mémoire d’un habitant d’Alexandrie qui aurait été torturé à mort par la police l’été dernier, a parmi d’autres fait circuler l’information. La date du 25 janvier, choisie pour l’événement, fait référence à la journée de la police célébrée tous les ans en mémoire du soulèvement des forces de l’ordre contre les Britanniques, en 1952. Des internautes ont d’ailleurs appelé la police à se joindre à eux.

Twitter, n’a pas été en reste dans le mouvement. « 25 Jan » est un mot-clé qui est souvent apparu chez les amateurs du twit. Lobna Darwish, qui se présente comme une Egyptienne habitant en Californie, y donne notamment des conseils aux manifestants pour se protéger des forces de l’ordre. Mais ce mardi les internautes n’ont pu accéder à Twitter, qui a été bloqué.

Une grande misère sociale

L’Egypte, le pays le plus peuplé du monde arabe avec 80 millions d’habitants, est régulièrement secouée depuis plusieurs années par de fortes grognes sociales. Près de la moitié des Egyptiens vit avec moins de deux dollars par jour (1,46 euro), le seuil de pauvreté fixé par l’ONU. Les jeunes, qui représentent 60% de la population, sont de plus en plus nombreux à être confrontés au chômage. 25% selon les statistiques officielles. En réalité, environ la moitié d’entre eux serait sans emploi. Plusieurs immolations par le feu ont eu lieu ces derniers jours en Egypte, rappelant celle du jeune tunisien Mohamed Bouazizi qui avait déclenché la révolte dans son pays.

Les autorités ont tenté de minimiser l’appel à la révolte. Le ministre de l’Intérieur Habib al-Adli a déclaré, hier, au journal gouvernemental al-Ahram, que les organisateurs des manifestations étaient « inconscients » et assuré que leurs appels n’auraient « pas d’impact ». « Les forces de l’ordre sont capables de faire face à toute menace contre la sécurité de la population, et nous ne prendrons à la légère aucune atteinte aux biens ni aucune infraction à la loi », a-t-il ajouté.

Malgré ces déclarations, le peuple égyptien a manifesté en masse. Porté par la révolution tunisienne, il veut à son tour goûter aux fruits de la liberté.

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